Interpellation de lycéens à Mantes-la-Jolie : l’enquête de l’IGPN classée sans suite

L’enquête préliminaire portait sur l’interpellation, en décembre 2018, de 151 jeunes lors d’une mobilisation lycéenne dans cette ville des Yvelines.

Le Monde avec AFP Publié  le 27/07/2019

Mobilisation étudiante en soutien aux lycéens interpellés quelques jours plus tôt, à Mantes-la-Jolie (Yvelines), le 12 décembre 2018. ALAIN JOCARD / AFP

Les images de l’interpellation avaient provoqué un choc retentissant. Cent cinquante et un jeunes âgés entre 12 et 21 ans, mis en rang, à genoux mains sur la tête, encadrés par des policiers en tenue et filmés par eux. L’enquête préliminaire confiée à l’inspection générale de la police (IGPN) portant sur cette interpellation survenue en décembre 2018, lors d’une mobilisation lycéenne à Mantes-la-Jolie (Yvelines), a été classée sans suite, a-t-on appris vendredi 26 juillet auprès du parquet de Nanterre.

L’Union nationale lycéenne, puis dix mineurs, avaient déposé plainte notamment pour « atteinte arbitraire à la liberté individuelle », « violences volontaires par une personne dépositaire de l’autorité publique » ainsi que pour « diffusion illégale de l’image de personnes ». Plus de sept mois plus tard, une enquête préliminaire concernant 12 plaintes, ouverte le 12 février et confiée à la « police des polices », a été classée sans suite le 24 juillet, a précisé la procureure de la République dans un communiqué à l’Agence France-Presse (AFP).

Article réservé à nos abonnés Lire aussi  Récit de la première garde à vue des lycéens de Mantes-la-Jolie

« Pas de faute »

« Le fait de retenir les personnes interpellées en position à genoux ou assise, entravées pour certaines d’entre elles, apparaît justifié par le contexte exceptionnel de violences urbaines graves et le nombre de personnes devant être conduites dans les locaux de police, nécessitant une organisation matérielle incompressible », écrit la procureure de Nanterre, où le dossier a été dépaysé.

Les plaignants « placés en garde à vue ont bénéficié des droits légaux attachés au régime de la garde à vue », souligne la procureure. Les « violences aggravées » dénoncées par quatre mineurs « ne sont corroborées, ni par leurs déclarations ou les observations de leurs conseils, ni par les examens médicaux des médecins légistes, ni lors de leur présentation à un magistrat dans le cadre de la prolongation de leur garde à vue », selon le communiqué du ministère public.

L’auteur de la vidéo, un « fonctionnaire de police, fait l’objet d’une procédure de sanction administrative, et une action disciplinaire est sollicitée auprès du procureur général de Versailles », a précisé vendredi la procureure de Nanterre. En revanche, la personne ayant diffusé la vidéo n’a pas été identifiée, « le site hébergeur refusant de répondre à la réquisition judiciaire, au nom de la protection des droits et libertés des utilisateurs ».

Lire aussi : « On peut interpréter [la vidéo des lycéens à Mantes-la-Jolie] comme un acte de vengeance »

« Non-enquête »

Cette décision « n’a pas de sens, ni factuel, ni juridique, et elle est sans conséquence sur l’enquête qui se mène », a réagi Me Arié Alimi, avocat des familles et de l’UNL. Il a souligné qu’une vingtaine de nouvelles plaintes avaient été déposées et qu’un juge d’instruction allait être saisi du dossier.

Au milieu de l’été, « cela ressemble plus à des effets d’annonce qu’à des annonces », a-t-il estimé. Seules « quatre victimes » ont été entendues, a affirmé l’avocat, qui parle d’une « non-enquête »« Là encore, il n’y a pas de surprise », a déclaré Yessa Belkhodja, porte-parole du Collectif de défense des jeunes du Mantois. « Concernant les enquêtes préliminaires, la police qui enquête sur la police, on n’y croit pas vraiment ».

Un collège de cinq avocats – dont Emmanuel Tordjman, l’un des deux conseils des familles de Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) en 2005 – s’est constitué pour défendre la vingtaine de familles qui a porté plainte.

Les avocats des plaignants ont sollicité la saisine d’un juge d’instruction en déposant une plainte avec constitution de partie civile le 6 mai. Cette deuxième procédure, qui doit aboutir prochainement à l’ouverture d’une information judiciaire, se poursuit, a confirmé le parquet.

Dans cette affaire, deux autres enquêtes ont été ouvertes. Une enquête administrative a conclu à l’absence de « comportements déviants de la part des policiers », a annoncé mi-mai la patronne de l’IGPN. L’enquête du Défenseur des droits, qui s’est lui-même saisi du dossier, est quant à elle toujours en cours.

Réagissez ou consultez l’ensemble des contributions
Ce champ est nécessaire.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*