
Arguments pour la lutte sociale | Lire sur le blog ou le lecteur |
Présentation Nous publions cette contribution qui nous vient de Belgique. Contribution Depuis l’élection de Trump et plus encore depuis le retrait américain de son aide militaire à l’Ukraine, on entend monter un discours de nature gaulliste sur l’ « indépendance » nécessaire de l’Europe, y compris à gauche. L’Europe et Zelensky seraient responsables d’avoir trop compté sur la sécurité américaine. J’ai même lu sous la plume de certains gauchistes que Zelensky n’aurait pas du négocier avec l’administration Trump. Comme souvent avec les discours souverainistes, il y a beaucoup de fantasmes de toute puissance dans de telles affirmations. Face à une extrême-droite européenne pro-Trump (y compris le VLD qui lorgne désormais du côté de Musk), nous avons une extrême-gauche campiste qui vit dans le déni complet de la guerre et parle de la paix en Ukraine selon les mêmes termes que l’administration Trump (pour le cas du PTB, il s’agit d’un alignement sur la Chine). Entre les discours pro-russes de déni de réalité et les discours libéraux européens sur le réarmement de l’Europe comme puissance, la gauche européenne se cherche. Il me semble qu’il faut pouvoir séparer la question de la victoire de la résistance ukrainienne de celle du réarmement européen. Là, aujourd’hui, pour tous les démocrates de gauche, il s’agit de gagner la guerre d’Ukraine, contre Poutine, contre Xi Jinping, contre Trump. C’est pour cette raison précise qu’il faut soutenir Zelensky dans le refus d’un “cessez-le-feu” sans garanties de sécurité. Plus fondamentalement, gagner la guerre d’Ukraine, dans la suite de l’insurrection syrienne victorieuse, ce serait d’abord mette un point d’arrêt à l’impérialisme russe en expansion depuis la seconde guerre de Tchétchénie (1999) au moins. L’Europe ne doit pas se réarmer sur le dos de l’Ukraine de façon abstraite, elle doit prendre part à la guerre d’indépendance nationale en Ukraine, de façon à jeter les forces armées russes hors d’Ukraine, avec le droit international et les conventions de l’ONU comme unique boussole. D’une certaine façon, ici, la gauche européenne pourrait rester léniniste. Il s’agit en effet de transformer la guerre impérialiste en une guerre révolutionnaire. Avec le renversement des alliances trans-atlantiques sous le régime trumpiste mafieux, désormais aligné sur le Kremlin, la mission historique de la gauche apparaît en toute clarté. La guerre d’indépendance ukrainienne peut et doit se transformer en guerre contre les oligarques, contre les ploutocrates, contre le capital rentier et ses logiques mafieuses. Une guerre anti-impérialiste, pour le droit à l’autodétermination et contre la paix des empires, celle du business as usual. Cette transformation révolutionnaire ne sera possible qu’à condition que la gauche européenne refuse le cadre libéral gaulliste actuel. Il ne s’agit pas d’augmenter les budgets de dépenses pour créer une puissance européenne imaginaire, il s’agit de s’engager résolument dans la guerre d’Ukraine pour défaire l’impérialisme russe et américain. Contre les puissances du Saint-Empire coalisées et pour le droit des peuples à disposer d’eux mêmes. A rebours complet des néo-chauvinismes, qu’ils soient décoloniaux ou gaullistes, la gauche doit ouvrir le cadre, la perspective, à l’échelle mondiale. Ce n’est pas vrai que l’Europe se trouve seule face à son destin. Partout dans le monde les peuples sont en lutte contre les régimes kleptocrates qui les gouvernent. L’insurrection victorieuse en Syrie a ouvert la voie. La perspective peut prendre les noms de Hirak, de Maïdan ou de Occupy Wall Street. Le peuple grec est encore descendu il y a quelques jours dans la rue, par milliers, contre les effets criminels des politiques d’austérité sur les services publics. Nous étions 100.000 dans les rues de Bruxelles contre le gouvernement Arizona. Une des raisons qui fait que les discours complotistes made in Poutine circulent quasiment comme dans un pipeline jusque dans les cerveaux des campistes, c’est parce que, pour une bonne partie de l’opinion publique ouest européenne qui vit encore dans une immunité otaniste, la guerre d’Ukraine demeure illisible et lointaine. Or, la dernière séquence, avec le refus de Zelensky de céder aux menaces de Vance et de Trump, change complètement la nature politique de cette guerre. Zelensky qui était moqué comme un clown, comme un homme d’État fantoche, etc. apparaît désormais comme celui qui a tenu tête aux Empires américain et russe coalisés. La guerre d’Ukraine devient alors une guerre anti-impérialistes. L’Europe ne doit pas s’armer elle-même, derrière les frontières de l’OTAN et de Schengen, dans un réflexe immunitaire purement impérialiste et dans la perspective d’un affrontement d’empire à empire. Elle doit résolument s’engager avec l’Ukraine de façon à ce que l’Ukraine puisse conserver son intégrité territoriale, de façon à faire respecter le droit international, dans le cadre de l’ONU. De ce point de vue, le vote à l’assemblée générale de la résolution pour « promouvoir une paix globale, juste et durable en Ukraine » offre une cartographie extrêmement précise de l’ennemi de la démocratie : Hongrie, Israël, Russie, États-Unis, Corée du Nord et les pays qui leur sont inféodés. Ce bloc fasciste n’est pas majoritaire, loin de là. Contre les fascistes, contre les néo-chauvinistes, contre les gaullistes, nous resterons internationalistes. Le 2 mars 2025. |
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