Israël tue, la France émue

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9 avril 2025

C’est un communiqué du Quai d’Orsay, le 1er avril.

« La France exprime son émotion après la découverte des dépouilles de quinze secouristes du Croissant-Rouge palestinien (PRCS) et de la défense civile palestinienne, le 30 mars, décédés dans le cadre d’une opération militaire israélienne une semaine plus tôt alors qu’ils venaient porter assistance à des blessés. »

Comme le confirmera une vidéo réalisée par l’une des victimes sur son téléphone portable peu avant sa mort – et dont l’existence a été révélée le 5 avril -, les travailleurs humanitaires ne sont pas simplement « décédés ». Ils ont été assassinés.

Ces événements ne sont pas déroulés « dans le cadre d’une opération militaire » : le convoi d’ambulances, parfaitement identifiable avec ses gyrophares et ses sirènes hurlantes, faisait route pour secourir des civils bombardés à Rafah. Il a été poursuivi et intercepté par les militaires. Ses passagers arrêtés.

La « découverte » des « dépouilles » n’a été possible qu’une semaine après l’attaque (illégale) de l’armée israélienne, lorsque des collègues des secouristes ont enfin eu accès à la zone.

Quant à l’expression d’une « émotion », elle pouvait s’accompagner d’une condamnation et de l’exigence d’explications adressées aux autorités israéliennes – ignorées dans le communiqué.

À la suite des massacres perpétrés par le Hamas dans le sud d’Israël le 7 octobre 2023, la diplomatie française a effectué un virage sur l’aile. D’une part, en adhérant largement au discours du gouvernement d’extrême droite dirigé par Benyamin Netanyahou, d’autre part en manquant à ses obligations de base. De Charles de Gaulle (1958-1969) au président Jacques Chirac (1995-2007), Paris défendait le droit du peuple palestinien à obtenir enfin l’État promis par les résolutions des Nations unies et rappelait avec force Israël à ses devoirs : se retirer des territoires occupés en 1967 et respecter ses responsabilités de « puissance occupante » en Cisjordanie et à Gaza.

Depuis le déclenchement de l’offensive israélienne à Gaza, la violation répétée – parfaitement établie par de multiples rapports d’organismes des Nations unies et d’organisations non gouvernementales – du droit international humanitaire ne provoque que de molles condamnations. Celle, par exemple, de l’utilisation de l’aide humanitaire comme « instrument de guerre », par le président Emmanuel Macron en Égypte, le 8 avril. Cette retenue tranche avec la netteté et la fermeté – justifiées – des réactions aux crimes commis par l’armée russe en Ukraine.

Avocate historique de la Cour pénale internationale, la France a autorisé, dans la nuit du 6 au 7 avril 2025, l’avion de M. Netanyahou, pourtant sous mandat d’arrêt, à survoler son territoire pour se rendre à Washington.

deux archives

Il n’y aura pas de rue Emmanuel-Macron à Naplouse

Benoît Bréville, novembre 2023
On peine aujourd’hui à le croire, mais la France a longtemps été réputée amie du peuple palestinien. Pendant des décennies, ses dirigeants n’hésitaient pas à dénoncer la colonisation, l’occupation, les expulsions, les humiliations, tous ces « oui mais » aujourd’hui bannis du vocabulaire officiel. Les présidents français se contentent désormais de suivre le chemin tracé par Washington. ->

La guerre n’est pas le plus court chemin vers la paix

Dominique de Villepin, juin 2024  
Dans un monde où nombre d’États – l’Ukrai­ne, la Russie, la Palestine, Israël – perçoivent les conflits qui les engagent comme existentiels, comment éviter une montée aux extrêmes, surtout quand les grandes puissances s’affranchissent de leurs propres règles ? Loin du néoconservatisme décomplexé qu’elle pratique dans une Europe hors jeu, à quoi pourrait ressembler la recherche par la France d’une sécurité collective ->
une carte
Gaza sous le feu

Gaza sous le feu

Cécile Marin, novembre 2023
un chiffre

408

Nombre de travailleurs humanitaires tués à Gaza depuis le début de la guerre lancée par Israël après l’attaque du 7 octobre 2023.Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (Unrwa).
une citation
« Les Palestiniens se sentent invisibles aux yeux du monde et des dirigeants. Et je ne sais pas quoi leur répondre. Face aux atrocités commises sous nos yeux, l’inaction internationale est glaçante. Le degré de déshumanisation des Palestiniens est sidérant. »Mara Bernasconi, chargée de plaidoyer pour la Palestine chez Handicap International, de retour d’une mission à Gaza. L’Humanité, 14 mars 2025.
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