Dollar contre euro

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Par Michael Roberts le 4 juillet 2025

Cette semaine, les principaux dirigeants des principales banques centrales du monde se sont réunis sous la chaleur étouffante de Sintra, au Portugal (même si je suis certain que la climatisation est efficace dans leur hôtel chic niché dans les collines). Selon les médias financiers, la grande question est de savoir si le dollar américain va poursuivre sa chute, ce qui soulève la question de savoir si la domination du dollar sur les marchés mondiaux touche à sa fin – et, avec elle, le « privilège exorbitant » dont jouissent les États-Unis pour contrôler l’offre de la principale monnaie d’échange et de financement mondiale.

Il est vrai que le dollar a chuté face aux autres grandes devises à son plus bas niveau en trois ans et demi, depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump en janvier. Ses excès de tarifs douaniers et ses revirements radicaux ont accru l’incertitude du commerce international et, pour les investisseurs, quant à la nécessité de conserver leurs achats et leurs actifs en dollars.

Mais est-ce là la véritable raison de la chute du dollar ? Premièrement, le dollar américain est peut-être à son plus bas niveau depuis trois ans face aux autres devises, mais c’est uniquement parce qu’il a atteint des sommets historiques à l’époque. Sur une période beaucoup plus longue, le dollar n’est en aucun cas faible face à l’euro, à la livre sterling, au yen ou au renminbi.

La valeur du dollar a chuté d’environ 9 % depuis janvier, avec une baisse de 4,5 % rien qu’en avril. Mais même après l’impact des colères de Trump sur les tarifs douaniers, l’indice du dollar est resté quasiment au même niveau qu’il y a dix ans.

À mon avis, la véritable raison pour laquelle le dollar s’est récemment affaibli par rapport à l’euro et aux autres devises est que l’économie américaine ralentit et que la Réserve fédérale américaine subit désormais une pression pour réduire son taux d’intérêt directeur afin de réduire les coûts d’emprunt, les taux hypothécaires et les coûts du service de la dette pour les entreprises et les ménages.

Le président de la Fed, Powell, subit une pression énorme pour réduire les taux d’intérêt, une décision qu’il a hésité à prendre, car il craint que les mesures tarifaires de Trump n’entraînent une hausse de l’inflation à la consommation. Trump exige sa démission immédiate afin de pouvoir nommer un président de la Fed qui réduira drastiquement les taux d’intérêt.

Le comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) est divisé sur la question de savoir s’il faut maintenir les taux d’intérêt à un niveau élevé, soi-disant pour contenir l’inflation, ou au contraire les baisser pour soutenir l’économie américaine. Ce dilemme est en réalité une fausse dichotomie , car la politique monétaire mise en œuvre par les banques centrales ne contribue guère à « gérer » les économies capitalistes, que ce soit pour « maîtriser l’inflation » ou « stimuler la croissance ».

Néanmoins, on s’attend de plus en plus à ce que la Fed accélère ses baisses de taux d’ici la fin de l’année, réduisant ainsi l’écart entre les taux d’intérêt américains et ceux de l’Europe et du Japon. Cela rendra moins attractifs les actifs en dollars, ce qui maintiendra le dollar plus faible qu’auparavant.

Mais rien de tout cela ne signifie que le dollar perdra son hégémonie sur les marchés mondiaux. Penser ainsi relève au mieux d’un vœu pieux et d’une mauvaise appréciation de la solidité des autres grandes économies. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a appliqué une partie de ce vœu pieux il y a quelques semaines en déclarant : « L’euro pourrait devenir une alternative viable au dollar… ouvrant la voie à un « moment euro mondial ». Sérieusement ! Christine Lagarde n’a-t-elle pas constaté la stagnation des grandes économies européennes ? »

Voici les derniers chiffres du taux de croissance annuel (en glissement annuel) des principales économies :

Inde 7,4 %, Chine 5,4 %, Brésil 2,9 %, Canada 2,3 %, États-Unis 2,0 %, Japon 1,7 %, Russie 1,4 %, Royaume-Uni 1,3 %, Afrique du Sud 0,8 %, Italie 0,7 %, France 0,6 %, Allemagne zéro.

Ils montrent que, parmi les principales économies du G7, les économies du Canada et des États-Unis affichent des performances deux fois supérieures à celles des économies européennes. Les économies européennes stagnent ; les États-Unis commencent simplement à rejoindre les économies européennes stagnantes. Les dernières données du PIB réel américain indiquent une baisse de 0,5 %, tandis que le secteur manufacturier américain reste en territoire de contraction (en dessous de 50 sur le graphique).

C’est la raison pour laquelle le dollar s’affaiblit et la Fed est susceptible de baisser ses taux d’intérêt. Mais le dollar représente toujours 58 % des réserves internationales, bien plus que les 20 % de l’euro. Le vœu pieux de Lagarde n’est que cela.

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