Un compte-rendu de Casus Belli par Romain Pigeaud, sur le site Hominidés
By Christophe Darmangeat on Sep 22, 2025
Un nouveau compte rendu de mon livre par le préhistorien Romain Pigeaud, disponible sur le site Hominidés :
Quelle est l’origine de la guerre ? Nous fut-elle léguée par le Néolithique, comme la carie dentaire ? Ou bien provient-elle de notre part animale et sommes-nous condamnés à la voir réapparaître sans cesse ? Questions vertigineuses et pour certaines multiséculaires, que Christophe Darmangeat embrasse avec rigueur et méthode.
Dans la lignée d’Alain Testart, il commence par rebattre les cartes et redéfinir les données du problème. Dans plusieurs chapitres lumineux, il démontre que « la guerre ne constitue qu’une forme particulière du vaste ensemble des confrontations collectives ». Contrairement à notre perception intuitive, les sociétés de chasseurs-cueilleurs sans État constitué ne sont pas particulièrement pacifiques et « possèdent des lois qui, si elles ne sont pas écrites, sont tout aussi élaborées que les nôtres et distinguent fort bien ce qui relève du pénal et du civil ». Le lecteur est mortifié d’apprendre toutes les façons que les humains ont inventées pour prendre la vie de son prochain : guerre, feud (se faire justice soi-même), chasse aux têtes, duels collectifs, « rituels de la paix », razzia… Christophe Darmangeat, après avoir établi des critères généraux qui permettent de dépasser les cas particuliers, propose une classification générale des confrontations collectives, qu’il expose et défend avec force exemples ethnographiques. La guerre est ainsi une confrontation collective discrétionnaire (sans accord préalable, « à la discrétion » de chaque camp) et résolutive (qui a pour objectif de « résoudre un différend et de parvenir à des rapports plus apaisés »).
Dans la deuxième partie, Christophe Darmangeat traite des origines de la guerre, à partir d’exemples pris dans le monde animal, dans les enquêtes ethnographiques et les découvertes archéologiques. Sans dogmatisme, il démontre qu’il existe un faisceau de présomptions qui plaident en faveur de la « chronologie longue », c’est-à-dire la profonde ancienneté des confrontations collectives, et même de la guerre (son existence chez les chimpanzés est toujours questionnée), sans qu’il soit possible d’en estimer la fréquence ou la proportion des sociétés qui en étaient affectées. Mais quels en seraient les motifs ?
Dans une troisième partie, Christophe Darmangeat continue à questionner les remarques intuitives frappées au coin du « bon sens », qui se fissurent au contact de la réalité des données du terrain : accroître son territoire ? Conquérir des terres cultivables ? Augmenter ses ressources alimentaires (vol de récolte ou de bétail) ? Capturer des femmes ? Prendre la force vitale de l’ennemi ? Chaque exemple convoqué comporte des fragilités et suscite le débat. Attention cependant à ne pas verser dans un relativisme stérile : d’autres motifs existent, comme la vengeance, « l’homicide de compensation » ou le pur cannibalisme.
Après un excursus contemporain sur la manière dont l’État canalise la violence au profit de la seule guerre inter-États, Christophe Darmangeat conclut de manière assez pessimiste : les hommes n’ont pas forcément besoin de raisons pour s’affronter : la xénophobie et le racisme sont universellement partagés ; « les groupes humains peuvent développer des relations d’inimitié du seul fait qu’ils existent de manière autonome et séparée ». Si l’État a « pacifié les rapports sociaux quotidiens », il a confisqué, selon lui, la violence au service d’une caste. Christophe Darmangeat forme des vœux pour une meilleure répartition des ressources et une plus grande interpénétration des circuits de production et de distribution, conditions sine qua non pour que la Paix règne enfin en ce monde.
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