
Arguments pour la lutte sociale | Lire sur le blog ou le lecteur |
Après les puissantes révoltes de la jeunesse en Indonésie et au Népal qui ont ébranlé (Indonésie) ou mis à bas (Népal) des régimes couvrant une exploitation éhontée de la majorité de la population, voici le tour des jeunesses malgache et marocaine de réclamer leur droit de vivre.
Dans les deux cas, les revendications exprimées partent des besoins immédiats pour obtenir une vie digne et vivable : « De l’eau et de l’électricité » à Madagascar, « l’accès aux soins, à l’emploi » au Maroc. Avec un fil conducteur commun, la dénonciation de la corruption des gouvernants dont les liens et les connivences avec les dirigeants économiques atteignent un caractère vertigineusement obscène car public, ce qui les rend insupportables pour le plus grand nombre. Dans les deux cas, la jeunesse scolarisée ou non voit son avenir bouché par un système dont les responsables exhibent sans voile leurs turpitudes répugnantes. Le premier ministre marocain et le président malgache se disputent allégrement le titre de premier corrompu du continent. Mais la jeunesse africaine ne va pas tolérer longtemps cette compétition. Depuis le 25 septembre, le mouvement de la jeunesse malgache a démarré sous l’égide du collectif GenZ (Génération Z) et compte déjà 22 morts et des centaines de blessés. Dans les deux cas, la demande immédiate de faire mieux que survivre est un puissant moteur qui expose l’incapacité du système capitaliste à permettre l’accès à l’emploi, à la santé, aux services de base de couches toujours plus larges de la population en dépit des possibilités économiques et des ressources de ces pays. A Madagascar, on compte 80 % des 32 millions d’habitants vivant sous le seuil de pauvreté établi par la Banque Mondiale, soit 2,80 euros par jour. L’interdiction du droit de revendiquer, de manifester et de s’exprimer tout simplement provoque le heurt entre la jeunesse et les appareils policiers. A en croire les nombreuses vidéos qui circulent, ces derniers ne peuvent à terme tenir le choc face à la profondeur du mécontentement. A moins de passer à l’étape du bain de sang de masse…. Ainsi à Madagascar, la décision samedi dernier d’une partie de l’armée, le CAPSAT, de se proclamer du côté de la population et de protéger les manifestants, doit être perçue sous deux angles. D’un côté, les jeunes soldats ne peuvent envisager de tirer sur leurs frères et sœurs, leur génération, ce qui pose une problématique de désobéissance et de rébellion de masse contre un pouvoir assassin. D’un autre côté, la hiérarchie militaire ne peut accepter que les forces de police et surtout de la gendarmerie, en pointe dans la répression, se retrouvent débordées et disloquées par la fureur populaire, et donc de se retrouver contrainte de prendre le relais pour un stade supérieur de répression. Au moment où nous écrivons ces lignes, nous ne savons pas grand-chose du parcours et du pedigree politiques des actuels chefs militaires mais nous ne doutons pas de leur sens des responsabilités quant à la préservation de l’État bourgeois, celle-ci impliquant peut-être de se débarrasser d’un président dont les frasques et le train de vie étalé se révèlent encombrants et incompatibles avec la survie du système. Du point de vue de ceux d’en bas, il est manifeste que toute avancée sociale exige de dégager les dictateurs et dirigeants parasitaires et de refonder un nouvel ordre politique et social répondant aux besoins du plus grand nombre à partir d’assemblées constituantes souveraines débarrassées de toute tutelle étatique pré-existante. Ce qui suppose de s’organiser à tous les échelons, de la base au sommet. OD, le 13/10/2025. PS Ce lundi, RFI nous apprend peu après 13H, qu’un avion militaire français a exfiltré le président Andry Rajoelina le 12 octobre tandis que d’autres voix des autorités françaises s’attachaient à démentir toute intention française d’intervenir militairement dans la crise malgache, inquiétude répandue sur l’île après certains propos du préfet de la Réunion… Que le Maroc et Madagascar se trouvent dans l’ancien pré carré colonial de la France ne doit rien au hasard. De même, des heurts ont éclaté ce week-end en Côte d’Ivoire où l’intention du président sortant Ouatarra de se représenter au prochain scrutin suscite une colère populaire. Il se pourrait que dans les prochaines heures, des troubles surgissent au Cameroun où le recordman de longévité des dictateurs d’Afrique, Paul Biya, 93 ans, postule à un huitième mandat ; ses opposants craignent une nouvelle tentative d’arrangement avec le résultat des urnes du scrutin du 12 octobre, hypothèse permise par la possibilité pour le Conseil constitutionnel de ne rendre les résultats que le 26 octobre. |
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