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La secrétaire générale, Sophie Binet, le 21 octobre 2025, communiquait une « Adresse aux syndicats CGT » 1 – Sa vision de la crise ? Citations :
Certes. Mais alors, si nous étions si forts sur les retraites, pourquoi n’avoir pas fini le job et mener le mouvement jusqu’au bout, c’est-à-dire l’abrogation ? Notre but, commun à des millions de salariés, ce n’est pas de faire « payer le prix fort du passage à la réforme », mais d’empêcher ce passage et revenir à 60 ans ! Voilà une bien drôle de formule, « faire payer au prix fort », car pour l’heure, c’est bien les salariés au bord de partir à la retraite qui paient ce prix qui, en effet, est « fort ». Et c’est bien la CFDT qui enclenche des négociations secrètes avec le MEDEF pour tenir des négociations de passage à la retraite par points, c’est-à-dire rompre avec la retraite sociale et solidaire. Et c’est encore l’unité qui paie le prix fort, puisque l’intersyndicale maintient les apparences mais elle a usé de son autorité pour siffler la fin du mouvement de rentrée afin de canaliser l’attention vers le spectacle parlementaire, dans lequel Marylise Léon joue un rôle d’importance avec le PS.
L’« entêtement » ? Nous aurions tendance à parler de position de classe, de celle qui conduit le patronat à mener ces vagues agressives de destruction des emplois ! À moins que ce ne soit une orientation de la classe des capitalistes, qui fait subir à l’emploi ce que lui commande la dictature du capital financier : le profit immédiat, les coups de Bourse – 15 milliards en une matinée pour Bernard Arnault – se détourne de l’investissement industriel. L’économie stagne comme jamais, et c’est bien pour ça : l’espérance de gains de productivité et les garanties et sauvegardes des profits à terme sont faibles, ce qui pousse le capitalisme au passage à l’acte, une phase de prédation des caisses sociales, une destruction de ce qu’on appelait naguère « l’État social », l’édifice des mesures obtenues par les salariés et retraités dans la période d’expansion d’après-guerre et de prospérité suivante. Un capitalisme dominé par sa financiarisation déclare la guerre sociale contre la rémunération du Travail, dont il doit obtenir une baisse durable au point de devenir négligeable, marginale, notamment par bâillonner les revendications. 2 – Où est passée la mobilisation des 10-18 septembre et 2 octobre ? Citations :
Donc, il « suspend »… Fort bien, mais pourquoi nous aussi avons suspendu le mouvement, mis en stand by ? S’agissait-il juste de focaliser la mobilisation et la canaliser vers le Parlement, de façon à en limiter les éclats, annoncés par la ressemblance affichée avec les Gilets Jaunes ? Un tel coup d’arrêt porté à une mobilisation naissante peut avoir plusieurs conséquences :
Et si cette mobilisation repart, autour du 15 novembre, c’est qu’il y a un besoin brûlant d’action pour se défendre, car chacun sent bien que le système bascule vers un régime autoritaire de guerre sociale.
Effet d’annonce ? Grosse manœuvre, oui, celle de la social-démocratie pour s’approprier le sujet « Retraites » et le réduire à un marchandage institutionnel de sommet, de façon à domestiquer le mouvement revendicatif et le réduire à un supplétif de couloir obscur entre deux chambres et deux cabinets. Le pouvoir, quoi…
Cet abandon de la mobilisation unitaire et sociale de rentrée offre l’opportunité au pouvoir finissant du macronisme tardif de manœuvrer pour faire passer les 64 ans et la suite, malgré leur absolue marginalisation dans l’opinion. Pas mal, et merci pour rien ! La mobilisation reviendra, c’est sûr. Mais l’autorité de la CGT et son expertise sociale sur les intérêts collectifs du Travail ? Troquées contre un embrayage automatique avec le Parlement… 3 – Un Patronat qui danse avec Bardella, simple diversion ? Citations :
Une « diversion », le plan B au Medef et à Le Pen ? La lucidité de Sophie Binet est-elle donc sans conséquence. Citations :
Heureuse formule, mais enfin, ne voit-on pas, dans cette lettre de Sophie Binet, derrière la dissolution qui vient, ou la toute proche échéance électorale, le spectre de l’arrivée au pouvoir de cette extrême droite banalisée ? Une extrême droite qui peut, de surcroît, bénéficier à la fois du soutien de la vieille droite en Titanic et d’un patronat qui s’est assuré du ralliement des fascistes 2.0 à l’esthétique du libéralisme autoritaire aux manettes de la Maison tellement Blanche.
Sécuriser l’organisation, oui, bien sûr et ça urge, mais surtout se mettre en dispositif de combat contre ce nouveau fascisme, dont la base reste cette croyance irrationnelle que « plumer les immigrés qui nous pillent » apportera la solution aux questions de l’accès au logement, à l’hôpital à l’école, à la vraie vie d’avant. Une telle vision du danger fasciste bien réel, exprimée par Sophie Binet, contredit frontalement la propension à user de la mobilisation comme d’un embrayage automatique : si l’alliance est bien passée entre le patronat, les milliardaires, l’extrême droite, l’heure n’est pas à retricoter des tactiques usées jusqu’à la corde, faire pression et dénoncer, manifester mais pas trop s’engager dans l’épreuve de force, non juste démontrer sa force potentielle pour ne pas avoir à s’en servir. Ainsi de la suite… 4 – Un budget juste passible d’une tactique de pression sur le Parlement ? Citations :
Comment ? A) Interpeller. citations
b. Vagues successives, l’une après l’autre… Citations
Citations
Citations « Notre objectif est d’engranger les bougés »« Bougés » ? Exemples – Citations :
Voilà pour les « bougés », chimères d’un glossaire de misère. Par glissements successifs, le mouvement social se voit assigner un rôle de supplétif par le secrétariat confédéral, propre à remplir le calendrier parlementaire, l’agrémenter de « démonstrations » de rue, colorées et en vagues dispersées, de façon que place soit faite au jeu institutionnel qui, manifestement, ne doit pas être gêné par en bas. Voilà, de façon implicite, une missive de rupture avec une orientation historique, celle qui trouve la CGT dans le camp du Front populaire, dans le Conseil national de la Résistance, dans la lutte programmatique contre le Capital du point de vue du Travail. Pourtant, le rôle défini pour la CGT par cette lettre est rien moins qu’ambigu : force de pression sur l’institution, agent d’entraînement d’action auto-limitées à la localité ou à la branche professionnelle, délégation de pouvoir au sommet ? Beaucoup sentent bien que l’action du moment bouillonne du côté des initiatives de rassemblement, de convergence, de montée à Paris, de coordination. Les militants CGT, tout en participant au rang des plus actifs à cette construction du 15 novembre, auront besoin qu’on leur explique les belles gravures de la camarade Sophie, qui préludent un si beau congrès confédéral, du 1er au 5 juin 2026 à Tours. Jean Gersin, le 27 octobre 2025. Document : la lettre de Sophie Binet du 21 octobre 2025 Les vidéos ne sont pas affichées dans cet e-mail et doivent être consultées sur le site. |
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