Un an après le lancement de la coalition pour une loi intégrale contre les violences sexuelles, nous nous félicitons que les pouvoirs publics cherchent enfin à s’emparer de façon globale de ce sujet majeur, qui exige une réponse politique à la hauteur des réalités vécues par les femmes et les enfants victimes.
En effet, depuis le début des luttes féministes contre les violences sexuelles et sexistes, depuis surtout le mouvement MeToo et l’explosion du nombre de plaintes en matière de violences sexuelles, aucune réponse politique globale n’a jamais été apportée à l’impunité qui persiste dans ce domaine, avec 94% de classements sans suite concernant les plaintes pour viol. L’Espagne l’a fait dès 2004.
Une loi globale accompagnée de moyens est donc effectivement nécessaire, mais son contenu doit être construit dans la concertation avec la société civile, porteuse d’une expertise majeure, et rassemblée dans une coalition historique constituée de plus de 130 organisations, rassemblées autour de 140 mesures. A ce jour, aucune information précise n’a été communiquée sur le contenu du texte, les mesures retenues, ni sur la méthode d’élaboration.
On peut légitimement regretter que la société civile, et en particulier les associations et organisations expertes à l’origine de notre proposition de loi-cadre, n’aient pas été associées plus étroitement à la rédaction de ce projet dont la presse se fait l’écho. Ceci suscite une légitime inquiétude.
Par ailleurs, nous nous étonnons que cette annonce se fasse sans mentionner en tant que telle la coalition parlementaire pour une loi intégrale contre les violences sexuelles. Nous nous étonnons aussi que le Rassemblement National ait été associé à la concertation de Mme Bergé, dans la mesure où cette formation politique a, à de multiples reprises, bafoué les droits des femmes et des enfants, nié les violences systémiques et instrumentalisé les victimes à des fins politiques. La lutte contre les violences sexuelles ne saurait souffrir d’aucune compromission avec celles et ceux qui en nient les causes structurelles.
La Coalition s’interroge par ailleurs sur la place réservée aux enfants dans le texte gouvernemental. Notre proposition de loi place les femmes et les enfants sur un pied d’égalité, reconnaissant la continuité des violences et la nécessité d’une protection intégrale. L’exclusion ou la marginalisation des enfants dans ce dispositif serait inacceptable.
Enfin, nous exprimons notre préoccupation face à l’absence de moyens financiers et humains annoncés. Aucune loi, aussi ambitieuse soit-elle sur le papier, ne pourra être efficace sans ressources supplémentaires (notamment pour les associations spécialisées) dédiées à la prévention, à la formation, à la prise en charge des victimes, au renforcement de la justice, à la prévention de la récidive. Pour rappel, nous chiffrons a minima à 344 millions le budget d’une politique publique ambitieuse sur les violences sexuelles, et à 2,6 milliards sur toutes les violences faites aux femmes.
Nous appelons donc le gouvernement à la transparence, à la concertation et à l’ambition réelle, pour faire de cette loi un véritable tournant historique dans la lutte contre les violences sexuelles faites aux femmes et aux enfants. La cause des femmes et des enfants ne doit plus jamais être sacrifiée sur l’autel des agendas politiques. Ils et elles méritent mieux que ça.
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