Le devoir – Fabien Deglis
Or, la chose n’a pas apaisé ses partisans, avides de voir les promesses du populiste se concrétiser pour faire toute la lumière sur le réseau de prostitution du financier déchu et sur les riches et influents qui en ont profité. Elle a plutôt amorcé l’écriture d’un nouveau chapitre sur la difficulté du président à éloigner de lui un fantôme gênant de son passé et à mettre fin à une interminable crise qu’il a lui-même créée.
Un supplice de la goutte nourri par des documents un peu trop caviardés, un peu trop de révélations insignifiantes, mais aussi par des informations (dont une photo du président) rendues publiques avant d’être remises dans l’ombre sans explication, puis d’être dévoilées de nouveau. Des gestes qui, loin de dissiper les doutes sur de possibles dissimulations, viennent surtout les maintenir bien en vie.
Tous ces faux-fuyants, toutes ces incohérences et hésitations risquent ainsi de fragiliser davantage une présidence qui se place régulièrement en contradiction avec ses grandes promesses et ses grands principes. L’indignation publique suscitée par la complicité passée entre Donald Trump et Jeffrey Epstein est donc loin d’être terminée.
Lundi, le chef de la minorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer, a soufflé sur les braises de l’insatisfaction en annonçant son intention de déposer une résolution appelant à poursuivre le gouvernement de Donald Trump pour le non-respect de sa propre loi. « La loi adoptée par le Congrès est on ne peut plus claire : publiez l’intégralité des dossiers Epstein afin que les Américains puissent connaître la vérité, a résumé l’élu par voie de communiqué. Au lieu de cela, le département de la Justice de Trump a expurgé des passages et dissimulé des preuves, ce qui constitue une violation de la loi. »
La veille, les élus à la Chambre des représentants, le démocrate de la Californie Ro Khan et le républicain du Kentucky Thomas Massie, associés depuis des mois à Washington pour forcer le dévoilement de tous les documents sur Epstein, ont indiqué sur les ondes du réseau CBS vouloir intenter des poursuites contre la procureure générale Pam Bondi pour « outrage au Congrès » après ce nouveau dévoilement chaotique d’informations détenues par le gouvernement sur le pédocriminel ami des riches et des puissants.
Espoirs déçus
Vendredi dernier en fin d’après-midi, à la veille du congé du temps des Fêtes et à l’expiration du délai imposé au gouvernement par une loi votée unanimement par les deux camps politiques au Congrès, le département de la Justice n’a amorcé qu’une publication partielle de nouveaux documents sur les affaires criminelles et sexuelles du financier.
Les espoirs d’ébranler l’élite américaine ayant gravité autour de Jeffrey Epstein et de son obsession pour le pouvoir, l’argent, l’influence et le corps des femmes — et des très jeunes — ont vite été déçus. Les révélations n’étaient pour la plupart pas nouvelles, et le contenu de plusieurs documents censés éclairer un réseau de crimes et nommer ses acteurs principaux était recouvert de bandes noires pour en dissimuler les détails sans doute les plus croustillants.
Pire, les documents les plus importants attendus, comme les entretiens menés par le FBI avec les principales victimes du financier, les notes internes du département de la Justice documentant la décision de le poursuivre en 2019 ou encore de l’autoriser à plaider coupable en 2008 d’une infraction mineure en matière de prostitution, de manière surprenante dans les circonstances, manquent toujours à l’appel.
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