On nous parle sans cesse de croissance.
Mais ici, la croissance ne nourrit pas : elle étouffe.
Elle repose sur l’importation massive, la grande distribution, la dépendance énergétique, le bétonnage des terres.
Elle enrichit quelques-uns, pendant que la majorité subit le chômage, la vie chère, la précarité et la perte de sens.
À La Réunion, la domination ne prend plus la forme d’une colonisation brutale.
Elle est devenue administrée, normalisée, présentée comme protectrice.
On consomme ce que l’on ne produit pas.
On dépend de décisions prises ailleurs.
On compense par des aides ce que l’on refuse de construire par le travail utile.
Résultat :
• une économie sans base productive
• une jeunesse sans horizon
• une colère diffuse, récupérée ou détournée
Quand on parle d’écologie ici, beaucoup entendent :
• des contraintes
• des interdictions
• des leçons venues d’en haut
Pourquoi ?
Parce que ceux qui subissent le plus la pollution, la vie chère, l’absence de transports et l’insécurité alimentaire
sont aussi ceux à qui on demande le plus d’efforts.
Or la vraie question est simple :
qui pollue ? qui décide ? qui profite ?
Il n’y a pas d’avenir insulaire sans rupture avec ce modèle.
Mais il n’y aura pas de rupture sans projet désirable.
L’utopie réunionnaise, ce n’est pas copier ailleurs.
Ce n’est pas gérer la pauvreté plus proprement.
Ce n’est pas demander aux plus précaires de se sacrifier.
Une voie :
• productive : créer des emplois utiles, locaux, non délocalisables
• écologique : produire près, préserver la terre, choisir la sobriété plutôt que la pénurie
• sociale : garantir la dignité par le travail, pas par la dépendance
• culturelle : valoriser la langue, la mémoire, les savoir-faire
• démocratique : redonner du pouvoir réel aux habitants
Sans production locale, il n’y a pas de dignité.
Sans dignité, il n’y a pas d’écologie partagée.
Sans écologie, il n’y a pas d’avenir à La Réunion.
À La Réunion, l’utopie n’est pas un luxe intellectuel.
C’est la condition pour respirer, travailler et vivre dignement sur notre propre terre.
Tout le reste n’est qu’une dépendance confortable pour quelques-uns
et une asphyxie silencieuse pour le plus grand nombre.
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