Total : plus d’un demi-siècle d’empoisonnement dans la zone industrielle de Lacq

[ad_1] 2021-02-09 00:46:15 Revolution Permanente

(DR/copie d’écran du documentaire Gaz de Lacq, le goût du soufre)

Désastre environnemental et scandale sanitaire

Les années 50 ont été pour les habitants de la région du Lacq un véritable tournant avec la découverte par la Société nationale du pétrole d’Aquitaine (ancêtre de Total) du principal gisement gazier de France dans les sous-sols béarnais. Dès lors l’activité de la zone s’est organisée autour de l’exploitation de ses ressources avec une vingtaine d’usines classés Seveso, et comme principal acteur la multinationale Total. Pour autant, si le bassin industriel de Lacq a longtemps été source de richesse pour la multinationale, elle est aussi la source d’un désastre sanitaire touchant fortement les habitants de la région. Exploiter des ressources comme le gaz et le soufre n’est pas sans risques et cela n’échappe pas à la connaissance de Total. Avec près de 140 substances identifiées par l’ARS rejetées dans l’air comme du dioxyde de soufre, du sulfure d’hydrogène des oxydes d’azote ou encore de l’acrylonitrile, une substance utilisée dans la confection de plastique et cancérogènes pour l’homme, les conséquences sont autant sur l’environnement que sur la santé des riverains.

Tournant à pleins régime durant toute la seconde moitié du dernier siècle, les conséquences se sont vites fait ressentir sur l’environnement comme le rapporte le Monde, où dès les années 60 les exploitations agricoles qui voyait leurs« récoltes brûlées par les émanations de soufre et de fluor », encore aujourd’hui dans plusieurs communes la consommation d’eau de la nappe alluviale du gave de Pau est interdite. Vivre dans la fumée et les odeurs nauséabondes est devenu une habitude pour les habitants des alentours des sites industriels pourvoyeurs d’environ 8 000 emplois. Malgré les risques bien connus, Total et ses entreprises sous-traitantes ont bien souvent fait preuve de négligences sanitaire grave et l’absence de normes environnementales durant un temps a permis de faire de la plate-forme du Lacq l’une des plus productive allant jusqu’à 33 millions de m3 de gaz par jour. Basta Mag rapporte : « Quand on avait de l’huile sur les mains, on les nettoyait avec du toluène [un solvant à base d’hydrocarbure très toxique pour l’être humain], se souvient Patrick Mauboulès, secrétaire CGT de la filiale de Total TEPF et membre de l’association environnementale Sepanso. En chargeant et déchargeant les wagons sur la plateforme de Lacq, il arrivait qu’on renverse des produits sur le sol. Des fois du styrène, des fois du benzène, ou des boues d’hydrocarbures… ». Plus tard les normes européennes n’ont pas empêché les excès de pollution et c’est ce que révèle par exemple en 2014 Sepanso au sujet de l’entreprise Arkema, ancien sous-traitant de Total qui rejeté depuis plusieurs années déjà ses effluents gazeux chargés en acrylonitrile à la torche (donc dans l’air) au lieu de les envoyer dans les incinérateurs comme l’oblige un arrêté préfectoral de 1997, et cela malgré plusieurs rappels à l’ordre. D’après Multinationales.org, cette même entreprise a rejeté pendant 6 ans d’énorme quantité de tétrachlorure de carbone, une substance cancérogène et détruisant la couche d’ozone, jusqu’à 118 tonnes en 2011 alors même que l’émission en Europe de cette substance est limité à 17 tonnes.

Alors que les habitants de la région ont pris l’habitude de toujours avoir un masque à cartouche en cas de fuite de gaz, l’expulsion de ces particules fines ne sont pas sans conséquences sur la santé des habitants de la région où migraine, vomissements, toux, démangeaisons, plaques sur la peau ou encore évanouissement font partie du quotidien. Comme le raconte Xavier Hache, fils d’ouvrier et habitant du Bassin pour Basta Mag, bien plus que les odeurs, ce sont les « effets physiologiques » qui sont le plus gênants. « C’est ma fille de trois ans et demi qui ressent en premier les maux de tête ». Bien plus que de simples symptômes, une étude inquiétante a été cachée durant 14 ans. Datant de 2002 et effectuée par l’Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement (ISPED) de l’Université de Bordeaux, révèle une anormale surmortalité autour des sites industriels. Ainsi entre 1968 et 1998, les individus de moins de 65 ans présentaient une surmortalité de 14% dans les zones les plus proches des sites industriels. Pour citer Sepanso qui a révélé cette étude : « la dernière décennie de la période étudiée se caractérise par une augmentation des cancers de l’appareil respiratoire de 34 % chez les moins de 65 ans par rapport à la zone non exposée n°2. » L’étude ISPED souligne « il semble apparaître une tendance plus marquée de surmortalité dans la période la plus récente. Ainsi un excès de surmortalité de 56% significatif est noté au-delà de 1990 dans la zone exposée par rapport à la zone non exposée n°2 ». Le Monde rapporte :”Des collègues et des voisins morts de cancers, Gilles Cassou en recense une dizaine . « Un oncle qui travaillait sur le site est parti en cinq jours d’une leucémie foudroyante », se souvient-il.”

Alors même que la pollution fait des ravages sur les travailleurs et les familles aux alentours de la zone industrielle de Lacq, l’étude est restée secrète à la population mettant directement en cause la responsabilité des autorités publiques et des entreprises comme Total qui ont tout fait pour l’étouffer. Tout a été fait pour éviter qu’une nouvelle étude puisse confirmer la sur-mortalité présente autour de Lacq, au contraire un silence scandaleux a régné, avec parfois certains arguments qui en disent long : « le lancement d’une étude fait courir le risque, dès lors, de briser la paix sociale », voici ce que déclarait en 2009 un représentant de l’ARS devant le Haut comité de la Santé Publique d’après Sepanso. Durant près de 60 ans, Total et les groupes rattachés ont extrait le gaz naturel des sous-sol béarnais jusqu’à leur épuisement sans soucier des conséquences désastreuses de la pollution qui s’en dégage allant jusqu’à un véritable empoisonnement. Encore aujourd’hui, les effets du cocktail des différentes substances restent inconnus.

La diminution des activités au début des années 2010 a été loin de rimer avec la diminution de la pollution. Au contraire, comme le rapporte Basta Maga, Total et ses sous-traitants ont continué d’exposer la population et les ouvriers à des produits toxiques en toute connaissance de cause. Les travaux de dépollution des sols qu’a entamé Total au début des années 2010 avant son départ pour désengorger la terre des métaux lourds et de produits toxiques ont pour le plus souvent été faits en toute négligence des risques. L’affaire de Thibaut Moncade, ancien ouvrier de l’entreprise Marsol un sous-traitant de Total pour la dépollution des sols révèle les conditions de travail tout à fait irresponsables et dangereuses auxquelles les ouvriers étaient exposés. « La filiale de Total est responsable de la sécurité sur le chantier et doit s’assurer que les équipements de protection étaient portés par les sous-traitants. « Ils ont le pouvoir et l’obligation d’arrêter les travaux dès lorsqu’ils constatent que les mesures de prévention ne sont pas respectées », déclare Gérald Le Corre, inspecteur du travail et syndicaliste. Or sur le chantier en question, le niveau de protection des salariés semble dépendre de la bonne volonté de chaque entreprise sous-traitante. » Vêtu simplement d’un bleu de travail et d’un casque pour les protéger, les ouvriers se retrouvent confrontés aux sols chargés de métaux lourds, cancérigènes et mutagènes sans en avoir connaissance et alors même que cela suppose des équipements de protection conséquents. Vertige, haut le cœur ou encore évanouissement ont accompagné les ouvriers durant les travaux.

Partie du plan de prévention du chantier sur les risques du site de Lacq délibérément caché aux ouvriers, équipements insuffisants, suivi médicale bafoué ou encore le droit d’avoir la fiche d’exposition refusée, autant de négligence aux conséquences graves dont Total et ses sous-traitants ne se soucient peu. Il apparaît clairement que Total et ses entreprises sous-traitantes exposent en toute connaissance de cause les ouvriers à des produits toxiques. Plus de 60 ans de pollution et d’empoisonnement qui, bien au contraire de l’image verte que Total tente d’afficher, est bien loin de s’arrêter.

Un green washing nauséabond

L’image verte que veut se donner Total dans la région avec le projet de conversion des friches industrielles vers les énergies renouvelables et des projets à l’international est tout à fait nauséabonde à l’image des conséquences dramatiques des exploitations du géant pétrolier.
Après avoir empoisonné des milliers de vies, Total tente de cacher ses responsabilités et justifie les licenciements sous un prétexte de transition écologique, comme c’est le cas aujourd’hui à la raffinerie de Grandpuits. Dans le même temps qu’il justifie la casse sociale par la reconversion verte, la 14è entreprise la plus polluante de la planète d’après The Guardian, délocalise ses activités de raffinages en Uganda dans un parc naturel avec le plus grand pipeline chauffé jamais construit (1445 km), où comme au Mali et au Mozambique, le pillage, l’expulsion des populations locales et la destructions de l’environnement sont à l’ordre du jours. Total n’arrête en rien ses activités polluantes, ils les délocalisent dans des zones de la planète où les normes environnementales et le droit du travail, sont moindres afin de maximiser ses profits.

Total représente depuis ses débuts un véritable désastre pour l’environnement, et la vie des travailleurs et leurs familles, l’empoisonnement du bassin de Lacq en est la preuve. Ainsi au même titre que nous ne pouvons pas faire confiance à Total pour la gestion des risques sanitaires de la production industrielle, nous ne pouvons pas faire confiance à Total pour la transition écologique. Alors que la multinationale veut d’opposer écologie et travailleurs, la lutte des raffineurs de Grandpuits au côté des organisations écologistes pour la défense de leur emploi et contre le géant pétrolier démontre que le combat de la fin du mois et celui de la fin du monde sont étroitement liés.

Comme le note Adrien Cornet délégué syndicale CGT de la raffinerie Grandpuits dans l’émission de QG : « C’est ce que je dis aux écolos quand ils me demandent : « Ton discours Adrien, est-ce que c’est celui de tous les travailleurs de Grandpuits ? » Et je leur dis que non, effectivement. Les travailleurs de Grandpuits dans leur ensemble ils sont inquiets de la fin du mois, ils veulent savoir comment ils vont manger demain. Mais une fois que cette question est résolue, alors on peut parler d’environnement. Et quand on parle d’environnement on dit que nous, travailleurs ouvriers, on a la priorité de l’environnement parce qu’on se baigne dans les rivières à côté de Grandpuits, on pousse nos enfants dans les balançoires et on a des jardins à côté de Grandpuits… Et si on avait le contrôle de l’outil de travail on pourrait arrêter la raffinerie quand on a des dépassements sur les rejets air et les rejets eau. Ce que ne fait pas la direction de Total parce qu’ils ne veulent pas arrêter la machine à profit. » Ainsi, les raffineurs le prouvent, s’il y a bien des personnes capables de décider des conditions de travails et de la transition écologique pour l’intérêt de la majorité, c’est bien les travailleurs eux-mêmes, au contraire des capitalistes comme Total qui ne cherche qu’à faire toujours plus de profit au détriment des vies.

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