Vaches « à hublot » : L214 publie une nouvelle vidéo choc, le gouvernement défend ces expérimentations « choquantes » mais « utiles »
Avant de regarder ces images, il vaut mieux avoir l’estomac bien accroché. L’association de défense des animaux L214 met en ligne ce jeudi 20 juin une vidéo pour dénoncer les conditions de vie des animaux dans la ferme expérimentale de Sourches, à Saint-Symphorien, dans la Sarthe. Cet élevage appartient à l’entreprise Sanders, leader français de la nutrition animale et filiale du groupe agro-industriel Avril qui produit 25% des œufs consommés en France, un cochon sur huit et un lapin sur quatre qui finissent dans les assiettes, selon le rapport de L214. C’est sur ce site, bâti en 1958, qu’elle teste ses produits.
L’enquête, réalisée entre février et mai dernier, épingle l’utilisation de « hublots » implantés dans le ventre des vaches pour permettre un accès direct à leur estomac. La « fistulation », le nom de ce procédé inventé au XIXe siècle, permet grâce à des ouvertures de 15 à 20 centimètres de diamètre d’accéder au rumen, l’un des quatre estomacs de l’animal, pour étudier sa digestion. L’objectif de cette démarche est simple : « optimiser la performance et la productivité » des animaux.
« Considéré comme indolore pour l’animal »
Sur les images glaçantes filmées en caméra cachée, et commentées par l’animateur Nagui, végétarien assumé, on y voit des opérateurs en blouses introduire leur mains à l’intérieur de l’estomac de plusieurs « vaches cobayes ». « En période d’expérimentation, on peut ouvrir et refermer leur hublot 6 fois en l’espace de 48 heures pour y faire des prélèvements. Sans compter la pose même du hublot, une opération invasive qui génère des douleurs postopératoires et nécessite une prise de médicaments durant plusieurs jours – des antibiotiques durant deux semaines selon un opérateur du centre », écrit l’ONG.
Dans Le Parisien, le porte-parole du groupe Avril assure que cette technique « s’accompagne d’un suivi vétérinaire rigoureux et est considéré comme indolore pour l’animal » et précise que la ferme de Sourches ne compte que six vaches « fistulées ». L’industriel argue que cela a déjà permis « de réduire l’usage d’antibiotiques en élevage et de réduire les émissions de nitrates et de méthane (gaz à effet de serre) liées à l’élevage. » Une défense qui ne convainc pas Sébastien Arsac, cofondateur de L214 : « L’argument est cocasse. (…) Ces recherches ont aussi des conséquences sur l’ensemble des animaux d’élevage qui se verront appliquer le même régime alimentaire, à l’origine de nombreux problèmes de santé. Quel est le sens de cette course ? »
EN VIDÉO
Vaches à hublot : la réaction de leur vétérinaire
https://www.lci.fr/population/video-l214-l-horreur-des-vaches-a-hublot-a-sourches-commentees-par-nagui-brune-poirson-choquant-mais-utile-2124660.html
« Profondément choqué », Nagui appelle à « mettre un terme à cette course à la performance qui se fait au détriment de la santé des animaux et de notre santé. Exigeons l’arrêt de ces expériences ». « Pour Sanders et pour l’élevage intensif (…) aujourd’hui les animaux ne sont que des machines à produire, une simple matière première à notre disposition », dénonce l’animateur qui, pour étayer son propos, explique qu’en moyenne une vache laitière produit cinq fois plus que les besoins naturels d’un veau.
Parallèlement, l’ONG a décidé de porter plainte auprès du procureur de la République du Mans contre le centre de Sourches pour « expérimentations en dehors des objectifs définis par la loi et sévices graves sur les animaux ». L214 a aussi posté une pétition « pour l’interdiction de ces expérimentations zootechniques ». Plus de 100.000 personnes avaient déjà signé jeudi à 15h.
« Choquant » mais « utile » pour Brune Poirson
Au plus haut sommet de l’Etat, cette vidéo a fait réagir les ministres du gouvernement. « C’est choquant », mais « ce sont des pratiques scientifiques et qui ne font pas souffrir l’animal. On en est sûr car on sait mesurer le stress chez les animaux », a assuré Mme Poirson, invitée sur la chaîne Public Sénat. « C’est utile, parce que nous avons besoin de la science » a-t-elle insisté, tout en estimant qu’il faudrait « mieux encadrer ces pratiques là » et développer des alternatives.
« L’Inra (l’Institut national de la recherche agronomique, NDLR) y travaille déjà (…) et j’espère qu’il pourra rendre des conclusions avant 2025 », a-t-elle ajouté. « Mais c’est toujours un équilibre qui est compliqué, difficile, parce que nous avons besoin de la science sur beaucoup d’aspects, y compris parfois paradoxalement pour développer des médicaments qui peuvent être bénéfiques pour les animaux », selon Mme Poirson.
Poster un Commentaire