« J’ai été strangulé jusqu’à l’étouffement par la BAC »

« J’ai été strangulé jusqu’à l’étouffement par la BAC », dénonce l’homme pris en photo au sol à Nantes

Bruno Kaïk raconte son interpellation musclée en marge d’un rassemblement à Nantes contre les violences policières après la mort de Steve Caniço à CheckNews. Une version contestée par la police.

Par L’Obs

« Que s’est-il passé à Nantes, le 3 août, en marge de la manifestation contre les violences policières après la mort de Steve Caniço ? », interroge CheckNews de « Libération » qui revient sur la polémique autour d’une photo, authentifiée ce lundi par le site, et sur laquelle on peut voir un homme « plaqué au sol par un policier masqué, cagoulé et armé, sa main serrée autour de l’homme à terre ».

Photo prise à Nantes samedi 3 août 2019.

Le journal a retrouvé l’homme en question : Bruno Kaïk, 51 ans, résident à La Rochelle et traducteur interprète en langue anglaise. S’il était à Nantes ce jour-là, c’était pour accompagner son fils qui avait un rendez-vous dans la région, raconte-t-il. Il témoigne auprès de nos confrères ce mercredi 7 août :

« On en a profité pour aller manger une crêpe à Pornic. On a commencé à parler de Steve, dont le corps venait d’être retrouvé. Il m’a dit qu’il y avait une marche blanche en sa mémoire. Je lui ai répondu qu’il fallait y aller, que ça nous permettra de faire partie des voix qui s’élèvent. En arrivant, on s’est aperçus que ce n’était pas une marche blanche, mais noire. Et là, tout s’est enchaîné. »

« Complètement disproportionnée »

L’homme affirme à « Libération » avoir ensuite été étranglé par un policier jusqu’à en perdre connaissance, et non simplement incommodé par les gaz lacrymogènes, comme l’assure de son côté la police.

« Après cette interpellation violente, il a été conduit à l’hôpital, où il est resté plusieurs heures, avant d’être placé en garde à vue pendant vingt-quatre heures. Il a depuis été relâché, tandis que l’enquête se poursuit en préliminaire », précise CheckNews.

Auprès de CheckNews, le Service d’information et de communication de la police (Sicop) s’était ainsi justifié :

« Cet homme a été interpellé car, quelques minutes avant – ce que l’on ne voit pas sur la vidéo [disponible ci-dessous, NDLR] – il avait jeté une bouteille en verre contre un policier. Lors de son interpellation, l’homme ne s’est pas laissé faire, et a tenté de frapper le policier à plusieurs reprises au niveau du visage (ce qu’on ne voit pas distinctement sur les images). »« Le collègue a fait comme il a pu. L’objectif, c’était d’essayer de le maintenir, le temps de le menotter », justifie le Sicop.Bruno Kaïk reconnaît son geste, mais précise, toujours au site internet :

« J’ai jeté cette bouteille en verre vide, alors que j’étais à une trentaine de mètres des policiers, dans leur direction. Effectivement, elle a éclaté devant les policiers, à quelques mètres d’eux, mais c’était plus symbolique qu’autre chose. Il n’y avait aucune intention de blesser. Dans tous les cas, leur réaction a été complètement disproportionnée. »« A-t-il porté des coups au visage du policier pendant l’interpellation, comme l’affirme également le Sicop ? », interroge encore « Libération ». Réponse de Bruno Kaïk :

« Dans la folie de l’instant, c’est difficile à dire. Mais je ne crois pas. »Les images de cette arrestation (à partir d′1 minute et 12 secondes), filmée par le street-reporter Mezone, ne permettent pas de le dire.

Le street-reporter expliquait lundi à « Libération » : « La personne au sol sur la photo s’est avancée vers la BAC pour leur dire qu’un homme était à terre, juste un peu plus loin, pour leur demander de se calmer. C’est là que l’agent de la BAC lui saute dessus et le met au sol. »

« Il n’avait rien fait avant. Il était juste allé leur dire qu’il y avait quelqu’un au sol, non loin de là, sous une couverture de survie. »

« J’ai reçu d’autres coups »

Le Sicop avait assuré lundi à CheckNews toujours que l’homme avait été transporté à l’hôpital suite à l’interpellation « parce qu’il était incommodé par les gaz lacrymogènes ». Cette fois, Bruno Kaïk dément :

« A l’abri des camions, où j’ai été traîné ensuite, j’ai reçu d’autres coups. J’ai été violemment strangulé jusqu’à l’étouffement par un membre de la BAC. Avant de m’évanouir et de rester inconscient pendant plusieurs minutes. »Sur plusieurs vidéos publiées sur Twitter, on reconnaît cet homme avachi au pied d’un camion de police, visiblement au bord du malaise.

Le rapport d’observation médicale, remis à Bruno Kaïk et consulté par CheckNews mentionne que l’homme a été retrouvé « inconscient sur la voie publique » et « amené par les pompiers en urgence ». « Le rapport mentionne aussi l’absence de “prise de toxiques”, qui auraient pu être à l’origine d’une perte de conscience », précise CheckNews.

Bruno Kaïk l’assure : « Ce qui a conduit à mon inconscience, ce sont bel et bien les maltraitances policières. » Il entend donc porter plainte contre « toute la chaîne de commandement, de l’officier de la BAC jusqu’au président de la République, qui est le chef des armées et a autorisé ces dérives », poursuit l’homme auprès de « Libération ».

« Je me présenterai devant eux avec toutes les pièces en main, avec mon avocat, pour porter l’affaire devant les tribunaux afin que tous ces gens qui violentent le peuple assument leur responsabilité. »

L'Obs

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