Lettre ouverte à Monsieur le Président de la République

©Thomas Padilla/MAXPPP - 25/04/2019 ; Paris, FRANCE ; CONFERENCE DE PRESSE DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE EMMANUEL MACRON AU PALAIS DE L' ELYSEE. (MaxPPP TagID: maxnewsworldfour808966.jpg) [Photo via MaxPPP]

Florian Gonzalez

LETTRE OUVERTE A MONSIEUR LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

Nous sommes le mardi 30 juillet 2019. Il est 1 heure du matin.
J’ai appris il y a quelques heures la découverte du corps de Steve dans la Loire et depuis je n’arrive pas à trouver le sommeil… Sûrement la mort de trop. Mon insomnie sera mise à profit pour vous écrire ces quelques lignes.

J’imagine que vous n’avez pas de problème de sommeil vous. Vous êtes comme ces mannequins de papier glacé qui trônent dans les catalogues publicitaires. Vous êtes imperturbable et impassible. D’affect et de compassion, vous n’en avez pas. Vous n’aurez sûrement pas plus de mots pour la famille de Steve que vous n’en avez eu pour la famille de Zineb. Vous n’aimez pas parler aux gens. Vous ne savez pas leur parler. Vos mots sont creux, tristement et terriblement creux.

Creux comme la pierre qui vous sert de cœur, creux comme la coquille qui abrite votre cerveau, creux enfin comme votre image marketing de 2017.

C’était il y a 2 ans déjà. Votre image de jeune premier au sourire impeccable, au brushing parfait, mais aux idées creuses, s’est petit à petit fissurée pour laisser la place à celle d’un président autoritaire qui n’a plus d’autre choix désormais, une fois l’effet de séduction de pacotille évaporé, que d’imposer sa politique par la force.

Car on en est là aujourd’hui Monsieur le Président. Vous n’imposez votre politique et votre vision du monde que grâce à la force publique qui vous accorde encore le peu de crédit qu’il vous reste. En 2017 vous incarniez un soi-disant renouveau politique. 2 ans plus tard, vous incarnez un état policier qui bascule dans le totalitarisme.
Depuis les dorures de votre palais élyséen ou du haut de votre fort varois, je vous imagine vous indigner à la lecture de ces dernières lignes. « Le totalitarisme est aux antipodes du pays des Droits de l’Homme !

Ne sont totalitaires que les régimes dictatoriaux tels que ceux en place au Venezuela, en Corée du Nord, voire en Russie ! »

Visiblement, la remise en question et l’autocritique ne font pas non plus partie de vos traits de caractère. Et pourtant…

Comment appelleriez-vous un gouvernement qui réprime un mouvement social par la force ? Doit-on vous énumérer les prénoms de toutes celles et de tous ceux qui ont perdu un œil ou une main ces derniers mois ? Comment qualifieriez-vous un gouvernement qui enferme préventivement ses opposants politiques, qui gaze des manifestants écologistes pacifistes, qui humilie des lycéens en les faisant s’agenouiller avec les mains derrière la tête, qui porte de graves atteintes à la liberté de la presse ?

Comme le dialogue vous est étranger, il ne vous reste plus que la force pour vous imposer. Un mouvement social contestataire ? Envoyons les forces de l’ordre ! Des lanceurs d’alerte écologistes ?

Envoyons les forces de l’ordre ! Des journalistes un peu trop zélés et trop peu soumis à la propagande gouvernementale ? Envoyons les forces de l’ordre ! Même la fête n’est pas épargnée par votre sinistre état policier. Un 21 juin un peu trop bruyant : envoyons les forces de l’ordre ! Vous irez l’expliquer à la famille de Steve si toutefois (et pour une fois) vos cordes vocales vous permettent enfin de sortir quelques mots un peu moins creux…

Il est maintenant près de 3 heures du matin. Je n’ai toujours pas sommeil, mais je m’apprête quand même à vous laisser. En repensant à Steve, à Zineb, et à tous les autres, il est fort possible que je tourne encore un long moment dans mon lit. Mais mon insomnie n’est qu’accessoire. Elle est sans commune mesure avec celle provoquée par la perte d’un être cher. Elle n’est rien à côté des nuits blanches dont souffrent vos concitoyens meurtris par votre politique répressive. Certes…

Mais mon insomnie porte en elle le souffle de l’indignation qui s’élève désormais aux 4 coins de notre pays.

Je rêve d’un jour où ce souffle vous fera vaciller, où ce souffle vous emportera.

En attendant que ce jour arrive, je m’en vais essayer de retrouver un peu de quiétude nocturne, quelques petites heures d’apaisement et de repos au milieu de cette actualité angoissante.

Dans quelques heures, un nouveau jour se lèvera sur la France. On peut toujours en espérer de plus beaux que les précédents pour notre pays. On peut peut-être enfermer des opposants, mais leurs idées elles continueront à voyager et à se propager…

Monsieur le Président, au nom de Zineb, de Steve et de tous les autres, au nom de toutes celles et de tous ceux qui se reconnaîtront dans cette lettre et qui forment le socle de la contestation et de l’opposition à votre cynique et sinistre politique, je ne vous salue pas.

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