Appel de « Luttes Invisibles » à la riposte sur Facebook et dans la rue ! 3 septembre 2019

La censure sur Facebook est le prolongement de la politique policière et anti-sociale de Macron.

Par Jacques Chastaing

Beaucoup de pages sur Facebook ont été « déférencées » ces derniers temps. Facebook a supprimé brutalement leur audience, les rendant quasi invisibles.

C’est la troisième fois en quelques mois pour la page Luttes Invisibles mais c’est aussi aujourd’hui le cas pour d’autres pages d’extrême gauche, radicales, contestataires ou très souvent, Gilets Jaunes. Dans cette longue liste qui s’allonge tous les jours, on trouve : « Gilets Jaunes 92 », « Bretagne Noire », « Liberté j’écris ton nom », « No Pasaran », « Femmes Gilets Jaunes Ile de France », « Cerveaux Non Disponibles », « Lille insurgée », »Nantes révoltée », « Le peuple uni », « Collectif auto-média énervé Toulouse », « Paris-Luttes Infos », « Humanité tout simplement » et des pages individuelles ou des pages qui chassent les rumeurs d’extrême droite comme « Debunkers des rumeurs/hoax d’extrême droite »… et certainement bien d’autres encore. Cela alors que Facebook ne censure pas ou très peu les pages d’extrême droite, racistes, antisémites, xénophobes ou tout simplement fascistes.
Il est très probable au moment où le pouvoir réprime violemment les Gilets Jaunes mais où malgré cela, il n’arrive pas à faire taire les résistances – bien au contraire – qu’il ait décidé de restreindre considérablement l’espace de liberté qu’est internet, notamment en prévision des mois à venir et particulièrement septembre qui pourraient bien être très chaud.

Beaucoup de pages FB écrivent qu’elles ont été déférencées à cause du G7 ou parce qu’elles ont publié tel ou tel post qui n’a pas plu, jugé « non conforme aux standards de FB », etc, etc… sous entendant par là que peut-être cette censure va s’arrêter ou qu’elles pourront y échapper. Il ne s’agit à l’évidence pas de ça – sinon conjoncturellement – mais bien plus probablement d’une politique globale du gouvernement français face à la contestation sociale qu’il n’arrive pas à arrêter. C’est pourquoi la France devient le premier pays occidental pour la répression policière, les limites à la liberté d’expression et maintenant la censure sur internet.

Il s’agit d’un problème de démocratie générale lié aux attaques sociales.

Il faut en effet associer cette censure FB et maintenant semble-t-il Twitter, aux violences policières, judiciaires, aux censures de la presse, aux attaques contre les journalistes, la liberté d’expression et toutes les libertés en général. Cela s’explique d’autant que de plus en plus de gens faisant moins confiance aux « grands » journaux, vont de plus en plus chercher leurs infos sur les réseaux sociaux. Ainsi, en quelques années, la population qui cherchait ses informations à 80% dans les grands médias la cherche aujourd’hui à égalité -50% – dans les grands médias et les réseaux sociaux et bien évidemment dans une proportion bien plus importante chez les jeunes.

Cela pose de gros problèmes à Macron qui a mis la main sur la grande presse avec ses amis milliardaires mais qui, de ce fait, par son alignement bêlant sur le pouvoir, perd toute crédibilité auprès du grand nombre.

Or il n’y a pas que la presse, c’est tout l’appareil d’autorité du pouvoir qui s’effrite ; sa police est détestée, sa justice méprisée, ses journaux ne sont plus lus et sa parole fait rire, les ministres assimilés au mieux à des incompétents mais leplus souvent à des clowns ou des menteurs.

Or ce qui est plus grave pour l’ordre établi, c’est que cette évolution sur le terrain démocratique se fait aussi et déjà sur une perte d’influence de l’idéologie patronale sur le terrain social.

Jusqu’il y a peu, cette autorité idéologique reposait sur trois choses, la peur de la crise, l’efficacité du supposée du dialogue social, la prétendue supériorité du privé sur le public. Or avant déjà les Gilets Jaunes, la peur suscitée par la crise relayée pendant des décennies par tous les médias qui faisait courber le dos face à des licenciement de masse a disparu : tout le monde voyant bien que les profits des grandes entreprises explosent, que les dividendes donnés aux actionnaires montent de manière exponentielle, que les PDG s’offrent des salaires mirobolants et que tout ce petit monde planque son argent parmilliards dans les paradis fiscaux. Exit la peur de la crise qui n’est pas pour tout le monde et qui apparaît comme un masqueservant à faire passer une exploitation accrue du grand nombre au profit d’une minorité.

De la même manière la prétendue supériorité du privé sur le public qui a gangrené les esprits depuis les années 1980 est apparue de plus en plus comme le masque de l’égoïsme patronal combattant toutes les solidarités contre les plus fragiles,les seniors, les handicapés, les femmes, les jeunes, les chômeurs, les migrants… solidarités qui se maintiennent encore même de manière déformée dans les services publics et surtout l’esprit de service public de la majorité de ses agents. La défense grandissante par les salariés et les usagers des hôpitaux de proximité, des maternités, des services d’urgence, des écoles, des gares, de l’université, de tous les services publics et le constat de l’horreur pour les résidents et les salariés de la vie dans les ehpad privatisés a eu raison de ce mythe de la supériorité du privé.

Le prétendu dialogue social entre patronat, gouvernement et syndicats a fait long feu au fur et à mesure que le pouvoir détruisait tous les acquis sociaux et démocratiques et ne faisait aucune concession à des directions syndicales qui toutesparaissent de plus en plus non pas seulement incompétentes mais complices du pouvoir pour organiser le recul dans ce fameux « dialogue social » qui ne sert qu’à tenter de paralyser les salariés.

On imagine facilement avec tout cela que le pouvoir macronien se devait de réagir en diminuant les espaces de liberté sur internet comme autant de bases aidant aux résistances d’autant qu’il n’arrive pas à stopper ces résistances dans la rue, lesGilets Jaunes en premier lieu mais aussi les mille et une résistances sociales chez les hospitaliers, les pompiers, lesenseignants, les agents des impôts, les électriciens, les cheminots, les retraités mais encore chez les jeunes qui se battentpour le climat ou les femmes.

Les rencontres de Macron avec Zucherberg, la loi Avia contre la « haine », la collaboration de 8 grands médias avec FB pour chasser les fake news, tout cela fait partie d’un ensemble pour contrôler un peu plus internet et compléter la politique de destruction des acquis sociaux et démocratiques par le pouvoir. Cette censure ne s’arrêtera pas et ne peut que s’amplifier en proportion des résistances populaires dans la période à venir.

Septembre et les mois qui suivent annonçant des mobilisations toujours plus importantes ne peuvent que connaître uneamplification de ces censures tandis que l’extrême droite pourra elle continuer à propager sa haine raciste sur les réseaux sociaux de la même manière qu’on peut facilement imaginer les puissants chercher à financer des embryons de milices d’abord contre les migrants puis contre toutes les liberté et tous les exploités.

A mon sens, la question qui se pose alors maintenant à nous toutes et tous, pages et comptes censurés, est donc de savoir si comme pour le « tous ensemble » dans les luttes sociales on arrive à créer un « tous ensemble » des pages et comptes censurés ou si chacun cherchera à seulement sauver sa peau dans son coin ou dans un regroupement limité par affinitéspolitiques.

C’est dans le sens d’un « tous ensemble » sur Facebook et Twitter que Luttes Invisibles lance un appel à construire une riposte commune dans la rue et sur les réseaux.

Jacques Chastaing, pour la page Luttes Invisibles, le 3.09.2019

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