C’est vrai, nous ne sommes pas dans le même camp

Le camp du Préfet de Paris opposé à une interpellante Gilet Jaune…

Mauvaise pioche, Monsieur le Préfet sorti de votre centre opérationnel antiGilets Jaunes. La rue n’est décidément pas votre truc, en dehors du matraquage ou gazage et plus des gens qui y usent de leur droit de manifester. Qui voudraient pouvoir en user car pour ce qui est des droits démocratiques vous, Lallement, dévoilez que l’Etat ment !

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On criera à l’exagération : ne franchissons pas le Rubi-con, Lallement n’est pas l’Allemand (perso la dramaturgie antiboche ne me semble pas, comme les opérations femmes tondues à la Libération, ce que l’épopée de la Résistance a produit de plus politiquement mobilisable, euphémisme, aujourd’hui). Et ce ne sera que justice : il y a de l’exagération à éborgner les gens, à les gazer, à les matraquer et à les envoyer se faire condamner à de la prison. De l’exagération aussi à ne pas respecter le droit de manifester comme aussi à ne plus être dans sa fonction « hors camp » quand on exerce une fonction d’Etat… A moins que… A moins que précisément se dévoile ce qui ne devrait pas l’être : l’Etat serait celui d’un camp contre un autre. Sur le mode « dimension/fonction de classe » de l’Etat ? Lallement qui met au goût du jour Marx et Proudhon ? Intolérable ! Démission !

Crédit Photo: DR.

« Nous ne sommes pas dans le même camp, madame » : c’est ce que le préfet de police de Paris Didier Lallement a cru bon de répondre à une dame qui l’interpellait dimanche dernier sur la place d’Italie où il avait cru bon de se rendre. Cette réplique a déchainé une certaine indignation devant la rupture évidente de la neutralité en principe exigée des fonctionnaires.

Pour notre part, cette réflexion est avant tout un révélateur : les préfets sont au service du gouvernement et, au-delà de la classe sociale qui tient les manettes. L’État n’est pas neutre et ne l’a jamais été, a fortiori dans les situations de crise.

La liste est longue des préfets de Paris et d’ailleurs qui ont réprimé grèves et manifestations. Dans les années 1920-1930, le préfet de police Chiappe se déchaîne face aux manifestations, notamment communistes. En mars 1937, à Clichy, la police ouvre le feu contre des manifestants socialistes et communistes : six morts et 300 blessés. Le 14 juillet 1953, la CGT organise une manifestation de République à Nation. Elle est très encadrée : les pancartes ou drapeaux et banderoles « injurieuses » ont été interdites par la préfecture de police, ainsi que les chants et cris « séditieux ». À la fin, la police tire : 7 morts (dont 6 Algériens). Et l’on n’oublie pas qu’a été récemment célébré le souvenir du 17 octobre 1961 où la police du préfet Papon tua des centaines de manifestants algériens. Charonne, Mai 68, mort de Malik Oussekine en 1986 : l’énumération exhaustive serait longue. Ceci sans parler de l’utilisation de la police contre les piquets de grève et pour l’évacuation des usines en grève…

La répression policière, un temps plus feutrée, a connu un regain de violence depuis la première loi « travail » sous Hollande. Il en est depuis résulté des dizaines de blesséEs et mutiléEs. De droit reconnu par la Constitution, la manifestation est devenue une tolérance soumise au bon vouloir gouvernemental et préfectoral. Le 16 novembre, le préfet Lallement a interdit au dernier moment une manifestation déjà rassemblée place d’Italie. Pendant de longues heures, il a été impossible à celles et ceux qui le voulaient de quitter la place, tandis que se multipliaient les jets de lacrymos et les charges.

Alors oui, le préfet est dans un camp, les Gilets jaunes et les mouvements de contestation de la politique de Macron dans un autre. D’un côté, le camp du pouvoir et du capital. De l’autre, le camp de celles et ceux qui voudraient que s’arrête la destruction sociale, qui rêvent, de celles et ceux qui se mobilisent pour un autre monde.

Henri Wilno

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