Ils n’ont pas entendu Cédric Chouviat crier « j’étouffe » à sept reprises. C’est ce qu’ont affirmé les policiers qui ont plaqué au sol sur le ventre, le chauffeur-livreur de 42 ans lors d’un contrôle routier près la tour Eiffel à Paris le 3 janvier. Transporté dans un état critique à l’hôpital Georges-Pompidou, le père de famille de 42 ans était mort deux jours plus tard
Des mensonges que mettent en lumière mardi Mediapart et Libération grâce à des documents qu’ils ont consultés. Après une enquête menée par l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), trois des quatre fonctionnaires impliqués dans l’interpellation fatale à Cédric Chouviat ont été mis en examen pour homicide involontaire, avec interdiction d’entrer en contact avec tout ou partie de l’équipage. Une policière a été, elle, placée sous le statut de témoin assisté.
Au cours leurs auditions, les policiers n’en ont pas démordu : ils n’ont pas entendu les cris de détresse du chauffeur-livreur. Cédric Chouviat avait continué d’enregistrer la conversation alors qu’il avait été attrapé par-derrière et par le cou et le plaquent au sol, sur le ventre, encore casqué puis menotté…
« C’est bon, c’est bon, lâche »
L’un d’entre eux a pourtant dit à son collègue, le chef de bord Michaël P. : « C’est bon, c’est bon, lâche », « sur un ton paraissant empreint d’inquiétude ». Mais face aux enquêteurs de la police des polices, ce gardien de la paix ne « sait plus » pourquoi il a prononcé ces mots, rapporte Mediapart. La « clé d’étranglement » ? Un simple « maintien de tête », affirme Michaël P. « Il n’y a pas eu de geste volontaire », dit-il encore. D’autres vidéos tournées par l’une des policières impliquées ont pourtant été versées au dossier.
Selon les conclusions de l’IGPN, Cédric Chouviat a été amené au sol en quelques secondes par le chef de bord Michaël P., par le « biais principalement d’un étranglement arrière, selon les sources ». Il « s’est retrouvé allongé sur le ventre, évoquant très rapidement sa détresse respiratoire », selon le rapport obtenu par le site d’informations en ligne.
La police des polices s’interroge aussi sur le temps de réaction de l’équipage lorsqu’il constate son malaise. Ils mettent « 1 minute 58 secondes environ » pour lui enlever la première menotte et « 2 minutes et 56 secondes » pour commencer « un massage cardiaque ». Des policiers du XVe arrondissement appelés en renfort prennent le relais, en ne parvenant à lui prendre le pouls.
« Rébellion et arrêt cardiaque »
Mais les faits ont été relatés sur les ondes radios de la police par un policier de la BAC (brigade anticriminalité du VIIe arrondissement, le conjoint de la policière présente au moment des faits. « Il s’agit en fait d’un individu qui a été contrôlé par PS07, ce dernier a été invité à les suivre suite au contrôle. Ce dernier s’est rebellé ; pendant la rébellion, il a fait un arrêt cardiaque », a-t-il déclaré à l’état-major de la Direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne (DSPAP), d’après Mediapart. Il tient à préciser et cela peut mettre la puce à l’oreille : « Il n’y a pas eu d’étranglement ni de coups portés ».
Cette version qui concorde avec celle d’un des commandants de police du VIIe arrondissement qui aurait aussi lui maquillé les faits a été reprise dans des communiqués de presse par le préfet de police de Paris Didier Lallement.
Une version contredite par l’autopsie
L’autopsie a vite révélé une asphyxie avec fracture du larynx, que « seule une pression prolongée et très forte avec deux points d’appui, par-devant sur la pomme d’Adam et par-derrière dans le haut du dos peut provoquer », selon un expert médical à la retraite consulté par le Parisien.
Une plainte a été déposée par la famille Chouviat le 7 janvier pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
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