Le tribunal administratif de Versailles a suspendu l’arrêté préfectoral imposant de présenter un pass sanitaire à l’entrée des quatorze plus grands centres commerciaux du département. La raison : il ne prévoit rien pour les personnes n’en disposant pas de se procurer des produits de première nécessité.
Une décision qui pourrait faire boule de neige ? Plus besoin du précieux sésame pour se rendre dans les 14 plus grands centres commerciaux des Yvelines. Le tribunal administratif de Versailles a suspendu ce mardi l’arrêté préfectoral imposant le pass sanitaire dans les quatorze centres commerciaux du département de plus de 20 000 mètres carrés. Entrée en vigueur lundi, la mesure n’a été effective que deux jours.
Un recours avait été déposé ce dimanche par deux avocats du barreau de Versailles, maître Yoann Sibille et maître Tarek Koraitem. Pour le tribunal administratif, cet arrêté ne prévoit pas « les conditions garantissant l’accès des personnes ne disposant pas de pass sanitaire aux établissements commercialisant des biens de première nécessité situés dans l’enceinte de ces magasins et centres ».
Une « atteinte à la liberté fondamentale d’aller et venir »
En clair, l’arrêté s’applique de façon générale et absolue à l’ensemble des commerces de ces centres. Il ne prévoit aucun aménagement pour les personnes ne disposant pas du pass sanitaire si elles souhaitent acheter des biens de première nécessité dans les supermarchés des centres commerciaux concernés par la mesure. Dans ces conditions, « l’arrêté litigieux porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale d’aller et venir », estime le tribunal administratif.
Sur ce motif, la question de la légalité des arrêtés préfectoraux pris dans d’autres départements pourrait se poser. En Île-de-France, tous les préfets ont exigé le pass sanitaire dans les centres commerciaux de plus de 20 000 mètres carrés.
Pour maître Yoann Sibille, à l’initiative du recours, l’arrêté du préfet des Yvelines est entaché de plusieurs illégalités manifestes. « Alors que l’accès aux centres alimentaires n’a jamais été interdit, même au plus fort de la crise sanitaire, cet arrêté instaure une inégalité de traitement. » Plusieurs centres commerciaux concernés par la mesure comme Parly 2, Vélizy 2, Espace Saint-Quentin ou Auchan Maurepas abritent des magasins commercialisant des biens de première nécessité.
« Par conséquent, les gens sans pass sanitaire doivent faire leurs courses dans des commerces plus petits et souvent plus chers. En plus du risque sanitaire plus important, juste avant la rentrée scolaire, ce n’est pas pratique du tout. »
Versailles, ce mardi. Maître Yoann Sibille a attaqué l’arrêté en son nom, avec un confrère. LP/J.C. Jeanne Cassard
Ce à quoi l’avocate de la préfecture a répondu que les gens pouvaient toujours se faire livrer à domicile ou commander au drive. Un argument balayé par le tribunal.
Quid des autres départements d’Ile-de-France ?
Maître Yoann Sibille, précise aussi que « cette mesure n’est pas adaptée aux circonstances locales, le préfet n’a fait que reprendre l’arrêté de la préfecture de police de Paris pris antérieurement ».
Sur le taux d’incidence dans les Yvelines, « au 20 août, il ressortait à 191 cas pour 100 000 habitants, c’est en dessous de la limite des 200 » fixée par le gouvernement. Pour l’avocat, cet arrêté est un « alignement pur et simple sur les décisions prises par les autres préfets d’Ile de France ». En Essonne, en Seine-et-Marne, dans les Hauts-de-Seine et à Paris, de tels arrêtés ont été pris alors que la barre des 200 n’était pas atteinte. Celle-ci était en revanche dépassée en Seine-Saint-Denis, dans le Val-de-Marne et dans le Val-d’Oise.
Contactée, la préfecture des Yvelines « prend acte du jugement du tribunal administratif et indique que le pass sanitaire ne sera plus exigé à l’entrée des 14 centres commerciaux et ce jusqu’à nouvel ordre ».
Une jurisprudence différente à Toulouse
La préfecture des Yvelines est toutefois en train d’étudier l’opportunité d’interjeter appel devant le Conseil d’État, avec les services du ministère de la Santé et des solidarités et le ministère de l’Intérieur. Elle rappelle que le tribunal administratif de Toulouse, dans un jugement de ce mardi, a validé la notion de bassin de vie pour accéder aux produits de première nécessité.
Le centre hypermarché Leclerc à Roques-sur-Garonne avait déposé un recours contre l’arrêté du préfet de Haute-Garonne imposant le pass sanitaire pour accéder aux grands centres commerciaux de Toulouse. Le recours a été rejeté.
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