Le 04 10 2021
« 20 000 suspensions, 5700 lits fermés et tout le reste ! »
Bonsoir,
Nous passons beaucoup de temps en ce moment à faire respecter les droits des agents qui sont fortement bafoués dans la période.
Nous voyons de plus en plus des directions autoritaires, déloyales et maltraitantes qui ne veulent rien savoir.
Nous sommes dans une période où l’arbitraire est généralisé… Où ils mettent en place une gestion à la carte selon les territoires et selon les établissements
D’ailleurs, depuis le début du quinquennat de Macron et son gouvernement, il y a une très forte volonté de mettre en place un code du travail différent par entreprise et un para-statut local différent par établissement. Chaque nouveau texte apporte une pierre à cette construction. Depuis le début de la crise sanitaire, cela se renforce, puisque les droits collectifs et les libertés fondamentales sont devenus dérogatoires.
En ce moment, on voit un peu tout et n’importe quoi sur les contrôles des arrêts maladie pourtant la réglementation est claire.
En effet, la législation en vigueur prévoit la possibilité pour l’administration de demander une contre-visite médicale d’un fonctionnaire placé en arrêt maladie à l’article 15 du décret n°88-386 du 19 avril 1988. Cette contre-visite doit être réalisée par « un médecin agréé » devant figurer sur une liste des médecins agréés par l’ARS (voir cette liste sur le site de l’ARS PACA).
L’agent peut contester les conclusions du médecin agréé par un recours suspensif devant le comité médical.
Pour les contractuels de droit public et les salariés du privé, c’est le médecin conseil de la CPAM qui va les convoquer et réaliser la contre-visite.
Depuis le mois d’août notre position n’a pas changé. Juridiquement, ce n’est pas possible de suspendre un agent en arrêt maladie. Même le gouvernement a reconnu oralement lors d’une réunion ces derniers jours que ce n’est pas possible. Pourtant sur le terrain, ça part dans tous les sens, et on voit des pratiques très différentes selon les territoires et selon les directions.
Ensuite, ils nous disent depuis le début que le fait de ne pas être vacciné n’est pas une faute et que la suspension de rémunération n’est pas une sanction.
Depuis le début, nous disons que la suspension est une sanction disciplinaire qui ne dit pas son nom. D’ailleurs on voit des courriers d’ARS envoyés aux directions ces derniers jours qui parlent bien de « sanctions ».
On voit des agents en détresse totale. Pour les agents suspendus, il ne faut pas hésiter à faire des demandes d’aides exceptionnelles au CGOS. On ne sait pas si cela va marcher mais c’est une piste à tenter.
Sur le secret médical, quand une administration crée des fichiers avec des données médicales, qu’elle travaille dessus, qu’elle les diffuse… Il y a pour nous, bien entendu une violation du secret médical.
Le syndicat CGT du CHU de Toulouse a découvert que l’administration de l’établissement a mis en place de manière illégale un traitement automatisé des données concernant les éléments médicaux de l’ensemble des agents du CHU. Le syndicat CGT a porté plainte pénalement et auprès de la CNIL. Des agents ont également fait la même démarche. Dans le cadre d’une violation du secret médical, les sanctions prévues vont jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. Et dans le cadre de la violation du RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données), il est prévu pour les contrevenants jusqu’à 5 ans de prison et 300 000 euros d’amende.
De nombreux établissements font la même chose, partout en France. Et cela a commencé bien avant la loi du 5 août 2021.
De mois en mois, les « lignes rouges » sont franchies les unes après les autres. Et c’est sans fin !
On ne peut pas faire tout et n’importe quoi y compris en temps de crise sanitaire !
Les CHSCT peuvent faire un « droit d’alerte » sur la violation du secret médical, convoquer des CHSCT extraordinaires, prévenir l’inspection du travail, prévenir les agents de leur droits et des possibilités de recours…
Il va falloir que les droits fondamentaux des agents soient respectés. Le secret médical et le droit à la vie privée en font partie.
Sur la dégradation des conditions de travail aussi, il y a des actions à mener !
Les membres CHSCT peuvent faire un droit d’alerte pour un danger grave et imminent sur l’impact du « passe sanitaire » sur le bon fonctionnement de l’établissement et sur la mise en place d’une discrimination de l’accès aux soins, pouvant engendrer des risques pour les personnels, pour les patients et plus globalement pour la population.
Ils peuvent également alerter sur le fait que les personnels sont soumis à une pression intense depuis le début de la crise sanitaire, certains nous alertent sur des situations pouvant s’apparenter à un épuisement professionnel (parfois venant nous voir en détresse).
De nombreux personnels viennent nous voir pour nous demander : « Comment on démissionne ? »… « Comme on se met en dispo ?… « Comment on peut changer de métier ? »… Ou nous dire : « Je ne me vois pas travailler comme ça pendant des années ! ».
Et malgré cela, les pouvoirs en place ne se remettent pas en question. C’est tout le contraire qui se passe.
Par exemple, concernant les attaques sur les droits, je n’ai pas vu le texte sortir définitivement mais cet été j’ai vu passer un projet de décret modifiant le décret 2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps et à l’organisation du travail avec entre autres :
– annualisation dans la fonction publique hospitalière (annualisation possible quand l’activité est variable au cours de l’année ce qui touche quasiment tous les services. Ils veulent aller vers la fin des cycles de travail, ce qui serait un recul important pour les personnels. Ils veulent optimiser au maximum l’activité)
– le forfait jour sans durée de travail quotidienne pour les cadres obligatoire (ils parlaient de renforcer le volontariat, mais là on serait carrément dans de l’obligation)
– le temps de repos quotidien qui passerait de 12h00 à 11h00 entre deux journées de travail (on leur dit que le personnel est épuisé et là, ils veulent leur enlever encore 1h00 de repos)
On voit bien qu’ils ne s’arrêtent jamais, et qu’ils n’ont aucune limite !
Concernant le manque d’effectifs dans nos établissements, la CGT Santé et Action Sociale a mené une enquête fin 2019 et début 2020. Il en est ressorti un manque d’effectifs autour de 12% dans nos établissements correspondant en emplois manquants à :
– 100 000 emplois dans les hôpitaux
– 200 000 emplois dans les EHPAD
– 100 000 emplois dans le reste du médico-social et du social
Pourtant là, les suspensions mettent encore plus en tension notre secteur. M. Véran parlait de 3000 agents suspendus. Quelques jours plus tard, c’est 20 000. Mais on sait tous que c’est bien plus, sachant qu’il faut ajouter les démissions, les agents en disponibilité et les agents en arrêt maladie.
Ils nous opposent à longueur de journée l’obligation de continuité de service public, pour remettre en cause le droit de grève, pour remettre en cause la durée de travail, pour les retours sur les repos, pour bafouer les droits… Et là, on voit bien que ce n’est pas leur priorité !
Lors de la première vague, on a vu de nombreux établissements embaucher des ASH pour assurer les tâches d’hygiène. Pour les suivantes, ce n’était plus le cas. C’est facile de rejeter la faute sur les personnels quand les directions et les pouvoirs publics ne mettent pas les moyens pour limiter les infections nosocomiales. On nous fait des leçons et à côté de cela ils retirent des moyens.
Avant la pandémie, nous disions régulièrement que 100 000 lits avaient été fermés en 20 ans, et qu’il valait mieux ne pas avoir de gros besoins à l’avenir. Début 2020, la crise sanitaire a mis en lumière aux yeux du grand public ce manque de lits qui a fortement influencé la gestion de la crise comme la restriction de nos libertés.
Pourtant, les fermetures de lits continuent puisque de nombreux grands médias ont relayé cette semaine une étude de la DREES mettant en lumière la fermeture de 5700 lits en 2020 et la fermeture de 25 établissements publics et privés. C’est stupéfiant !
On voit bien qu’il y a les discours (« Nous sommes en guerre »… »quoi qu’il en coûte ») mais en face rien n’a a changé !
On veut bien qu’on mette en avant la responsabilité des soignants si nécessaire mais là, c’est la responsabilité de ceux qui nous gouvernent qui est en cause !
Les objectifs de M. Macron et son gouvernement n’ont absolument pas changé depuis le début de la crise, on a l’impression qu’elle les conforte même dans leurs idées.
En ce moment, ils ferment des lits car il y a des suspensions, mais en même temps, la fermeture de lits c’est ce qu’ils veulent ! Et ça fait plus de 20 ans qu’ils se servent du manque de personnels pour justifier les fermeture de lits ! De manière organisée, méthodique et volontaire !
Un collègue nous disait ces derniers jours : Ne pourrait-on pas porter plainte pour « Sabotage » ?
Quand on regarde l’Article 411-9 du code pénal, il est précisé :
« Le fait de détruire, détériorer ou détourner tout document, matériel, construction, équipement, installation, appareil, dispositif technique ou système de traitement automatisé d’informations ou d’y apporter des malfaçons, lorsque ce fait est de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation, est puni de quinze ans de détention criminelle et de 225 000 euros d’amende.
Lorsqu’il est commis dans le but de servir les intérêts d’une puissance étrangère, d’une entreprise ou organisation étrangère ou sous contrôle étranger, le même fait est
puni de vingt ans de détention criminelle et de 300 000 euros d’amende. »
5700 lits fermés en un an, et surtout dans le contexte actuel, cela ressemble fortement à du sabotage !
Une autre collègue nous disait : Ne pourrait-on pas faire une « action en responsabilité de l’Etat » ? C’est une autre possibilité ! Il faut envoyer un courrier en recommandé au ministre de la santé pour lui exposer la situation, dire que c’est une faute, exposer les préjudices et dire qu’on saisira le tribunal compétent.
Enfin, on veut bien que la situation soit difficile, qu’il y ait des obligations à mettre en œuvre, mais ce n’est pas une raison pour mettre une extrême pression, menacer ou harceler les personnels !
Il est possible de saisir le juge des référés libertés pour faire cesser une situation de harcèlement (quand c’est le début et qu’il y a urgence).
I
l y a les droits d’alerte du CHSCT.
Il y a une demande de protection fonctionnelle que l’agent peut demander.
Et puis bien entendu, il y a le rapport de force à construire ou à renforcer partout !
Quand la relation est respectueuse et qu’il est possible de dialoguer, c’est mieux !
Mais quand nous avons en face de nous des personnes qui ne respectent aucune règle et aucune loi, alors c’est œil pour œil, dent pour dent !
Quand tu attaques sans cesse les gens, ils ne vont pas réagir immédiatement. Ils supportent, ils encaissent, ils plient un genou à terre… Et puis à un moment, il y a une goutte d’eau qui fait déborder le vase. Le problème, c’est que tous les vases de nos vies privées et de nos vies professionnelles sont déjà énormément remplis. Nous rentrons dans une période à hauts risques où de plus en plus de gouttes d’eau vont faire déborder des vases. Il va suffire de très peu de choses pour enflammer les consciences. On entre dans une décennie qui va être agitée.
Il faut en avoir conscience, il faut se préparer, s’organiser, rester le plus unis possible entre nous et mener tous les combats qui seront légitimes !
Les combats vont être multiples, de terrain, pied à pied !
Il y aura des combats traditionnels à mener puis certains prendront des formes moins habituelles. Puis, il va y avoir un retour à des formes d’actions plus anciennes mais plus percutantes.
Il y aura des guerres de tranchée pour défendre nos droits et pour s’opposer au démantèlement de nos établissements !
Tous les combats sont utiles ! Il n’y a pas de petites luttes !
On sera là et on lâche rien !
C.V.
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