Dora, militante de SOS Racisme lors du meeting de Zemmour

France, Villepinte, 2021.12.05. SOS Racism militants at Eric Zemmour first political meeting as Presidential candidate for 2022 elections in France. Photograph by Polyvios Anemoyannis / Hans Lucas. France, Villepinte, 2021.12.05. Militants de SOS Racisme au premier meeting d Eric Zemmour, candidat a l election presidentielle 2022. Photographie de Polyvios Anemoyannis / Hans Lucas.

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Dora, militante de SOS Racisme lors du meeting de Zemmour : «De façon décomplexée, des gens nous ont cassé la gueule en direct»

Racisme, incitation à la haine : 

Dimanche, lors du congrès du nouveau candidat d’extrême droite à Villepinte, des militants pacifistes ont été roués de coups par le public. Parmi, eux, Dora. Elle revient pour «Libération» sur la scène et les raisons de son engagement.

par Victor Boiteau

publié le 7 décembre 2021
Les vidéos, d’une violence effarante, montrent à la France entière – si certains en doutaient encore – l’ouverture d’esprit des soutiens de Zemmour. Lors du meeting du candidat d’extrême droite à la présidentielle dimanche à Villepinte, une quinzaine de militants de SOS Racisme ont été rossés pour avoir protesté pacifiquement contre le discours de haine du polémiste multi-condamné. Parmi eux, Dora, militante depuis cinq ans, pull noir marqué d’un «N» et jupe rouge. On la voit sur l’une des nombreuses vidéos publiées, comme celle du journaliste de Brut, Remy Buisine. C’est elle qui est la cible des coups de poing dignes d’une cage d’UFC de l’homme en chemisette.

Comment s’est passée votre arrivée à Villepinte dimanche en début d’après-midi ?
L’ambiance est étrange au Parc des expositions. L’entrée principale est bloquée. Il y a plein de monde et la foule se dirige vers un escalier. Au fur et à mesure, on voit un petit couloir. Il y a des CRS, avec leurs boucliers. Avec eux et les militants de Zemmour, on a l’impression d’entrer dans un cul-de-sac. On s’installe ensuite comme n’importe qui. Deux heures passent, avec tous les discours de haine. On attend le bon moment pour mener une action la plus impactante possible. On attend que Zemmour parle.

Le discours débute, vous montrez vos tee-shirts et criez «Non au racisme !»

On s’était préparés à essayer de tenir, pour faire entendre notre voix le plus possible. Et puis on le fait, ça dure deux minutes… Et on se fait rétamer.

Un homme vous frappe à plusieurs reprises…

C’est un moment hyper violent. A ce moment-là, je suis préoccupée par la violence autour de moi. Plusieurs de mes amis sont par terre. Des gens leur tapent dessus. Je suis affolée. Je me protège sans voir ce qu’il se passe. Dans la cohue, je ne me rends pas compte que quelqu’un me vise personnellement [l’homme à la chemisette]. Quand la personne arrête de me frapper, je reprends mes esprits. Je cherche mes amis. L’un d’eux est en train de se faire frapper, j’essaye de l’empêcher. Après ça, je ressens les coups. Une personne me tire, me frappe et je tombe […] J’ai pu me protéger. Je ne suis pas trop abîmée.

Que se passe-t-il ensuite ? Vous êtes exfiltrée ?

Un homme me sort de cet endroit où c’est le plus dangereux. J’essaie alors de retrouver mes amis. Je vois l’un d’eux, traîné par deux gros bras. Je le suis, et derrière nous, on entend des trucs hypers haineux… On a l’impression qu’on va mourir. Je réussis à me faufiler à l’extérieur. La sécurité emmène mon collègue aux CRS. J’entends alors [la sécurité du meeting] dire que nous avons commencé une bagarre, pour mettre le doute et nous accuser. J’essaie d’appeler une ambulance. En attendant, d’autres amis nous rejoignent, dont l’une qui est en sang. Je suis complètement paniquée. On ne sait pas quoi faire. Le temps qu’on retrouve tout le monde, le meeting se termine. Un flot de militants de Zemmour sort. On a peur de se refaire attaquer. On n’a pas osé prendre le RER, on a attendu que ça se vide encore…

Quel était le but de votre action lors de ce meeting ?

L’idée, c’était d’être présent. Il s’agissait de faire entendre notre voix, en dissonance totale avec les discours, les slogans «On est chez nous !» Nous étions pacifiques. Nous avons eu de la discipline, après avoir été contraints d’écouter des heures de discours de Zemmour !

On s’attendait à se faire huer énormément, voire un peu molester, ou à se faire sortir de façon musclée par la sécurité. Mais on ne s’attendait pas à ce que des mecs se jettent sur nous avec cette violence… J’ai cru qu’un de mes amis allait y passer […] Voilà le genre de personnes que Zemmour ramène à ses meetings et remercie ensuite.

Allez-vous reconduire des actions de ce type ?

Oui. Peut-être différemment. Mais ce discours, pendant trois heures, a remis les pendules à l’heure. Il m’a rappelé ce pour quoi je milite. On ne s’attendait pas à cette violence qui s’est déchaînée. Il y avait tellement de caméras… Mais, de façon décomplexée, des gens nous ont cassé la gueule en direct, sans problème, comme s’ils avaient tous les droits.

Allez-vous porter plainte ?

Oui bien sûr. Personnellement, et au nom de l’association.

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