Elections législatives : la France massivement abstentionniste, une donnée devenue structurelle

En vingt ans, le parti des abstentionnistes n’a cessé de grossir. Le 12 juin, 52,4 % des électeurs ne se sont pas déplacés pour voter et ce malgré l’enjeu politique du scrutin. Autre paradoxe, les deux familles politiques les plus pénalisées traditionnellement par la faible participation ont réalisé des scores historiquement hauts.

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Les élections législatives ne font pas exception : une fois encore, l’abstention a battu un record lors du premier tour, dimanche 12 juin, atteignant 52,49 %. Et l’on peut craindre que le même scénario se produise, dimanche 19 : en 2017, 57,36 % des électeurs ne s’étaient pas déplacés au second tour contre 51,3 % une semaine auparavant. Depuis l’inversion du calendrier électoral en 2002 – où l’élection présidentielle précède désormais le scrutin législatif –, les abstentionnistes n’ont cessé de voir grossir leurs rangs. Il y a vingt ans, ils étaient 35,6 % à bouder les urnes pour l’élection des députés, soit près de 17 points de moins qu’aujourd’hui.

Car le phénomène abstentionniste est massif et structurel. Les derniers rendez-vous électoraux en sont la preuve : en 2019, près de 50 % des Français n’ont pas voté aux européennes ; en 2020, ils étaient 55,25 % à rester chez eux pour le premier tour des municipales ; en 2021, pour les régionales, 66,72 %. Seule exception, la présidentielle, avec 26,31 % d’abstention au premier tour, 28,01 % au second (chiffres en hausse, cependant, par rapport à 2017). A chaque fois, les mêmes profils sont concernés, ceux les plus éloignés de la politique, à savoir : les jeunes, les non-diplômés, les ouvriers et les employés.

« Désocialisation politique »

Pourtant, en 2022, la campagne législative a été remuante, notamment à gauche. La création de la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (Nupes, réunissant La France insoumise, le Parti socialiste, le Parti communiste et Europe Ecologie-Les Verts) et son mot d’ordre « Mélenchon premier ministre » ont permis de créer un enjeu politique pour une élection qui est, depuis vingt ans, celle de la confirmation des résultats de l’élection présidentielle.

Lire l’éditorial du « Monde » : Elections législatives 2022 : une fin de campagne hors sujet

Avec leur promesse de cohabitation, les mélenchonistes se posent en adversaires principaux du président de la République, Emmanuel Macron. Et, surtout, ils donnent aux électeurs déçus de la non-qualification de Jean-Luc Mélenchon au second tour de la présidentielle la possibilité de prendre leur revanche, et de gagner, peut-être, le « troisième tour ». Mais cela n’a pas suffi.

« L’hyperpolarisation entre Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron a laissé des gens de côté, notamment à droite, qui se sont dit qu’ils ne pouvaient pas l’emporter et que ce n’était pas la peine d’y aller », veut croire Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos. Ainsi, selon une enquête d’Ipsos-Sopra Steria sur le vote des Français (effectuée du 8 au 11 juin, sur un échantillon représentatif de 3 995 personnes, selon la méthode des quotas), 49 % des sondés ont trouvé la campagne « inexistante » ; 36 % « décevante », et seulement 15 % l’ont jugée « intéressante ». L’électorat de la Nupes se prononce de la même manière, dans des proportions quasi égales.

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