FÊTE DE LA MUSIQUE, FÊTE DE LA POLICE : RÉCIT D’UN 21 JUIN TOTALITAIRE

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FÊTE DE LA MUSIQUE, FÊTE DE LA POLICE : RÉCIT D’UN 21 JUIN TOTALITAIRE
– Hommage à Steve nassé, 5 arrestations et une hospitalisation pour une banderole, fresque détruite, ville cadenassée –
Mardi 21 juin 2022, 40ème fête de la musique dans un pays pris en otage par un banquier qui veut gouverner avec l’extrême droite. A Nantes, c’est une date importante : il y a trois ans jour pour jour, la police avait attaqué la fête sur un quai à coup de grenades et de balles en caoutchouc, et précipité plusieurs personnes dans la Loire. Steve était mort noyé. Justice n’a toujours pas été rendue. En revanche, depuis, les fêtes de la musique sont systématiquement réprimées. Celle de 2022 a dépassé les frontières de l’imaginable.
14h : la préfecture a pris un arrêté interdisant les rassemblements et le transport de son. Interdire la fête et la musique le jour d’une fête de la musique : la nouvelle normalité à Nantes, le jour anniversaire d’un crime policier, est donc d’empêcher le souvenir même de l’évènement.
16h : sur l’île de Nantes, rue Paul Nizan, une immense fresque est réalisée par le collectif BlackLines. Il y a de la musique. Un peu de monde afflue. Mais l’endroit est cerné de policiers. Des motards passent plusieurs fois. Un escadron de gendarmes mobiles circule à proximité. Les ponts qui mènent au centre-ville sont déjà bloqués par des agents armés. De quoi ont-ils peur ?
18h30 : à l’endroit de la charge mortelle de 2019, les amis de Steve organisent un hommage. Le collectif a joué le jeu, toujours appelé au calme, déclaré ses évènements. Pourtant, sur le quai, il se retrouve encerclé. Quelques dizaines de personnes se réunissent entre deux averses. Il y a peu de monde mais un cordon de forces de l’ordre entourent quand même les personnes présentes. Celles qui veulent approcher se font fouiller. Il y a des prises de parole, mais elles sont écourtées, car la police menace de mettre des amendes si le rassemblement dure trop longtemps. Tout le monde repart. Sur les lieux d’un crime policier, il n’est pas possible de se réunir sans être harcelé par la police, seule maître de l’espace public. De longues files de fourgons bleu s’étendent tout le long du quai. Il y a 10 fois plus d’agents que de personnes réunies, c’est du délire.
19h : Rue Paul Nizan, la fresque du collectif Black Lines est terminée. On annonce au micro que la marche des amis de Steve, qui devait rejoindre le mur a finalement été bloquée. Un cortège devrait partir du mur pour rejoindre le centre-ville mais tous les accès sont fermés.
20h : une grande banderole proclamant «ni oubli ni pardon» est hissée sur un échafaudage de la Place du Commerce. Un exploit, car les patrouilles de police et les vigiles sont absolument partout. La banderole est très rapidement arrachée. Aucune trace ne doit rester.
20h30 : Place du Bouffay, des personnes se réunissent autour d’une fresque réalisée en hommage aux personnes tuées par la police. C’est une palissade fleurie avec le nom des défunts. Au milieu de la foule et des concerts, des dizaines d’agents armés, des chefs de la police, des policiers du renseignement investissent la place. Ambiance suffocante.
20h40 : Des banderoles du collectif Black Lines sont déposées au sol à Bouffay. La police encercle toutes les personnes qui se trouvent à proximité. Tout le monde est nassé et contrôlé. Même les journalistes. Certains photographes reçoivent des menaces.
21h10 : Malgré cette énorme pression, un petit groupe sort une banderole et part en défilé improvisé dans les ruelles de Bouffay. Des cris «justice pour Steve» tentent de se faire entendre au milieu des terrasses et de la musique jouée devant les bars. La police est partout. Le rapport de force en faveur de la répression est écrasant. Plusieurs terrasses applaudissent le petit cortège.
21h20 : Charge policière. Il n’aura pas fallu 10 minutes pour que des dizaines de policiers attaquent la banderole, l’arrachent, et arrêtent 5 personnes. C’est très violent : des individus cagoulés donnent des grands coups de matraques métalliques à des gens qui tenaient juste une banderole. Une personne termine à l’hôpital après avoir reçu des coups. La scène ressemble à ce qu’on a pu voir en Russie dernièrement. Sauf que personne ne s’indigne. Pour les patrons de bars, le show doit continuer.
22h : des gendarmes armés débarquent à nouveau sur la place pour détruire et emporter la fresque en hommage aux victimes de violences policières. Le panneau est chargé dans un camion de Nantes Métropole. La mairie socialiste complice de l’opération. Ultime provocation. Le canon à eau et les dizaines de fourgons à gyrophares resteront toute la soirée dans le centre-ville.
Cette «fête» de la musique n’en était pas une. Absolument aucun espace de liberté n’a été possible. Toute forme de contestation des violences policières ou d’hommage à Steve ont été méthodiquement écrasés et gommés de l’espace public. Des sommes colossales ont été englouties pour la surveillance et la répression d’un évènement qui n’a même pas pu avoir lieu. Des hauts fonctionnaires ont multiplié des réunions de crise et dépêché des force de toute la France pour étouffer le plus durement possible l’expression de quelques dizaines de personnes. Ce régime est toxique et paranoïaque. Le plus grave ? Qu’il ‘y ait pas eu des milliers de personnes pour déferler contre ces provocations inouïes. Comme si la défaite et la peur avaient déjà gagné les esprits.
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