Une brève…
Nos Pipolesques Altesses, en villégiature dans leur chaumine de Brigand-çon, prenaient les eaux de mer. Le Roy s’adonnait à de folles chevauchées sur un engin mu à l’aide d’un moteur à explosion. Il fallait alimenter l’engin par un combustible, lequel était vendu au prix de l’or aux Riens et aux Riennes pour faire avancer leurs chariotes. Notre Capricieux Baigneur n’avait point à délier les cordons de sa bourse pour satisfaire sa passion, non plus que Dame Bireguitte, qui suivait son royal époux à bord d’un navire, motorisé lui aussi, quand elle n’était pas à jouer les héroïnes de Monsieur Jules dans un petit batyscaphe pour explorer les fonds marins.
Une armada d’argousins suivait Leurs Altesses dans leurs batifolades aquatiques, ce afin de veiller à leur sûreté. On fit les comptes : chaque journée que le Roy passait à s’amuser coûtait au bas mot deux cent mille écus aux Riens et aux Riennes, ce à quoi s’ajoutaient les dépenses en combustible des joujoux royaux.
Sa Turpide Hypocrisie fit mine de montrer l’exemple pour ce qui était de la frugalité qu’on exigeait du peuple : on troqua, uniquement afin que la scène fût immortalisée par les gazetiers en pâmoison devant le torse si viril du Roy, l’engin à moteur contre un simple canoë.
La maison du Roy fit savoir à quelques importuns – qui s’étonnaient- qu’il s’agissait de la vie privée de Notre Calamiteux Foutriquet et qu’on n’avait point à commenter. C’était là crime de lèse-majesté.
Ainsi en allait-il au Royaume du Grand-Cul-par-dessus-Tête. Les grands incendies avaient repris, la canicule sévissait à nouveau ou elle n’avait jamais cessé, tout coûtait jusqu’au moindre quignon, le peuple devant se contenter de quelques miettes distribuées avec la plus grande parcimonie, mais le Roy, ce bambin capricieux, s’amusait.
Texte Julie d’Aiglemont
Illustration Bridget Jaune
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