Aux islamophobes, libéraux et orientalistes, nos soutiens sont incompatibles

Aux islamophobes, libéraux et orientalistes, nos soutiens sont incompatibles : quelques remarques à propos de l’Iran
Au cours du rassemblement parisien en soutien à la révolte iranienne se sont manifestées des forces conservatrices, opposées aux militants progressistes qui souhaitent également défendre le choix de certaines femmes de porter le voile en France.
Parmi ces forces, on compte notamment des réseaux islamophobes, à l’image du Printemps Républicain qui y a trouvé une occasion d’exprimer son islamophobie sous couvert de soutien aux femmes iraniennes.
De nombreux royalistes nostalgiques de l’époque du Shah étaient également présents. Issus de la bourgeoisie, voire de la noblesse iranienne, ils assument pleinement leur volonté de retour à un régime tout aussi injuste et autoritaire que celui de la République islamique.
Comme à chaque fois qu’une révolte arrange les intérêts du camp occidental, les atlantistes se précipitent pour contre-attaquer ou s’approprier des combats.
Nous l’avons vu dans le cas de Hong-Kong et de l’Ukraine, conflits pour lesquels il est difficile de faire entendre nos voix au milieu des innombrables discours atlantistes teintés d’hypocrisie. A tel point que c’en est parfois décourageant.
Pour autant, nous appelons et appellerons toujours à soutenir les révoltes qui nous paraissent justes et nécessaires, mais pas avec n’importe qui et encore moins au nom de n’importe quoi.
L’Iran mérite sûrement mieux que notre paternalisme occidental.
C’est bel et bien un mouvement social qui s’élève contre le patriarcat et contre le despotisme du régime. Ce sont également les minorités marginalisées par Téhéran qui s’élèvent contre la discrimination du régime à leur encontre et se progage aujourd’hui au sein d’une partie non négligeable de la jeunessse iranienne. La révolte qui gronde en Iran n’a donc rien d’une lutte contre le voile (si ce n’est contre son imposition), contre les femmes voilées ou contre la religion musulmane.
Un simple coup d’œil aux images suffit. Nombreuses sont les manifestantes qui gardent leur hijab et leur tchador tout en acclamant celles qui manifestent sans. Les femmes iraniennes revendiquent haut et fort leur droit à disposer librement de leurs corps. Droit qui jusqu’ici leur a été refusé par un régime autoritaire doublé d’une société profondément patriarcale.
La police du régime tue et interpelle à tour de bras, sans distinction.
Des dizaines de personnes ont été tuées. Certaines pratiquantes, d’autres non, certaines étaient voilées, d’autres non. N’en déplaisent aux islamophobes qui fétichisent le corps de ces femmes qui retirent leur voile, la révolte des femmes iraniennes n’est en rien une insurrection contre l’islam.
Par ailleurs, un pays qui ne voit pas d’inconvénient à ce que des violeurs siègent au gouvernement devrait d’ailleurs se garder de donner des leçons à l’internationale en matière de droit des femmes, en particulier lorsque ce même gouvernement s’avère totalement inefficace en matière de lutte contre les violences qui sont faites aux femmes.
Revenons à la situation iranienne.
Il est tout de même curieux de ne pas jamais évoquer les sanctions économiques à l’encontre de l’Iran qui durent depuis 40 ans.
Celles-ci renforcent de facto, un repli du régime sur lui-même et accentuent son conservatisme exacerbé. Le port du voile obligatoire est l’un des trophées idéologiques de la révolution.
L’embargo asphyxie l’économie et la population dans son ensemble est ainsi pénalisée, mais pas de la même manière s’agissant de la bourgeoisie ou des élites du pays. Son peuple en subira des restrictions à l’encontre de ses libertés individuelles et une uniformisation. Qui plus est dans un contexte de conflits armés avec ses voisins.
De cette manière, le régime bénéficie d’un certain nombre d’atouts pour entretenir ce sentiment de fierté nationale chez une frange de la population. Les sanctions peuvent créer un sentiment de rejet de la lassitude économique, et renforcer le sentiment d’exclusion. Et elles n’empêchent pas Biden et Macron de négocier avec le président actuel y compris en pleine révolte.
Aussi, impossible de faire l’impasse sur le fait qu’une partie des iraniens soutiennent actuellement le régime que cela plaise ou non.
Le précédent président Rohani avait pendant un moment tenté d’ouvrir des perspectives légèrement plus progressistes concernant les mœurs. La victoire récente de Raïssi, l’ultra-conservateur aux élections de 2021, a brutalement freiné cet élan et restreint encore plus les libertés, particulièrement envers les femmes. Logiquement le vase déborde.
Un dernier point, au-delà des mises en scènes individuelles de coupures de mèches dénaturant le fond politique des revendications : comme toujours quand on regarde des vidéos d’émeutes, méfions nous des images spectaculaires aussi encourageantes peuvent elles être.
Comme la plupart des mouvements spontanés, l’absence de structuration est possiblement un frein à sa continuité. Les soulèvements sont fréquents en Iran et toujours écrasés dans le sang comme ce fut le cas en 2019. Il n’y a pratiquement aucune chance que ces révoltes renversent le pouvoir des mollahs.
En revanche, il est possible qu’elles laissent une marque qui aura démontré des signes de faiblesse de la part du régime et un précédent qui pourrait peut-être le pousser à réfléchir à d’éventuelles concessions. Symboliquement, il n’est pas anodin à titre d’exemple d’observer l’équipe nationale de football se positionner ouvertement.
Nous sommes de tout cœur aux côtés des Iranien·nes en lutte, de même que nous appelons à nous mobiliser davantage en faveur des combats oubliés par le plus grand nombre. Le tout, sans oublier qu’il est impératif de redoubler de vigilance face aux mangemorts.
Peut être une image de 3 personnes, plein air et texte qui dit ’Aux islamophobes, libéraux et orientalistes nos soutiens sont incompatibles Remarques à propos de I'Iran’
Tony Kaz et 339 autres personnes
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