Mondialisation = devenir-monde du capitalisme

Nouvelles formes de régulation de la mondialisation : acteurs, lieux et normes.

Pour le Président MACRON, la France doit redevenir « un lieu où l’on pense le monde ». Atteindre cet objectif implique donc de mobiliser l’ensemble des acteurs, d’horizons différents, d’experts et de praticiens, pour favoriser une réflexion collective et oeuvrer ensemble pour cette mondialisation.

Cela passe aussi  par une meilleure appréhension des logiques qui sous-tendent et nourissent la mondialisation : comprendre le passage d’un monde de droit à une économie de règles, et l’émergence d’une nouvelle géographique des normes où les acteurs, les « lieux » sont sans cesse en mouvement et où les relations d’interdépendances y sont renforcées, conduisant à un double paradoxe.

On assiste d’une part à une fragilisation des droits nationaux ou régionaux, mais il n’y a jamais eu par ailleurs une si forte demande de droit souple. D’autre part, le droit est devenu un espace de concurrence tout en étant aussi le domaine de multiples hybridations.

Intervenants institutionnels

Pascal LAMY,  Président émérite, Institut Jacques Delors
Justin VAISSE,  Directeur du Centre d’Analyse, de prévision et de stratégie, Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères
David MARTINON, ambassadeur chargé du numérique
Guy CANIVET, Président du Haut Conseil Juridique de la Place de Paris
Laurent BILI, Directeur général de la mondialisation, de la culture, de l’enseignement et du développement international.
Nicola BONUCCI, Directeur des Affaires Juridiques à l’OCDE.
Antoine BERNARD, Directeur-adjoint de Reporters sans frontières.
Sandrine CLAVEL, Présidente de la Conférence des doyens de droit.
Damien MARTINEZ, Président-fondateur de Facepoint,
Jean-Baptiste CARPENTIER, commuissaire à l’information stratégique et à la sécurité économique.
Isabelle JEGOUZO, Chef de la Représentation en France de la Commisssion Européenne,
Antoine GARAPON, Magistrat, secrétaire général de l’Institut des Hautes Etudes sur la Justice

Intervenant invité

Daniel ADAM, Militant des droits de l’Homme, adhérent de l’Institut des Hautes Etudes sur la Justice

Ma convention

Grand merci pour cette invitation à Sarah Albertin, avocate, responsable du programme  » Réguler la mondialisation ».

Mon enchantement présent émane de l’objectif que s’est fixé ConventionS, dans la « salle carrée » du  ministère de l’Europe et des Affaires étrangères:  » tenter de contribuer à la réflexion commune et à l’intelligence collective « . Cette dernière étant éminemment pratique, j’aime quand elle atteint des points de disjonctions comme ce fût le cas avec la réponse inopportune d’Antoine Bernard à la question de Rémy Rougeron, représentant de Thales, portant sur l’obligation de transparence des entreprises. Antoine Bernard part d’une conception idéologique très personnelle des Droits de l’Homme, bâtie sur le logos, alors qu’aussi bien Mireille Delmas-Marty que Slavoj Zizek situent les droits de l’Homme dans des contradictions logiques.

Pour Zizek, l’universalité réelle de la globalisation suscite sa propre fiction hégémonique de respect de protection des droits de l’Homme, tout en se conjuguant tandis que se développent les inégalités sociales induites par le marché.

Pour Delmas-Marty, le droit se mondialise en même temps que les droits humains. Mais alors que la mondialisation du droit tend à une uniformisation de type hégémonique, la globalisation des Droits de l’Homme se heurte au risque de fragmentation voire d’éclatement de ces mêmes droits.

La question du représentant de Thales prêtait donc matière à débat. Oni pouvait se la résumer philosophiquement en ces termes : l’entreprise doit-elle être astreinte à des préceptes moraux ? Alors qu’elle est inéluctablement soumise à la « rationalité » d’un mode de production et d’échange concurrentiel : le capitalisme.
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* *   Le logos se donne pour intelligent en tant qu’il est parole et raisonMais il se métamorphose parfois en metis (ruse de la raison). Pour Isabelle Jegouzoi, un fait économique peut accéder au rang de norme et se traduire par une règle de droit. C’est ainsi que j’interpréte le jugement de la Cour Suprême du Canada dans l’affaire « Monsanto contre le colza de Percy Schmeiser » (2004) où les agriculteurs dont les cultures ont été contaminées par des semences génétiquement modifiées sous brevet perdent tout droit sur leur récolte ainsi que celui de conserver des semences nécessaires à leurs cultures. Ce qui montre clairement que la propriété constitue un lien d’exclusivité entre un point d’imputation – un sujet de droit – et une chose. C’est ce sujet de droit qui précède la propriété, ou en d’autres termes l’appropriation dont le besoin, selon Selon John Locke, découle du désir de domination ! Or, le mouvement des enclosures, c’est le passage d’un système de droit d’usage à un système de droit de propriété.  Proudhon nous avait prévenu, dans sa « Recherche sur le principe du Droit et du Gouvernement »(1840), que la propriété privée n’est qu’un vol, dès lors que des fruits du travail sont insuffisants pour y donner accès. Dans La loi et l’autorité, Kropotkine est formel: « le vrai objectif de la loi » est « d’immobiliser le fait accompli ». Il confirmait la remarque de  Rousseau :  » Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : Ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile  » ! Il a fallu tout le poids du Code civil romain pour introduire les notions de propriété foncière illimitée qui vinrent renverser les coutumes communalistes.
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  Antoine GARAPON  a bien exposé les problèmes que nous pose la mondialisation entrant en contradiction avec l’État-nation. En effet, la mondialisation se fonde dans l’imaginaire des représentations communes, mais elle s’exerce avant tout dans des institutions et des pratiques sociales. Et il faut ajouter que ce processus s’inspire du mythe historique d’un progrès linéaire, historiquement déterminé par des « lois », emprunté à la philosophie des Lumières et au libéralisme. C’est ainsi qu’ont été développées deux approches irréconciliables de l’économie mondiale:

– La première la conçoit comme un système composé d’États en interaction ;

– La seconde comme le résultat d’un processus d’intégration des multiples réseaux d’échange sous l’effet des forces de la concurrence.

   Ces approches font silence sur une mondialisation qui trouve son origine dans l’expansionnisme irrépressible du capital. Depuis les Grandes Découvertes, le marché mondial a toujours été une condition du capitalisme et le domaine extensif de ses rapports de concurrence. La belle aventure des négociations commerciales multilatérales commence en 1944, après les accords de Bretton Woods, par la mise en place du GATT (General Agreement on Tarifs and Trades). En 1994 le GATT est mort, vive l’Organisation mondiale du commerce ! ! Grâce à cet outil,  Pascal LAMY, son directeur général, entend ériger la régulation du capitalisme en forme de gouvernance.

Mais, selon un autre son de cloche, la mission de l’OMC serait plutôt d’éliminer tous les obstacles à la concurrence en dérégulant et en rabotant les des codes du travail, des normes fiscales et environnementales. C’est en effet à partir de 1994 que le discours économique s’est assigné des missions absolutistes : contrôler l’inflation, éliminer les déficits, libéraliser le commerce, déréglementer les échanges, baisser les impôts, rationaliser, privatiser, délocaliser, supprimer des emplois,  ! De la  » Raison du moindre Etat  » d’ Antoine Garapon, j’ai retenu que de l’ « économie des faits » à la « médecine par les preuves« , les bienfaits de cette globalisation sont comparables aux vertus de l’eau de « mille-fleurs » : diabète, maladies cardio-vasculaires, asthme, rhumatismes, goutte, etc.
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    Je me sens donc bien plus proche d’un Robert Badinter qui déclarait , lors de l’Assemblée Générale de l’IHEJ de 2014, qui se tenait à la Cour des Comptes :  » la mondialisation est d’abord un phénomène économique dont les acteurs essentiels sont les grandes firmes américaines. Le droit leur est assujetti. » C’est ainsi que je relativise les propos de Nicola Bonneci pour qui le droit balise le chemin de la globalisation, en même temps que nous l’empruntons, Ce qui ménage une ouverture permettant une entrée sur le concept d’hégémonie de Antonio Gramsci. Ce concept part de l’idée que la probabilité de l’émergence d’un ordre économique international ouvert augmente avec la concentration du pouvoir et que l’existence de l’hégémonie est impossible sans l’hétérogénéité des acteurs, elle-même fondatrice d’asymétries au niveau économique. Le pouvoir n’existe qu’à partir du moment où les acteurs sont libres mais inégaux, donc consentants !

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Et c’est bien dans ce cadre contradictoire (Guy Canivet, Laurent Bili, Damien Martinez et surtout Jean-Baptiste Carpentier), que les juristes deviennent, par la gestion idéologique des normes internationales, les soutiers d’un navire qu’ils n’ont pas construit : on ne discute pas sur la règle, mais sur les conditions d’application de la règle ! Dans la mondialisation de la justice, et en droit comparé, le juge devient le législateur.

Je terminerai en précisant que dans cette question de société qu’est la globalisation, il est impératif d »établir la différence entre un énoncé scientifique (donc pratiquement historicisé) et une opinion. Or, le phénomène juridique n’est pas une science mais une technologie, bien que cela n’enlève rien à l’intérêt social fondamental qui s’attache à cette activité. Comme ni le réductionnisme ni le holisme ne peuvent justifier ma place dans cette convention, je m’y reconnais philosophiquement !

25 janvier 2018

NB : L’évolution du système mondial (et du droit impérial en tout premier lieu) semble être le développement d’une machine qui impose des procédures de contractualisation continuelle conduisant à l’équilibre systémique : une machine qui engendre un appel continuel à l’autorité. La machine semble prédéterminer l’exercice de l’autorité et l’action à travers l’espace social tout entier. Chaque mouvement est fixé et ne peut chercher sa place désignée que dans le cadre du système lui-même, dans la relation hiérarchique qui lui est accordée. Ce mouvement préconstitué définit la réalité du processus de constitutionnalisation impériale de l’ordre mondial : c’est le nouveau paradigme (…) capable de fonctionner comme le centre du nouvel ordre mondial, en exerçant sur lui une régulation effective et, si nécessaire, une coercition. Michael Hardt et Antonio Negri., Empire (2000)

Théorie du Centre et de la Périphérie

 

Rana Plazza

COMMENT DÉFINIR SIMPLEMENT

UN CADRE INTERNATIONAL DE L’ÉCONOMIE  ?

   L’activité essentielle de la Raison n’est pas d’exprimer le comment et le pourquoi de choses auxquelles elle se veut définitivement étrangère, mais d’intercaler entre les consciences et les faits une grille d’interprétation, un crible normatif décernant des certificats de conformité à ce qu’il convient de penser et discriminant le reste comme une réalité résiduelle.

[…] les représentations devraient être étudiées non pas dans un questionnement quant à leur « vérité », mais du double point de vue de leur généalogie causale (comment sont-elles produites ?) et de leur usage (comment sont-elles utilisées, comment fonctionnent-elles ?). Jean-Marie Schaeffer, « Fiction et croyance » (2004)

Le monde scientifique qualifie de « profane » toute opinion qui n’est pas passée par ses cribles ou qui ne coïncide pas avec ses grilles d’interprétation.

Le cadre national constituait il y a peu le système économique de référence. Depuis qu’il a fait place à L’internationalisation globale de l’économie, deux nouveaux types de problèmes se posent à l’économiste  :

—   Les premiers sont liés aux firmes internationales ;

—   Les seconds au système monétaire international.

Pour décortiquer l’habillage de formules pompeuses et jargonnesques dont ces discours économiques se parent à l’envi et examiner de plus près ce qui s’embusque derrière leur forme « moderne », nous aurons recours à la terminologie commode :

– de la théorie du « système international » (qui remonte aux années 1970), dont la structure  oppose un centre et des périphéries (1).

– et à celle de la  fonction mathématique, très simplifiée, de deux facteurs de production, le travail et le capital : F (K, L), avec K = Capital et L = Travail).

Le couple  < centre/périphéries >  détermine une hiérarchie entre un lieu qui s’autoproclame centre et son environnement qui est stigmatisé comme périphéries (2). En d’autres termes, il oppose un système privilégié à un système non privilégié. Cette théorisation s’oppose à la présentation statistique habituelle,  établie à partir des critères quantitatifs du sous-développement (3).

Quoique l’approche géographique paraisse légitimer ou consacrer la dissymétrie  existante, il faut souligner que le terme de centre n’a rien de géographique. Il peut désigner un mode d’expression centralisé du système capitaliste, un mode de production industrielle ou ou encore un système d’organisation marchand.  Afin de distinguer clairement les notions de centre et de cadre (système),  précisons qu’un pays donné représente non pas le champ de déploiement du marché national, mais l’environnement social de ce déploiement.

Il faut pouvoir également répondre à la question : si, en 1980, la Triade (États-Unis, Union européenne, Japon) formait le centre décisionnel économique dominant, comment définir  en 2018 ce centre et les périphéries ?

Les pays appartenant au centre et aux périphéries ont une morphologie d’ordre structurel. On suppose qu’ils sont classés par ordre croissant de décision et de contrôle de l’investissement.  Avec ce classement, où l’on opère par statistiques (l’âme des économistes), on tourne en rond si l’on ne met pas en garde le lecteur contre la notion de production en volume (4).

Dans le « monde commun », ce qui est le plus fiable est d’ordre qualitatif. Théoriquement, il faudrait donc établir une hiérarchie à partir de la qualité alors que cette dernière est incommensurable. Un verre a, par exemple, comme valeur d’usage le fait de contenir un liquide qui peut être bu. Cette valeur d’usage ne peut être comparée quantitativement à une autre valeur d’usage, elle est une qualité incommensurable et elle rentre ainsi, pour ainsi dire, « en conflit » avec l’autre face de la marchandise qu’est la valeur d’échange (ou le prix) qui est par essence quantifiable.

« Il faut observer que le mot valeur a deux significations différentes : quelquefois il signifie l’utilité d’un objet particulier, et quelquefois il signifie la faculté que donne cet objet d’acheter d’autres marchandises. On peut appeler l’une valeur en usage et l’autre valeur en échange. » Adam Smith, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations. 1776.

Aussi retenons-nous également  la terminologie de la fonction de production (F). Deux facteurs de production permettent de produire : le travail (L) et le capital (K). La fonction F nous dit quelle est la production pour un quantum  de capital K et un quantum  de travail L données. Pour les économistes néoclassiques, la croissance économique est un phénomène purement quantitatif,  alors que selon Marx,  elle est essentiellement le résultat « profitable » d’un rapport social dans l’accumulation du capital.

Retenons que cette fonction de production est une simplification. Elle n’opère pas de  distinction :

Entre les différents types de capitaux :

– matériels (machines, ordinateurs, outils… chaises),

– immatériels (énergie, transports, logiciels).

Ni entre travail concret et travail abstrait.  (5)

Le rapport K sur L donne ainsi l’abondance d’un pays en capital relativement à son abondance en travail. Une fois ce rapport défini pour l’économie nationale (Y), il faut le comparer (Y = F (K, L)  à celui d’un pays étranger soit K°/L° (6).

Dans notre modèle explicatif, le CENTRE et les PERIPHERIES ne sont que des notions métaphoriques. Et le CAPITAL n’est pas une somme d’argent, mais une technologie justifiant un investissement (en rapport avec K/L). Bien que K/L exprime la logique unilatérale de rentabilité du capital, il n’est pas quantifiable et ne peut donc être saisi statistiquement.

Le modèle < centre/périphéries > ne peut atteindre un degré de généralité satisfaisant et devenir réellement opérationnel qu’à condition de le rattacher à la théorie des systèmes, ici capitaliste et néolibéral (c’est le CADRE). Ce qui nous permet d’appréhender l’ « État providence » comme un compromis historique, et donc social, entre le  capital et le travail (K/L) : les stratégies du premier s’adaptant à celles des conditions sociales… De comprendre le droit du travail comme une apparence dissimulant l’essentiel : l’extorsion de plus-value… De ne pas disputer les inégalités sociales sur la distribution des fruits du système marchand, mais sur sur l’existence et la conservation  de ce dernier… Etc.

La place d’un pays dans ce cadre est déterminée par sa « productivité », nom pseudo-scientifique de l’exploitationLe rapport K/L n’est pas quantifiable, donc pas d’appréhension statistique. Il symbolise la « compétitivité »,  autre nom de  la « productivité » et donc de l’extorsion du profit. Ce ratio est le produit d’un conditionnement complexe (K/L = k = ratio d’intensité capitalistique  (K = capital fixe total avancé et L = nombre de travailleurs)) opérant sur tout le champ de la réalité économique, politique et sociale. Le CENTRE met en œuvre  des « monopoles de contrôle (pouvoir) » : technologie, contrôle des systèmes financiers à l’échelle mondiale, accès aux ressources naturelles de la planète, contrôle des médias (moyens d’information et de communication) et armements de destruction massive. Le centre fait donc référence à la notion de centralité et surtout de polarisation : le centre est l’espace qui domine les périphéries, parce qu’il concentre ces fonctions spécifiques.

Sur le plan synthétique d’une hiérarchisation au plan mondial, le rapport K/L est le seul à être significatif car il recoupe le volume de production, contre lequel nous avons mis en garde (4). Cette idée de classement en suggère une autre : plus ce rapport est élevé, plus l’efficacité marginale du capital baisse (baisse du profit escompté), plus la rentabilité unitaire est forte. La baisse du taux de profit signifie en même temps la hausse du profit, car le taux n’est pas la masse !

Comme les capacités productives sont uniquement déterminées par le rapport K/L, le processus de développement politico-économique, lorsqu’il se met en route, est essentiellement homogène, cumulatif. Un pays émergent (nouveau nom pour sous-développé) est marqué par la juxtaposition de deux structures correspondantes à son secteur traditionnel et à celui très développé des pays industrialisés. Sa productivité est induite par l’investissement technique des pays étrangers. C’est à ce niveau que les interactions entre un centre et ses périphéries jouent un rôle considérable dans la construction d’un système politique international,  qu’accompagne un droit mondialisé pour le justifier. La notion de développement politico-économique est donc entièrement conditionnée par l’investissement international et par les rapports que les pays entretiennent avec leurs investisseurs. C’est la dynamique des relations internationales qui entretient les rouages de ce modèle.

Dans la partie sous-développée du cadre, symbolisant la structure, il y a hétérogénéité contrairement à l’homogénéité des pays développés. Chaque région du CENTRE exporte sa productivité (K/L) dans celles de la PÉRIPHÉRIE. Toutefois, les pays du CENTRE ont également des écarts de développement. Nous disons alors que les « marges sont au centre », car certains pays situées par exemple en Europe (la Roumanie ou la Bulgarie), qui elle-même est au centre ne jouent pas un rôle moteur dans l’organisation européenne. De même, seul un avantage technologique permet d’investir dans un pays placé au-dessus de soi.

En 1952,MICHELIN, décida de mettre en place une étude sur le pneu à carcasse radiale. En 1960, il possédait 10 ans d’avance sur ses concurrents américains et prenait la position de leader mondial qu’il conserve toujours.

D’où la loi qu’à chaque occasion d’investissement rentable, les multinationales le font principalement vers des zones sous-développées (émergentes). D’où la règle : on a intérêt à investir dans…

Cette loi pose à la fois son propre principe ainsi que celui ayant servi à la classification. Tout progrès technique sera un progrès qui permettra d’économiser de la main d’œuvre, donc hausse du rapport K/L.

L’impact de la présentation du CENTRE et de la PERIPHERIE va au-delà de la présentation elle-même. Ce schéma nous permet de mieux repérer ce qui se passe dans l’imbroglio des flux. (7)

Ce schéma descendant participe de la rationalité économique : rentabilité accrue du capital (de l’investissement).  La plupart de nos activités productives sont rejetés vers le bas (PÉRIPHÉRIES). Ce qui se profile est de l’ordre de l’évidence économique : tendance d’une délocalisation de la production vers les pays les moins développés que soi. Ce qui est constant depuis la moitié du XXième siècle .

Ce qu’on appelle transfert de technologie est un vocable qui traduit l’investissement  international. Il y a des retombées en amont et en aval de cet investissement. En 1980 déjà, plus de 50 % des exportations des pays sous-développés étaient faites par les multinationales opérant dans ces pays. La technologie en œuvre dans un pays sous-développé est celle du pays qui investit. Cette délocalisation de la production entraîne des effets induits dans les pays occidentaux eux-mêmes : problèmes incommensurables au niveau monétaire (les productions étant non-monétarisées au départ), conséquences sociales et politiques (chômage, déculturation ➯ acculturation).

Depuis près de soixante ans, la délocalisation de la production est un cas d’école pour les secteurs de la sidérurgie, de l’exploitation du sous-sol et des types d’industrie occupant un grand nombre de travailleurs comme le textile ou l’automobile par exemple.

NB : L’internationalisation des territoires revient à invoquer la loi des coûts comparatifs : tout territoire a intérêt à s’ouvrir à l’échelle internationale dans la spécialisation pour laquelle il est le plus doué. Cette loi est une vieille lune, car dans le libre-échange, ce sont les pays (territoires) qui  ont une forte productivité qui gagnent. Donc, tout territoire qui a une forte productivité sera libre-échangiste !

Filmographie : – Le cauchemar de Darwin, « montrer sans rien dire ».

– We Feed The World, « le marché de la faim ».

1 – Cette notion développée par Raul Prebisch ((1901-1986) et la CEPAL (Commission économique pour l’Amérique latine, renommée Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (C.E.PA.L.C.) en 1984  ) afin d’illustrer l’opposition en terme de développement économique du Nord et du Sud. Ainsi, la périphérie désigne le tiers monde qui se développe en marge du monde industrialisé, centre d’accumulation mondial du capital, et sous la dépendance de son modèle économique. « Nous sommes confrontés non seulement à la crise du capitalisme mais aussi à la crise des idéologies: la défaillance des théories classiques qui ne permettent ni une interprétation correcte des événements actuels ni une vision claire des mesures que nous devrions prendre». Raúl Prebisch, juillet 1982,  économiste et diplomate argentin (juillet 1982)

2 – Ce schéma explicatif apparaît chez les économistes en 1902 avec Werner Sombart (Le capitalisme moderne). Il sera repris par les économistes du développement dans les années 60 qui s’en servent pour décrire les relations des empires coloniaux et post-coloniaux. Parmi eux, citons Raúl Prebisch (1901-1986), H. Wolfgang, Arghiri Emmanuel (1911-2001), L’échange inégal (1968), Samir Amin (1973), Le développement inégal ou encore Immanuel Wallerstein, The Modern World-System (1974, 1980, 1989) ] .

3-  On peut évoquer aussi :

a – la vision de ROSTOW dans  « Les étapes de la croissance ». Tous les pays se trouvent le long d’une ligne synthétique à partir d’une certaine idée de l’histoire. Le schéma est dit a-historique. On suppose que les pays ont les mêmes structures alors qu’ils sont fondamentalement différents par un processus historique. En utilisant le critère statistique, on uniformise les pays. ROSTOW entendait ainsi prouver que son processus linéaire menait toute société du stade traditionnel au stade de société de consommation de masse par le développement économique.

b – La théorie des pôles et ses multiples variantes, qui privilégie l’analyse spatiale des économies nationales de List, corrigée par la géopolitique de Ratzel.

c – La théorie se économies-monde de Braudel.

d – La théorie de l’interdépendance développée entre autres par Cooper et Keohane ainsi que Nye, qui privilégie l’analyse des réseaux par une intégration à la Parsons, pour ne pas dire à la Spencer.

4 – Ainsi, avec un PIB converti au Taux de Change Officiel (TCO) moyen sur l’année (prix d’une devise contre une autre devise), la Chine est devenue la deuxième puissance économique mondiale en 2016 talonnant les États- Unis. La France est 6e. Avec un Taux de Change de Parité (TCP), taux de conversion qui résulte de la comparaison des prix de deux paniers de biens et services identiques entre deux pays différents, la Chine est au premier rang, devant les Etats-Unis. La France est au 10e rang.

5 – Le travail est ici entendu comme l’activité spécifiquement capitaliste qui est automédiatisante, c’est à dire que le travail existe pour le travail et non plus pour un but extérieur comme la satisfaction d’un besoin par exemple. Dans la langue de Marx, « arbeiter »  est un concept aligné sur la notion de travail et sur le verbe travailler, autant qu’une référence sociale et historique déterminée. Aussi, quand Marx écrit « Arbeiter », il a en tête les opérateurs et victimes d’un processus, autant que les êtres empiriques.

6 – La ressemblance de ce rapport est avec celui de Marx frappante : Capital constant/Capital variable (C/V= Machines/Travail). Ici C désigne le Capital constant (Capital productif) et V le capital variable, c’est-à-dire la Force de travail salariée. Dans le capital productif (C), Il faut retenir la différence fondamentale séparant le capital circulant (détruit ou transformé durant le processus de production, ou qui va durer moins d’un an) du capital fixe, constitué par les moyens de production utilisés pendant plus d’un an). Ce rapport a tendance à croître dans le temps. Cela ne fait que traduire l’automatisation croissante de la société. Le progrès économique tend à faire des unités de plus en plus lourdes, compactes. C’est l’effet de concentration. C/V    ➚   = Loi d’accumulation ( à peu près égale à la loi plus moderne K/L )

Ce rapport est le meilleur rapport que l’on a pour approcher la « productivité », c’est-à-dire le processus d’exploitation.

7 – Les flux

 processus d’exploitation.

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