France-Le gouvernement durcit le ton face aux émeutes

information fournie parREUTERS30/06/2023 à 21:20*

Une nouvelle réunion de crise s’est tenue autour d’Emmanuel Macron*

Beauvau demande l’arrêt des transports à 21h dans tout le pays*

Le recours à l’état d’urgence n’est plus écarté*

917 interpellations en France après une 3ème nuit de violences*

45.000 gendarmes et policiers mobilisés vendredi soir

(Actualisé tout du long avec Gérald Darmanin)

PARIS, 30 juin (Reuters) – Le gouvernement cherchait vendredi une sortie de crise après une troisième nuit de violences urbaines consécutives à la mort de Nahel, un adolescent de 17 ans tué à Nanterre par un tir de policier, et a encore durci le ton alors que la tension peine à retomber.

Une nouvelle réunion de la cellule interministérielle de crise s’est tenue à la mi-journée au ministère de l’Intérieur, présidée par Emmanuel Macron, qui a écourté sa présence au sommet européen de Bruxelles.

Parmi les mesures annoncées, le ministère de l’Intérieur a demandé aux préfets l’arrêt des bus et tramways à partir de 21h00 dans tout le pays.

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a par ailleurs annoncé sur TF1 que 45.000 gendarmes et policiers seront présents sur le terrain vendredi soir.

Interrogé sur un possible déclenchement de l’état d’urgence, Gérald Darmanin a réitéré la position de la Première ministre Elisabeth Borne plus tôt dans la journée, à savoir qu’aucune hypothèse n’était écartée.

« On n’écarte aucune hypothèse et nous verrons après la nuit de ce soir ce que le président de la République choisira », a-t-il dit sur la chaîne télévisée.

De son côté, le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, a annoncé pour sa part avoir pris une circulaire pour demander aux procureurs d’énoncer des « peines sévères » à l’encontre des émeutiers, « notamment pour ceux qui s’en prennent à l’intégrité physique des policiers ».

Le ministre a également appelé à la « responsabilité des parents » vis-à-vis des mineurs, ajoutant qu’ils pourront être poursuivis pénalement en cas de graves manquements à leurs obligations parentales.

Éric Dupond-Moretti a par ailleurs demandé aux procureurs de se tourner vers les réseaux sociaux comme Snapchat, accusés de servir à l’organisation des rassemblements, afin d’établir l’identité des personnes qui y échangent des lieux de rendez-vous.

Pour lutter contre les appels à la violence en ligne, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a réuni les représentants des réseaux sociaux Meta, Twitter, Snapchat et TikTok pour leur rappeler « leur responsabilité quant à la diffusion de ces publications », indique Beauvau dans un communiqué.

Il leur a demandé de « s’engager activement pour retirer les messages qui leur sont signalés et identifier les utilisateurs (…) qui participent à la commission d’infractions, et de répondre promptement aux réquisitions des autorités administratives et judiciaires ».

CONCERTS ANNULÉS

La préfecture de police de Paris a par ailleurs autorisé la captation, l’enregistrement et la transmission d’images au moyen de drones dans plusieurs communes des Hauts-de-Seine et de Seine-Saint-Denis, deux départements particulièrement touchés par les émeutes, jusqu’au samedi 1er juillet 2023 à 6h00 (4h00 GMT).

D’autres mesures sont encore attendues, et le dispositif policier, qui a été multiplié par quatre jeudi soir avec 40.000 forces de l’ordre déployées, devrait être encore renforcé.

« Le ministre de l’Intérieur aura à mobiliser des moyens supplémentaires », a fait savoir Emmanuel Macron à l’issue de la cellule de crise, en annonçant également l’annulation de plusieurs évènements festifs et rassemblements dans les départements les plus sensibles.

Les concerts de la chanteuse Mylène Farmer, prévus dans la soirée et samedi soir au Stade de France, ont ainsi été annulés, a fait savoir la préfecture de la Seine-Saint-Denis.

EMBRASEMENT

Le gouvernement redoute un embrasement similaire à celui de 2005 et des émeutes qui avaient touché les quartiers populaires partout dans le pays durant trois semaines à la suite de la mort, à Clichy-sous-Bois (Seine Saint Denis), de deux adolescents électrocutés à l’intérieur d’un poste électrique alors qu’ils cherchaient à échapper à un contrôle de police.

Le gouvernement de l’époque, sous la présidence de Jacques Chirac, avait déclaré l’état d’urgence. L’instauration de ce dispositif exceptionnel, décidée par décret en conseil des ministres, permet notamment au ministre de l’Intérieur et aux préfets d’interdire des manifestations et rassemblements sur la voie publique et de fermer certains lieux publics.

Les violences urbaines qui ont éclaté dans la nuit de jeudi à vendredi ont donné lieu à 917 interpellations en France par les forces de l’ordre, dont un tiers de mineurs, a déclaré le ministre de l’Intérieur sur TF1.

Des scènes de pillages et de violences ont été observées à Paris, en Ile-de-France ainsi que dans des villes de province comme à Marseille (Bouches-du-Rhône), Bordeaux (Gironde) ou encore Roubaix (Nord).

Des bâtiments publics et des magasins ont été pris pour cible, saccagés ou incendiés. Selon le bilan du ministère de l’Intérieur, 79 postes de police ont été attaqués, ainsi que 34 mairies et 28 écoles.

Le procureur de la République de Rouen, a confirmé à France Bleu Normandie le décès d’un homme d’une vingtaine d’année après une chute d’un toit de l’ancien supermarché Lidl du Petit-Quevilly (Seine-Maritime), mais a précisé qu’il n’y avait pour l’instant pas de lien avec les violences urbaines.

Un homme, qui se trouvait sur son balcon, aurait été tué à Cayenne, en Guyane, dans la nuit de jeudi à vendredi par une « balle perdue » destinée à la police, a par ailleurs déclaré à Europe 1 le préfet de Guyane, Thierry Queffelec.

MANIFESTATION « REVENDICATIVE »

En Ile-de-France, où l’arrêt des transports à partir de 21h avait déjà été décidé la veille, plus de 400 interpellations ont été effectuées, selon la préfecture de police, et une vingtaine de bus brûlés, dont douze dans un entrepôt d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).

Le ministre des Transports Clément Beaune s’est rendu vendredi sur place en compagnie du PDG de la RATP, l’ex-Premier ministre Jean Castex.

En prévision de nouvelles tensions attendues dans la soirée,

la préfecture de police des Bouches-du-Rhône a décidé d’interdire toute manifestation « revendicative » dans le centre-ville de Marseille ce vendredi, de suspendre le trafic des transports en commun (tram, bus, métro) à partir de 19h00, et de prohiber le port de fusées d’artifice.

Jeudi, une marche blanche a réuni plus de 6.000 personnes à Nanterre en hommage à Nahel, tué deux jours plus tôt après un refus d’obtempérer lors d’un contrôle routier.

Le policier auteur du coup de feu mortel a été mis en examen pour homicide volontaire et placé en détention.

(Rédigé par Zhifan Liu, Blandine Hénault et Kate Entringer, avec la contribution d’Elizabeth Pineau et Marc Leras, édité par Jean-Stéphane Brosse)

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