Mort de Nahel, tué par un tir policier à Nanterredossier
par Jacques Pezet
Bonjour, vous nous interrogez sur la polémique concernant des infirmations contradictoires ayant circulé à propos des antécédents judiciaires de Nahel, tué par un policier mardi 27 juin à Nanterre.
La mort de l’adolescent de 17 ans tué à bout portant lors d’un contrôle routier a, comme souvent dans ce genre d’affaires, été rapidement suivie d’informations à propos de ses «antécédents judiciaires», voire de «son casier». Des fuites parfois utilisées par la droite ou l’extrême droite pour atténuer la portée du drame, sinon le justifier. Au delà du procédé consistant à dénier le statut de victime au jeune défunt, c’est aussi l’exactitude des informations qui a fait l‘objet d’une polémique dans le cas de Nahel.
Dans la soirée, les avocats de la victime ont vivement réagi, publiant un communiqué dans lequel ils prévenaient : «La famille se réserve le droit de poursuivre toutes les personnes qui inventeront, comme cela a déjà été fait ce jour, des mentions inexistantes au casier judiciaire du jeune homme». Le communiqué spécifiait que la victime «n’a jamais été condamné par la justice».
🔴 Naël, 17 ans, tué hier à Nanterre lors d’un contrôle de police ➡️ « Ce qu’on peut constater en voyant les images, c’est que c’est un geste illégitime, qui ne rentre pas dans un cadre de légitime défense », selon Me. Jennifer Cambla, une des avocates de la famille de Naël. pic.twitter.com/HeU1LbmDEs
— franceinfo (@franceinfo) June 28, 2023
Le policier qui a tiré placé en garde à vue ➡️ « Cette garde à vue est arrivée tardivement. Il a pu se mettre d’accord avec son collègue, il y a pu avoir une disparition des preuves”, s’inquiète l’avocate. “Nous allons aussi déposer une plainte en faux en écriture publique. » pic.twitter.com/RRhRzhB96N
— franceinfo (@franceinfo) June 28, 2023
«Etre connu des services de police, ça ne veut rien dire»
Sur France Info, ce mercredi 28 juin, l’avocate Me Jennifer Campla a répété que l’adolescent «n’a jamais été condamné, il a un casier judiciaire vierge», tout en précisant qu’il est «connu des services de police, ce qui n’est pas la même chose, puisque dans le traitement d’antécédent judiciaire, il n’a pas été jugé pour quoi que ce soit. Je pense que dans ce type de quartier, c’est assez rare qu’un jeune n’ait jamais été contrôlé ou n’ait jamais été placé en garde à vue.» Elle assure qu’il n’était visé par aucune procédure pour refus d’obtempérer «en cours». Son autre avocat Me Yassine Bouzrou a également souligné sur BFM TV qu’«être connu des services de police, ça ne veut absolument rien dire. […] Ces fichiers [de police] manquent de précision.»
Les premiers éléments transmis à la presse ont été fournis par le parquet de Nanterre, mardi avant 11 heures. Dans un texto envoyé (notamment) à Libération après le drame, le secrétariat du procureur de Nanterre confirme «le décès [d’une personne] âgée de 17 ans et connue des services de la justice, notamment pour un refus d’obtempérer, a été constaté à 9h15 suite à au moins une blessure par arme à feu».
Que signifie concrètement l’expression indiquant que Nahel était «connu des services de la justice»? Joint par CheckNews, le parquet de Nanterre indique qu’ «à ce stade et pour ne pas alimenter la polémique, [il maintient] les termes de [son] communiqué sur les antécédents judiciaires et non pas seulement policiers» de la victime. Le parquet ajoute qu’il ne se livrera pas à d’autres commentaires «pour l’instant par égard pour la famille du défunt».
Des poursuites et une sanction pour «refus d’obtempérer»
Une source proche du dossier, refusant d’être citée, explique que la mention d’«antécédents judiciaires» implique «au moins une condamnation et des poursuites en cours». Faute de quoi, la même source précise qu’on parle seulement d’une personne «connue des services de police». Dans le cas de Nahel, notre interlocuteur assure que le jeune homme a été condamné «pour un refus d’obtempérer» jugé par le juge des enfants en septembre 2022 et qui avait décidé d’une sanction éducative». Et d’affirme que cette mention «apparaît bien sur son casier» judiciaire. L’article L631-1 du Code pénal précise de fait que «les décisions prononçant des mesures éducatives rendues à l’égard d’un mineur […] sont inscrites au casier judiciaire».
La mention de ce refus d’obtempérer en 2022 a été révélée dès mardi par France Info, qui évoquait également le fait que le jeune homme «avait été déféré au parquet de Nanterre le week-end précédant les faits pour refus d’obtempérer, sans être présenté à un juge pour enfants» et qu’ «il avait été déjà mis en cause pour un autre refus d’obtempérer, en 2022». Plus en détail, ce mercredi, BFM TV a également assuré que le jeune homme avait été sanctionné d’une mesure éducative pour un refus d’obtempérer datant de janvier 2022 et qu’il devait être présenté à un juge des enfants en septembre 2023 après avoir été présenté au procureur de Nanterre dimanche dernier.
Si une sanction éducative figure donc bien sur le casier du jeune homme, aucun élément ne permet de parler de «casier déjà long» pour l’adolescent de 17 ans, comme l’a affirmé Charlotte D’Ornellas, ou de «casier bien rempli», comme cela a pu être écrit sur les réseaux sociaux.
Sollicités par CheckNews, les trois avocats de Nahel n’ont pas répondu à nos demandes de précisions.
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