Interdiction de l’abaya : Le Poing Levé et La Voix lycéenne lancent un recours en justice

Ce lundi, par la voix des avocates Maîtres Gandin, Ogier et Simon, les organisations de jeunesse Le Poing Levé et La Voix Lycéenne ont déposé un recours en suspension de l’interdiction du port de l’abaya dans les établissements scolaires.

4 septembre

En ce lundi de rentrée scolaire, les organisations de jeunesse Le Poing Levé et la Voix lycéenne ont déposé un recours devant le Conseil d’État concernant l’interdiction du port de l’abaya et du qamis – l’équivalent masculin de la robe ample – décrété par le ministre de l’Éducation Nationale Gabriel Attal le 27 août dernier. La procédure vise, sur le fondement de l’article 521-1 du Code de justice administrative, à suspendre l’application de la note et du courrier du ministre en date du 31 août 2023 portant interdiction du port de ces vêtements en milieu scolaire. Il appuie en ce sens le recours porté devant la même juridiction par l’association Action Droit des Musulmans, qui attend encore d’obtenir une date d’audience.

« Interdire les abayas, c’est une manière pour l’Etat d’avoir un droit de regard et un contrôle direct sur le corps de milliers de jeunes femmes qui vont être exclues de leurs cours pour la simple raison qu’elles portent une robe ample. Nous, nous voulons réaffirmer que trop couvertes ou pas assez, c’est aux femmes de décider » explique Ariane Anemoyannis, porte-parole du Poing Levé. En ce sens, le recours dénonce la qualification de vêtement religieux « par nature » et « par destination » qui est faite par le ministère de l’Education Nationale et qui vise à interdire le port de l’abaya en assimilant ce vêtement à la confession musulmane.

« Par ce recours, nous souhaitons faire juger que l’interdiction du port de l’abaya est contraire au principe de laïcité et discriminatoire, dès lors que le ministre de l’Education Nationale est incompétent pour décréter qu’une robe ample est un signe religieux par nature ou par destination, et que cette interdiction conduit à interdire aux écolières musulmanes de porter des robes amples tandis que leurs camarades non musulmanes le pourront. » explique ainsi Maître Clara Gandin, avocate au barreau de Paris. En outre, le recours pointe l’exigence qu’une « procédure disciplinaire soit systématiquement engagée par le chef d’établissement », qui conduit à réprimer et exclure de l’enseignement toute personne portant une robe ample lorsque celle-ci est de confession musulmane ou assimilée comme telle.

En pointant par-là la discrimination envers les élèves musulmanes ou assimilées comme telles que cette interdiction implique, le recours entend par ailleurs s’inscrire dans une dénonciation plus globale de l’offensive islamophobe menée par le gouvernement depuis plusieurs années. De fait, si les annonces de Gabriel Attal fin août marquent un saut dans la stigmatisation des élèves de confession musulmane, le précédent ministre Pap N’diaye avait également incité les établissements à réprimer davantage le port de vêtements traditionnels en novembre 2022.

Pour Ariane Anemoyannis, « ces nouvelles règlementations s’inscrivent dans la droite lignée de la loi du 15 mars 2004 qui sous couvert de respect de la laïcité, a incarné la première attaque contre la possibilité pour les jeunes femmes musulmanes de porter le foulard au lycée. S’il faut dénoncer l’offensive sur les abayas, c’est toute une politique islamophobe qu’il faut remettre en cause, qui va de cette loi de 2004 à la loi séparatisme, dont nous revendiquons l’abrogation. »

Alors que ce lundi, l’application de la mesure est allée de pair avec une mobilisation de la police par Darmanin, cette attaque doit par ailleurs être inscrite dans la continuité de la répression des jeunes des quartiers populaires, après que ces derniers se soient soulevés contre l’impunité et le mépris suite au meurtre policier de Nahel. Face à cette politique, le recours en référé-suspension initié par Le Poing Levé et la Voix lycéenne veut être un point d’appui pour rejeter en bloc cette offensive islamophobe et sexiste de la part du gouvernement, et plus largement construire une contre-offensive de l’ensemble de la jeunesse contre les violences racistes et patriarcales perpétrées par l’État.

Pour cela, il s’agit ainsi de revendiquer non seulement la suspension de l’interdiction du port de l’abaya, mais aussi l’abrogation de la loi de 2004 et de toutes les dispositions racistes et sécuritaires qui visent à contrôler toujours plus le corps et la vie des jeunes des classes populaires, en articulant cette opposition aux lois racistes à une contre-offensive d’ensemble contre le gouvernement.

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