«La corruption de leurs dirigeants est un fléau pour les Palestiniens»

Par Pierre Rehov

Mahmud Abbas. MAJDI MOHAMMED/AFP

FIGAROVOX/TRIBUNE – Le reporter Pierre Rehov a réalisé un documentaire, dans lequel il montre l’importance de la corruption dans les élites palestiniennes.

Pierre Rehov est reporter, écrivain et réalisateur de documentaires.

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Il a beaucoup été question des sommes que l’Autorité Palestinienne consacre aux salaires des terroristes emprisonnés en Israël et aux familles des «martyrs», autrement dit des terroristes-suicides et de ceux tués au cours de leur opération meurtrière. Mais lorsque vous parlez à des Palestiniens du détournement des fonds alloués par la communauté internationale, ces dérives ne les troublent guère: le premier terme qu’ils emploient en revanche est: «corruption».

L’équation à laquelle se livrent Mahmud Abbas et son entourage d’un côté, les dirigeants du Hamas de l’autre, est simple à comprendre. Pendant des décennies, il leur a suffi d’accuser Israël de tous leurs maux pour détourner l’attention des médias, de la communauté internationale et de leur population.

Les populations ne sont plus dupes.

C’est un exercice auquel se sont livrés également de nombreux pays arabo-musulmans. Quels que soient les excès des dictatures en place, il a suffi pendant longtemps d’accuser Israël – et parfois l’Occident – pour maintenir leurs populations dans le calme, tout en détournant et engrangeant des milliards de dollars qui auraient pu améliorer leurs conditions de vie ou leurs infrastructures.

Mais les époques changent, l’information globale est désormais facile d’accès et les populations ne sont plus dupes.

C’est ce qui ressort de notre documentaire court-métrage qui a impliqué deux équipes de tournage: l’une à Gaza et l’autre en Judée Samarie. Désormais les Palestiniens, excédés par leur situation et au bord du désespoir, n’hésitent plus à accuser leurs dirigeants pour leurs conditions misérables de vie.

Un autre se plaint que les hôpitaux et dispensaires n’ont jamais de médicament disponible. «Ils vous disent de revenir en début de mois. Vous retournez le deuxième jour du mois et il n’y a déjà plus rien. Tous les médicaments ont donc disparu en 24 heures?» Il se trouve que le meilleur moyen d’obtenir des médicaments à Gaza, c’est par le marché noir.

À Ramallah et à Hebron, d’autres personnes interrogées constatent qu’ils entendent souvent parler de l’aide internationale par les médias et sur internet, mais qu’eux-mêmes n’en profitent jamais. Les infrastructures, selon eux, sont déplorables et aucun effort n’est jamais fait pour les réparer ou les remplacer. Mais les palaces qui émergent dans les quartiers chics de Ramallah et de Hebron sont spectaculaires et feraient rêver des stars d’Hollywood. La nouvelle vile de Rawabi, financée en partie par le Qatar, dans laquelle les fils de Mahmud Abbas ont des parts, devait servir à accueillir des réfugiés. Mais seuls les privilégiés y ont accès, et la ville est pour l’instant aux trois quarts inoccupée. Ceux qui y vivent sont d’ailleurs considérés comme des traîtres, car plusieurs entreprises et architectes israéliens ont participé à sa construction.

Un homme d’affaires de Hebron, affirme que toute l’économie palestinienne est tenue par quatre monopoles, tous dirigés par des proches de Mahmub Abbas.

L’Autorité Palestinienne se plaint de ne pas disposer de fonds suffisants. Mais cela n’a pas empêché Mahmud Abbas de se faire construire une maison pour 32 millions de dollars et d’acheter un jet privé qui aurait coûté près de 50 millions. Dans le même temps, les salaires de 190 employés d’une compagnie aérienne fictive «Palestine Airlines» apparaissaient dans le budget de l’Autorité Palestinienne jusqu’en 2017.

Parmi les Palestiniens interviewés, le plus virulent est certainement Ashraf Al Jabari, un homme d’affaires qui vient de fonder le Reform and Development Party, une organisation politique focalisée sur la situation économique de la Cisjordanie. Il accuse non seulement Mahmud Abbas et ses fils de s’enrichir sur le dos de la population, comme Arafat avant eux, mais également l’AMAN de servir d’écran de fumée pour satisfaire l’Union européenne.

De son côté, Ashraf Ghanem, un homme d’affaires de Hebron, affirme que toute l’économie palestinienne est tenue par quatre monopoles, tous dirigés par des proches de Mahmub Abbas. «Il n’y a pas de place pour les entreprises indépendantes en Palestine» se lamente-t-il. «Ils nous écrasent de taxes, mais nous n’avons jamais rien en retour».

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