Une usine pas comme les autres



« On a montré que des travailleurs pouvaient gérer une usine » : la success story des ex-Fralib de Gémenos

Publié le   Mis à jour le 

Il y a près de dix ans, les ex-Fralib devenaient Scopti, après 1336 jours de grève et de lutte contre la multinationale Unilever. Basée à Gémenos, aux portes de Marseille, la coopérative produit toujours du thé et des infusions. Une fierté pour les ouvriers.

Ce n’est pas une usine comme les autres. Située en plein cœur de la Provence, la Scopti produit les thés et infusions sous la marque « 1336 ». Car ici, des salariés ont résisté 1 336 jours pour préserver leur usine. Un conflit social qui a abouti à la création d’une SCOP (Société coopérative ouvrière et participative), une entreprise où tous les employés participent aux décisions et touchent le même salaire par catégories professionnelles.

Près de dix ans après la lutte, les collaborateurs de la Scopti ont une autre vision du travail : « On est concerné par la vie de l’entreprise, on est concernés par les chiffres, les soucis de frais, les frais d’emballage, les expéditions, on a beaucoup plus de réunions pour sensibiliser sur les coûts », témoigne Fabrice Caillol, technicien de production.

1 336 jours de lutte

L’histoire de l’entreprise remonte aux années 1970. Les thés de la marque « Eléphant » étaient alors fabriqués à l’usine Fralib à Gémenos, depuis 1977. Fralib est à l’époque une société du groupe multinational Unilever. Le 28 septembre 2010, Unilever annonce le projet de fermer l’usine de Gémenos et de transférer la production en Pologne. Les salariés et les organisations syndicales CGT et CFE-CGC se mettent alors aussitôt en grève et occupent l’usine, avec pour objectif de maintenir l’activité et ses 182 emplois.

Le 22 août 2011, lors de la campagne présidentielle de 2012, François Hollande vient soutenir les salariés. Devenu président de la République, il reçoit les représentants des salariés à l’Elysée. Au cours de ce long conflit social, l’idée de la création d’une Société coopérative ouvrière et participative germe. Les salariés réclament la cession de la marque « Eléphant » et un accord de sous-traitance avec Unilever.

Finalement, en mai 2014, après trois plans sociaux annulés par la justice et 1 336 jours de conflit, un accord est trouvé. Unilever ne cède pas la marque « Eléphant », mais cède les machines pour un euro symbolique et participe au financement de la création d’une SCOP, la Scopti, à hauteur de 2,85 millions d’euros.

« Un autre monde est possible »

Douze ans plus tard, l’activité de la société se poursuit. Gérard Cazorla a été le premier président de la Scopti. Cinq ans après son départ à la retraite, il vient toujours à l’usine, trois fois par semaine, et se dit fier du chemin parcouru : « On a fait la démonstration qu’un autre monde était possible, que des travailleurs pouvaient gérer une usine, travailler, sortir des productions et mettre une marque sur le marché ».

L’actuel président de la société coopérative gère l’aspect économique tout en privilégiant le côté humain et social dans le quotidien, c’était le principe du départ. « On n’a pas regardé un tableau Excel en se disant : voilà ce qu’on a mis en argent et voilà ce qu’il faut sortir, a déclaré Olivier Leberquier, président de la Scopti. On a d’abord mis au cœur du projet les hommes et les femmes qui ont lutté ».

De nouveaux projets pour 2024

Aujourd’hui, la vente par Internet de toutes les références de 1336 représente 15% du chiffre d’affaires. Après des moments difficiles, la société coopérative devrait, en 2024, voir son volume décoller grâce à un contrat passé avec un opérateur commercial important.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire