INSTRUMENTALISATION
Aurore Bergé, ministre chargée de la lutte contre les discriminations, a annoncé ce week-end sa volonté de retirer leurs subventions aux « associations féministes » qui auraient eu des positions « ambigües » face à l’attaque du 7 octobre en Israël. Une intimidation contre le mouvement féministe.
12 février
Au micro de Frédéric Haziza, accusé d’agression sexuelle, la ministre ouvre ainsi une nouvelle phase d’une offensive entamée il y a plusieurs mois contre les féministes, accusées de « complaisance » avec le Hamas.
On ne peut pas être féministe uniquement quand cela concerne les autres.
Quand on est féministe c'est tous les jours, tout le temps.
Quelles que soient les personnes mises en cause y compris quand c'est un député condamné pour violences conjugales, y compris quand c'est un… pic.twitter.com/wGP1UL8oCe
— Aurore Bergé (@auroreberge) February 11, 2024
Autour de la manifestation du 25 novembre contre les violences faites aux femmes, une campagne pro-Israël avait dénoncé la complicité supposée du mouvement féministe avec le Hamas, allant jusqu’à l’organisation d’un cortège dans la manifestation scandant « Hamas terroriste, féministes complices ». Une provocation relayée de façon complaisante par les médias, affirmant de façon mensongère que ces militantes auraient été empêchées de manifester par des féministes pro-Palestine.
Suite à ces événements, l’ancienne ministre chargé de l’égalité homme-femme, Bérangère Couillard avait déjà menacé à demi-mot de surveiller les associations à l’Assemblée, expliquant à l’Assemblée nationale le 28 novembre ne subventionner que les « associations » qui « partagent les valeurs universelles » et « les orientations du ministère ». Dans le même temps, elle avait également fustigé une « petite partie mais une partie bruyante [du mouvement féministe] », qui se serait « tue » par rapport aux violences sexuelles du 7 octobre. Une menace que met aujourd’hui à exécution Aurore Bergé, avec l’objectif très clair de s’attaquer aux secteurs du mouvement féministes solidaires de la Palestine.
Une ministre spécialisée en politiques réactionnaires et soutiens à l’État d’Israël
Cette déclaration d’Aurore Bergé est à inscrire dans la ligne politique qui est la sienne. Comme le rappelle Orient XXI, Aurore « affiche un soutien constant à la cause israélienne, « préside à l’Assemblée nationale le groupe d’amitié France-Israël » et est historiquement « une proche du courant ultra-laïc du Printemps républicain, qui compte parmi ses partisans d’autres éminents pro-israéliens. ». Dans ce cadre Aurore Bergé fait depuis plusieurs années de la lutte contre les associations qui soutiennent la cause palestinienne un cheval de bataille.
Ainsi, l’ancienne présidente du groupe Renaissance à l’assemblée nationale avait exigé en 2021 le « démantèlement » de l’ONG Amnesty international, parce que l’organisation avait dénoncé une situation d’« apartheid » en Israël. De la même manière, elle s’en serait prise « en septembre 2020, via une question au gouvernement, au financement de la Plateforme des ONG pour la Palestine, dont font partie l’AFPS, la Ligue des droits de l’homme, le Comité catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD-Terre solidaire), et le Secours catholique, trente-neuf associations au total. Bergé accusait la Plateforme d’avoir fait campagne pour dissuader un certain nombre de parlementaires de voter la résolution Maillard” sur l’antisémitisme, l’amalgamant avec l’antisionisme.
L’obsession raciste et autoritaire d’Aurore Bergé ne se cantonne pas à la cause palestinienne, elle a aussi été aux avant-postes de tous les projets d’attaques anti démocratiques, répressifs, islamophobes ou anti-sociaux portés sous Macron. En 2021, tout en approuvant « la proposition de loi du député Les Républicains (LR) très à droite Éric Ciotti visant à interdire le port du voile aux mères accompagnatrices dans le cadre des sorties scolaires, elle déposait avec son collègue de la Creuse Jean-Baptiste Moreau un amendement au projet de loi séparatisme pour « interdire le port de tout signe religieux ostensible par les mineurs dans l’espace public ». Elle est aussi connue pour avoir lancé une commission d’enquête sur les « groupuscules » pendant la bataille contre la réforme des retraites, proféré des menaces contre le droit de grève, ou encore soutenue l’exclusion des hommes trans de la constitutionnalisation de l’IVG.
Une nouvelle offensive face à laquelle le mouvement féministe doit faire front !
A l’heure où Israël lance une nouvelle offensive meurtrière sur Rafah, et après que la Cour internationale de Justice ait reconnu un risque de génocide à Gaza, le procès en « ambigüité » sur le 7 octobre vise à nouveau à faire taire toutes celles et ceux qui s’opposent au génocide en cours. Comme nous le dénoncions en novembre avec Du Pain et des Roses après avoir été attaquées dans différents médias : « Nous dénonçons les violences sexuelles commises le 7 octobre, comme nous avons dénoncé l’ensemble des exactions contre des civils menées ce jour-là. Cependant, nous refusons que le combat féministe serve de prétexte pour invisibiliser, voire légitimer, le massacre en cours à Gaza, criminaliser sa dénonciation et empêcher une convergence entre féministes et soutiens de la Palestine. »
Cette attaque révèle une fois de plus la politique d’instrumentalisation systématique des droits des femmes par le gouvernement. Aurore Bergé est la nouvelle Marlène Schiappa d’un gouvernement qui en matière de lutte contre les discriminations, consolide ses prises de position réactionnaires. Dernièrement, tout en promettant la constitutionnalisation de l’IVG, Emmanuel Macron a ainsi défendu le « réarmement démographique », apporté son soutien infaillible à Gérard Depardieu accusé de violences sexistes et sexuelles par une dizaine de femmes ou interdit le port de l’abaya à l’école. A peine le discours de Macron prononcé sur le « réarmement démographique », Aurore Bergé montait d’ailleurs au créneau annonçant la mise en place d’un « bilan de fertilité » pour tous et toutes à 25 ans.
Face à ces politiques et menaces autoritaires du gouvernement, l’ensemble des organisations, associations et militant-es féministes mais aussi écologistes, politiques, syndicales, anti-racistes, qui continuent de dénoncer la politique de l’Etat d’Israël, de soutenir le peuple palestinien, doivent faire front contre l’ensemble des attaques portées par le gouvernement qui visent à étouffer la contestation sociale. Malgré ces intimidations, le 8 mars 2024, journée internationale de lutte pour les droits des femmes, doit être une nouvelle occasion de défendre un féminisme qui se place résolument du côté de toutes et tous les opprimés et les exploités.
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