Le 2 avril a lieu une nouvelle grève nationale dans l’éducation nationale, cela après déjà les 1er février, 6 février, 19 mars additionnés de grèves qui durent massivement dans le 93 et le 44 et épisodiquement ou localement dans le 94, 95, 75, 76, 64 ou encore dans le 33 avec 19 collèges et de nombreuses écoles en grève en Gironde ce 28 mars mais aussi des grèves parfois à répétition des ouvriers de l’éducation, des cantines, du périscolaire comme dans les 29 collèges de Haute-Garonne en grève illimitée depuis le 28 mars.
Par ailleurs, la grève du 2 avril est déjà annoncée par certains sur trois jours les 2, 3 et 4 avril, un mouvement appuyé par les parents d’élèves de la FCPE qui appellent pour leur part et en soutien aux enseignant et élèves à des journées collèges morts les 3 et 4 avril. Par ailleurs, beaucoup d’enseignants ont des Assemblées Générales à l’issue du 2 avril où ils sont appelés à la reconduction.
Le même jour, le 2 avril, une grève nationale est aussi appelée à la Poste qui pour certains est espérée reconductible, voire illimitée, dans la foulée de la réussie de la grève nationale du 19 janvier accompagnée là aussi par une reprise de multiples conflits locaux actuellement et, ici ou là, la menace de grève lors de la distribution des courriers électoraux pour les élections européennes.
Le 4 avril ce sera la grève à la RATP, conçue comme un avant-goût de la menace du dépôt d’un préavis de grève pour les Jeux Olympiques, en même temps qu’aura lieu également ce jour-là, une grève nationale du travail social et médico-social.
C’est-à-dire que le 4 avril, il peut tout à fait y avoir en même temps une grève d’enseignants, d’élèves et parents d’élèves, une de postiers, une d’agents de la RATP et enfin une de travailleurs sociaux et médico-sociaux. Ce n’est bien sûr pas encore un mouvement d’ensemble mais ça peut en prendre le chemin les semaines et mois prochains. En effet, ces trois journées se placent d’une part dans un mouvement de montée sociale progressive plus générale qui a commencé en janvier 2024 avec paysans, enseignants et cheminots au centre de cette montée et surtout, d’autre part, parce que ce mouvement est habité à proximité des Jeux Olympiques de la possibilité d’une généralisation politique, par ce contexte particulier qui peut conférer un moyen de pression contre le gouvernement et redonner ainsi vie à la haine générale latente qui existe contre Macron amplifiée depuis le printemps dernier dont le souvenir est encore frais par ses dernières mesures contre les retraites et sa méthode autoritaire des 49.3 comme par ses violences contre le mouvement anti-bassines.
Ces journées de début avril prolongent l’ensemble des mobilisations de ces dernières semaines mais, par leur concentration en quelques jours, font monter à ces dernières une marche de plus en permettant de mieux rendre visible à beaucoup la dynamique générale sociale en cours. Les mobilisations des agriculteurs qui continuent depuis janvier comme celles des cheminots depuis janvier également ou encore celles des enseignants depuis février, séparées jusque-là, peuvent être mieux ressenties dorénavant comme faisant partie d’une même révolte.
Mais ce sentiment peut aussi s’incorporer à de multiples autres luttes à venir, qui prolongent elles-mêmes, celles nombreuses mais vécues jusque-là comme émiettées, que ce soit contre des licenciements mais aussi et surtout pour des augmentations de salaires. Ainsi, rien que sur ces derniers jours au niveau le plus significatif, il y a eu le succès historique de la mobilisation chez Auchan les 22 et 29 mars avec plus de 150 sites touchés ; la grève des salariés du champagne notamment chez Veuve-Clicquot qui dure depuis 5 semaines et pourrait s’étendre à tout le secteur ; la grève nationale historique des préparateurs en pharmacie hospitalière le 28 mars organisée autour d’un collectif WhatsApp ; 3 jours de grève nationale chez Fnac-Darty qui a concerné 70 magasins ; une grève nationale chez Orange le 26 mars avec le slogan « pas d’augmentation de salaire, pas de JO » ; la grève des écoles maternelles à Paris le 26 mars ; une grève aussi de 3 jours à partir du 25 mars chez Amazon ; une grève nationale encore dans les stations-service Argedis Total Energies le 22 mars et puis aussi l’hommage à Sainte Soline le 25 mars dans 40 villes qui ravive la mémoire ; les manifestations des retraités pour la journée nationale du 26 mars et surtout, à la SNCF, de multiples grèves locales ou catégorielles qui ont continué ce 25 mars avec la grève pour les salaires suivie à 100% des agents de conduite du transilien après déjà celles des agents de maintenance Eale le 21 mars et auparavant celles des technicentres, des aiguilleurs, des contrôleurs et des agents de la vente, toutes sur un fond de menace de grève pour les JO, ce qui a valu 400 euros de plus aux cheminots sur la paye ce mois de mars. Or, non seulement l’obtention de ces 400 euros ravive l’idée qu’ils seraient nécessaires tous les mois mais peut faire germer l’idée que c’est possible de les obtenir par pression sur les JO – comme l’a déjà exprimé un collectif de conducteurs – tout comme des enseignants manifestent avec des pancartes : « De l’argent pour l’école, pas pour les JO ».
Les JO sont au centre de l’unification politique des mouvements sociaux actuellement éclatés.
En général, toutes les luttes visent d’abord à sauver ce qui est possible dans l’immédiat en fonction de ce que permet le rapport de force et, de ce fait, elles prennent un caractère local ou catégoriel. Mais elles sont aussi toutes habitées – et particulièrement aujourd’hui – de la conscience générale que nous subissons une attaque globale des possédants servis par les gouvernements en place et qu’il faudrait une riposte commune. Or cette conscience latente peut être réactivée et devenir opérante à l’approche des Jeux Olympiques, parce que ces derniers coagulent à une large échelle et de manière opératoire sur le terrain social avec des préavis de grève pour la période, la haine commune ressentie contre Macron et son monde et en font une force.
C’est pourquoi, il nous faut nous emparer de tout ce qui mobilise sur les JO. Il y a par exemple l’appel de la CGT
Commerce et Services à une première mobilisation nationale en vue des JO le 15 avril ou encore l’appel des réseaux sociaux à faire du 1er mai un rassemblement national de pression sur les JO. Et puis les écologistes s’en sont déjà emparé le 27 mars avec la journée de Youth for climate et ne s’arrêteront pas là. Les grèves avec en toile de fond les JO ne manqueront pas, comme déjà celle des contrôleurs SNCF annoncée en mai et celles des ouvriers du bâtiment, comme à Sogea ces derniers jours à Compiègne et auparavant sur différents chantiers ou celles encore des agents de sécurité puisqu’il en manque des milliers à 4 mois des JO, et les préavis de grève des pompiers, des services d’urgence, des agents de l’aérien, des services publics, des musées et Tour Eiffel, des taxis…
Multiplions les préavis de grève pour cette période ou avant, montrons que les travailleurs de première ligne sont essentiels, aussi indispensables pour les JO que pour le covid, que sans eux, rien ne peut se faire, qu’ils peuvent tout arrêter s’ils le veulent. Remettons ainsi, de fait, la classe ouvrière et ses revendications au centre de la situation et de l’agenda politique en bousculant par la même occasion la prégnance sur le moment et sur le moral, du succès annoncé de l’extrême-droite aux élections européennes. La montée sociale actuelle sur fond de menace politique sur les JO de Macron et son monde peut bousculer l’ambiance des mois à venir et modifier à nouveau le rapport de force général et cela d’autant plus si les forces de gauche ou d’extrême-gauche voulaient utiliser la tribune des élections pour renforcer ce courant ascendant… mais ne rêvons pas trop à ce niveau. Il faudra que le mouvement vienne d’en bas. C’est tout à fait possible, puisqu’il est déjà en route. Il lui faut certes encore s’amplifier en multipliant les préavis de grève pour la période des JO ou avant et en faisant d’ores et déjà des 15 avril et du 1er mai des succès : de l’argent pour des hausses de nos revenus, pas pour les JO ; pas d’augmentations de salaire pas de JO ; du fric pour la fonction publique, pas pour les Jeux Olympiques !
Nous pouvons renverser le rapport de force. Alors, allons-y !
Jacques Chastaing, 31 mars 2024
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