DU PASS SANITAIRE AU PASS OLYMPIQUE.
Normalisation d’un dispositif de contrôle de masse.
Été 2021, après un troisième confinement national entre avril et mai, et 6 mois de couvre-feu absurde, la France entre dans une période nouvelle. Comme ses voisins européens, le green pass en Italie, Covid free GR en Grèce, le Grüner Pass en Autriche, tout comme une vingtaine de pays du continent, le gouvernement français met en place le pass sanitaire. D’abord pour se rendre dans de grands événements (plus de 1000 personnes), puis rapidement dans les bars, cinémas, théâtres, établissements sportifs, bowlings et musées, entre autres. En quelques semaines, partout en Europe, nous passons d’un modèle disciplinaire: couvre-feu et confinement, à un modèle de contrôle.
UN MONDE DE QR CODE
Cette séquence amène dans notre vie quotidienne l’idée que nous devons obtenir une autorisation, et donc répondre à des critères, pour rentrer dans des lieux accueillant du public. C’est la validation de nos déplacements, par le biais d’un QR code scanné. Le choix du QR code n’est pas anodin, il est au cœur de la stratégie chinoise de tracking de la population et de la mise en place du « crédit social ». Le « bon citoyen », celui qui respecte à la lettre les obligations que lui impose le régime, peut avoir accès à certains droits (travail, déplacements, loisirs, logements, santé, crédits), par le biais de son autorisation QR codé. Le « mauvais citoyen », dont la note sociale est trop faible, se voit désactiver ses droits.
En France et partout dans le monde, les QR codes ont envahi les espaces : Carte de restaurant ou de bar, flyers, publicités, informations au musée, promo au supermarché, il est possible de scanner des QR codes partout. C’est simple, rationnel, efficace. Un dispositif parfait pour qu’il soit repris par les états et le capital.
Hier, la question se posait sur une pandémie. Aujourd’hui sur les « J.O ». Le pass qui apparaît au moment d’événements « exceptionnels » est en bon chemin pour devenir la « règle ». Ce n’est pas prophétique, c’est la suite logique des choses.
La mise en place d’un « pass olympique » n’est que la continuité du projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, voté le 23 mars dernier par l’Assemblée nationale, qui offrait la possibilité d’utiliser la vidéosurveillance algorithmique, avant, pendant et après les Jeux pour le traitement des images enregistrées par des caméras ou des drones. Cette loi est elle-même la continuité de la loi sécurité globale, elle-même la continuité de la loi anti-casseurs, elle-même la continuité… Au total, depuis l’arrivée de Macron au pouvoir, c’est une dizaine de lois qui ont permis de renforcer et généraliser le contrôle de masse. État d’urgence dans le droit commun, généralisation de la vidéo-surveillance, pass sanitaire, loi asile et immigration ou sur les séparatismes. Toutes ces lois ont les mêmes objectifs finaux. Ils élargissent les pouvoirs de la police, et de la surveillance généralisée.
RÉGIME DE VERITE, VIGILANCE & STOÏCISME.
La mise en place de ces pass (car il faut désormais en parler au pluriel), produit plusieurs choses:
1/ Techniquement : Le pass est un outil de traçage des déplacements, de surveillance et de contrôle de masse.
2/ Philosophiquement : C’est une doctrine moraliste permettant de définir le bien et le mal, le bon et le mauvais citoyens, par le biais de validation.
3/ Socialement et économiquement : Le pass permet de ne pas être prêt. De la même manière que l’hôpital n’était pas prêt pour la pandémie faute de moyens, ce qui a justifié les mensonges sur le masque, les confinements et le pass sanitaire, Paris n’est pas prêt pour les J.O. Empêcher les gens de se rendre dans une zone géographique permet par exemple de désengorger des transports en commun laissés à l’abandon depuis des années.
Ce cocktail provoque de la précarité, de la paranoïa, de l’individualisme, une fausse vérité, une vie de programmation, et fait basculer un monde dans tout autre chose : La société de vigilance qui est l’avènement du contrôle de tous par tous, partout et tout le temps (voisins vigilants, vidéosurveillance algorithmique dont la reconnaissance faciale, les passes numériques, les drones) Cette société de vigilance prend les traits d’une société de bienveillance. Le pass sanitaire c’est pour « votre bien » pour ne pas être contaminé. Le pass olympique c’est pour le « bon » déroulement des J.O. La vidéosurveillance c’est de la « vidéo-protection » etc.
C’est une entreprise organisée de stoïcisme : le stoïcien s’exerce à avaler des cailloux et des vers, des tessons et des scorpions, et cela sans en avoir le dégoût; son estomac doit finir par être indifférent à tout ce qu’on nous offre.
Voilà ce que l’Humain est en passe de devenir. Insensible, indifférent, stoïque.
Aussi, il n’est pas insensé que demain, l’État, ou même des entreprises privées, qui auront acheté des zones, des quartiers, des rues, mettent en place ce genre de dispositifs pour autoriser ou non les gens à accéder dans leurs zones. C’est la projection que fait Alain Damasio dans son roman les furtifs. Les villes, en faillite, ont été rachetées par les grandes entreprises et leurs noms se sont vus associés aux grands groupes qui les possèdent désormais. « Paris-LVMH » et « Nestlyon » sont devenues ultras-sécurisées, ultra-contrôlées par les milices en tous genres, la gentrification poussée à son paroxysme a sectorisé les quartiers, auxquels on ne peut accéder parfois que si l’on est doté de l’abonnement Premium ou Privilège… Des bagues bourrées de technologie tracent nos vies, nos désirs, nos envies, et les êtres sont de plus en plus isolés. La société est devenue safe, sécurisée, et chacun vit dans un cocon rassurant.
Bientôt, peut-être, il faudra avoir payé un abonnement « VIP citizen » à une entreprise comme Total ou LVMH, et dont le montant évoluera en fonction de votre note sociale, pour pouvoir se faire une balade au bord de la seine. Le stoïcisme des hommes s’accommodera de cette nouvelle couleuvre à avaler. C’est une nouvelle forme de société qui s’ouvre, celle du VIP, du laisser-passer
« Que la passion est meilleure que le stoïcisme et la simulation, qu’être sincère, même dans le mal, vaut mieux que de se perdre soi-même dans la moralité de la tradition, qu’un homme libre peut être bon autant que méchant, mais qu’un homme assujetti est une honte pour la nature et ne participe à aucune consolation, ni divine, ni terrestre; et enfin, que chacun de ceux qui veulent devenir libres ne pourra le devenir que par lui-même, et que la liberté ne tombe dans le sein de personne comme un présent miraculeux. » Richard Wagner
« Notre vie est-elle vraiment assez douloureuse et assez odieuse pour l’échanger avec avantage contre le stoïcisme d’un genre de vie pétrifié? Nous ne nous sentons pas assez mal pour devoir nous sentir mal à la façon stoïque! » Friedrich Nietzsche
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