Article rédigé par franceinfo avec AFP
Les tirs résonnent encore à Goma. Depuis le dimanche 26 janvier, cette grande ville de l’est de la République démocratique du Congo est le théâtre d’affrontements tragiques. Au moins 17 personnes ont été tuées et 367 autres blessées ces deux derniers jours, selon les bilans de plusieurs hôpitaux. Deux camps s’opposent dans cette cité de plus d’un million d’habitants et presque autant de déplacés : le groupe paramilitaire M23 et l’armée congolaise. Alors qu’une nouvelle réunion du Conseil de sécurité de l’ONU doit se tenir dans la journée, la Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco) ainsi que la force de la Communauté de développement d’Afrique australe sont « engagés » dans des combats « intenses » contre le M23. Mais qui sont ces combattants et par qui sont-ils soutenus ? Franceinfo vous explique.
Issu d’une ancienne rébellion tutsie
Le Mouvement du 23 mars (aussi appelé M23) a vu le jour en 2012 après une mutinerie d’anciens rebelles tutsis du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) intégrés au sein de l’armée congolaise. A l’époque, ces rebelles reprochaient à Kinshasa de ne pas respecter les modalités d’un accord signé avec le CNDP le 23 mars 2009. En plus de leur insertion dans l’armée, les clauses du contrat devaient aussi permettre aux rebelles de garder le contrôle sur leur principale source de revenus : l’exploitation de minerais dans la région du Nord-Kivu. La zone est particulièrement riche en ressources naturelles comme le coltan, l’or et la cassitérite.
Entre juillet et décembre 2012, la ville de Goma a ainsi déjà été le théâtre d’affrontements entre le groupe armé M23 et les forces congolaises. Puis, fin 2013, à Nairobi, le M23 et Kinshasa avaient signé un nouvel accord de paix. L’objectif était d’ouvrir la voie au rapatriement des combattants de l’ex-rébellion en vue de leur réinsertion dans la vie civile. Une opération qui n’a jamais abouti. Et depuis novembre 2021, le M23 a repris les hostilités en République démocratique du Congo.
Soutenu par le Rwanda voisin
Surtout, le M23 n’agit pas seul : dans ses rapports, l’ONU a plusieurs fois démontré que le Rwanda est un acteur du conflit aux côtés du groupe paramilitaire congolais. Pour la RDC, les raisons sont notamment économiques et Kigali voudrait faire main basse sur les richesses en minerais. Selon les Nations unies, plus de 4 000 soldats rwandais(Nouvelle fenêtre) sont ainsi déployés dans le pays.
Sauf que le gouvernement du Rwanda a toujours nié son implication. Dans un communiqué, Kigali a réaffirmé dimanche que le M23 est un problème congolais : « Il est important de rappeler que la résurgence du M23 fin 2021 n’a pas eu lieu au Rwanda, même si le gouvernement de la RDC a fait du Rwanda un bouc émissaire, alors que la communauté tutsie congolaise, que le M23 représente, est confondue avec le Rwanda. »
Le 15 décembre, les présidents congolais Félix Tshisekedi et rwandais Paul Kagame devaient par ailleurs se rencontrer à Luanda (Angola) pour des pourparlers de paix. Mais les deux parties n’ont pas réussi à s’accorder sur les termes, provoquant l’annulation du sommet à la dernière minute. Depuis, la progression du M23 a encore été fulgurante, jusqu’à l’assaut de Goma dimanche. Il est encore difficile de dire quelles parties de la ville sont déjà tombées aux mains du M23 et de l’armée rwandaise.
Accusé d’exactions sur des civils
Au-delà des combats qu’il mène contre les soldats de l’armée congolaise, le M23 est depuis longtemps accusé d’exactions visant les populations locales. Dans un rapport publié en juin 2023, Human Rights Watch(Nouvelle fenêtre) dénonçait notamment « des meurtres, des viols et d’autres crimes de guerre manifestes dans l’est de la République démocratique du Congo » commis par les rebelles congolais et les soldats rwandais.
Des faits similaires ont aussi été dévoilés par Amnesty International(Nouvelle fenêtre). En novembre 2022, « des combattants du groupe armé M23, soutenu par le Rwanda, ont exécuté sommairement au moins 20 hommes et violé au moins 66 femmes et filles », dans un village de Nord-Kivu, révèle l’ONG.
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