Retraites : Bayrou propose une arnaque pour faire passer son plan austéritaire et raciste

Coupes budgétaires, attaques contre les travailleurs et les étrangers : la déclaration de politique générale de Bayrou a montré l’étendue de l’offensive qu’il entend mener. Pour cela, il compte sur l’organisation d’un « conclave », un cadre de dialogue social sur les retraites, qui vise à draguer le PS et les bureaucraties syndicales.

Joachim Bertin

14 janvier

Crédit photo : capture d’écran AFP

Après la chute de Michel Barnier en décembre, c’est au tour de François Bayrou de tenter d’imposer une austérité brutale aux travailleurs sans être censuré. Ce mardi, le nouveau Premier Ministre a ainsi tenu sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale en évitant d’annoncer une seule mesure précise, par peur d’obliger le PS et le RN, qui se montrent prêts à travailler avec le gouvernement, à montrer les muscles.

Un plan austéritaire et raciste : Bayrou poursuit l’œuvre de Macron

Après l’échec cuisant de Michel Barnier, Bayrou a décidé de réduire un tout petit peu la voilure en affichant l’objectif d’un déficit de 5,4% du PIB en 2025 (contre 5% dans le budget Barnier). Une évolution minime qui, débarrassée d’une partie des mesures cosmétiques visant les plus riches, pèsera d’autant plus contre le service public et les collectivités territoriales, dont le budget sera haché de 2,2 milliards d’euros. De fait, la fonction publique sera en première ligne des attaques austéritaires, tandis que Bayrou promet une « débureaucratisation » qui annonce le détricotage de régulations sociales. L’absence de toute annonce sur l’Education Nationale, menacée dans le précédent budget de subir 4000 suppressions de poste, a été remarquée par les enseignants derrière l’écran de fumée de la déclaration d’amour de Bayrou à l’école.

Si le budget des hôpitaux devrait être très légèrement redressé par rapport au budget de Barnier, et les baisses de prise en charge par la sécurité sociale annulées, ces mesures maintiennent l’austérité dans un hôpital et une sécurité sociale déjà exsangues et masquent difficilement une austérité sans précédent, cédant tout pour le patronat. Bayrou a ainsi mis un point d’honneur à rassurer les patrons qu’ils ne subiront pas de hausse trop forte d’impôts ou de cotisation. Selon Les Echos, la taxation du capital (flat tax) n’augmentera pas, tandis qu’une surtaxe de l’impôt sur les sociétés aura lieu en 2025 mais pas en 2026. De quoi contenter macronistes, LR et lepénistes et les actionnaires du CAC40 qui ont reçu, au titre de 2024, 100 milliards d’euros de dividendes !

Un projet anti-ouvrier qui s’accompagne de mesures racistes, Bayrou draguant ouvertement le RN dans son discours. En s’appuyant sur la situation à Mayotte, où Manuel Valls et l’extrême droite locale profitent de la catastrophe du cyclone Chido pour mener une offensive raciste contre les immigrés, François Bayrou a revendiqué davantage de contrôles à l’immigration : « L’installation d’une famille étrangère dans un village pyrénéen ou cévenol, c’est un mouvement de générosité qui se déploie […]. Mais que trente familles s’installent et le village se sent menacé. Le désir, après tout respectable, de se sentir chez soi est mis à mal. Tout cela est humblement humain. Et affaire de bon sens, que je revendique. » Une surenchère xénophobe qu’il compte mener en réactivant « le comité interministériel de contrôle de l’immigration ».

Revendiquant au passage l’action « ferme » du ministre de l’Intérieur Retailleau, Bayrou a ainsi rappelé, que s’il a flirté avec le PS autour de la question des retraites ces derniers jours, il compte bien être à l’écoute du RN. Dans le même sens, le Premier ministre a en proposé des économies sur les agences indépendantes de l’Etat que le RN avait pris comme cible pour faire des économies.

L’arnaque des retraites avec la complicité du PS

Au-delà de l’offensive générale, les annonces de Bayrou sur les retraites étaient très attendues. Ces derniers jours, le Premier ministre et le PS négocient en effet un accord de non-censure en échange de concessions sur le sujet et d’une « suspension » du décalage de l’âge légal, qui atteindra 63 ans en septembre 2025. Finalement, Bayrou s’est contenté d’annoncer l’organisation d’un « conclave » de trois mois, réunissant les « partenaires sociaux » pour étudier des pistes de financement alternatives.

Une arnaque qui vise à ramener les organisations syndicales à la table du dialogue social pour négocier. Une discussion qui devra, comme d’habitude, s’assurer de ne pas toucher aux profits du patronat. Et si cela n’aboutit à rien, comme c’est le plus probable, la réforme de Borne continuera à s’appliquer. Si ces annonces pitoyables n’ont pas été suffisantes pour amadouer EELV et le PCF qui comptent censurer Bayrou – malgré leur participation aux négociations, le PS n’est pas encore enclin à censurer le gouvernement, préférant se donner jusqu’à jeudi pour sauver ces négociations sur le retraites. « Nous posons des questions au Premier ministre nous sommes prêts à négocier à nouveau. Le compte n’y est pas aujourd’hui mais la porte n’est pas fermée », a ainsi pointé le député Arthur Delaporte. Du côté du RN, cet énième plan austéritaire n’empêche pas l’extrême-droite de rejouer la carte de la responsabilité, en écartant toute perspective de censure.

Bayrou est fragile : aucun dialogue avec le gouvernement et le patronat, il faut les affronter !

Si Bayrou pourrait bénéficier d’un répit, lui et son gouvernement de revenants de la Vème République sont voués à tomber. D’ici là, ils tenteront de mener les mêmes attaques anti-ouvrières et racistes que le gouvernement Barnier. Malgré cela, les bureaucraties syndicales se montrent déjà ouvertes au « dialogue social ».

Sur BFM, Yvan Ricordeau de la CFDT expliquait ainsi ce mardi : « on a un nouveau rendez-vous, une opportunité, et la CFDT va s’en saisir […] Pour la première fois on a l’opportunité d’améliorer le système de retraites ». Du côté de la CGT, si Sophie Binet rappelait hier soir que son objectif était l’abrogation de la réforme, elle appelait également Bayrou à geler la réforme et ouvrir une conférence de financement, rappelant que « cela fait deux ans que la CGT demande à organiser une conférence de financement pour faire entendre les propositions alternatives au report de l’âge de départ ». La porte est ouverte.

Cette attitude scandaleuse doit être dénoncée largement par les bases syndicales. Alors que les plans de licenciement, la répression contre les syndicalistes (majoritairement CGT, mais qui frappe peu importe la couleur du chasuble) et l’austérité nous touchent de plein fouet, il n’y a rien à négocier avec Bayrou et les patrons. Participer au « conclave », c’est donner de l’oxygène à un gouvernement dont la mission est d’imposer un plan austéritaire brutal.

Face à la crise de l’emploi, des services publics, seul un programme ouvrier pour interdire les licenciements, augmenter les salaires et partager le temps de travail pourra régler la situation. Il faut faire payer les capitalistes, pas essayer de négocier des miettes avec eux. Mais les travailleurs doivent aussi apporter des réponses à la crise politique et démocratique qui se poursuit. La fragilité de Bayrou pourrait rapidement rouvrir la crise de régime, mais si les travailleurs ne portent pas des coups mortels à la Vème République, elle ne mourra pas d’elle-même, les classes dominantes trouveront le moyen de régler la crise politique à leur avantage.

Ce champ est nécessaire.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*