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Pour la 3e journée consécutive, les affrontement redoublent d’intensité dans le Donbass, où les bombardements ont connu samedi leur plus haut niveau d’intensité depuis plusieurs années. L’administration américaine s’attend à une attaque russe d’un jour à l’autre, et l’Allemagne et la France ont demandé à leurs ressortissants de quitter l’Ukraine. Ce dimanche matin, le président Macron s’est entretenu avec ses homologues russe et ukrainien.
Une nouvelle tentative pour trouver un terrain d’entente, c’était le propos d’Emmanuel Macron, président en exercice de l’Union européenne, qui a eu un long entretien téléphonique avec son homologue russe Vladimir Poutine ce dimanche ; puis avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Le premier entretien, qui a débuté à l’heure prévue, 10h (TU) a duré près de deux heures. Après leur rencontre du 7 février à Moscou, cette discussion entre les dirigeants français et russe constituait « les derniers efforts possibles et nécessaires pour éviter un conflit majeur en Ukraine », avait souligné l’Elysée.
Parallèlement la conférence de Munich sur la sécurité, largement consacrée au conflit en Ukraine, se termine ce dimanche. Ce dimanche matin, Charles Michel, président du conseil européen, s’est interrogé sur l’opportunité de continuer à offrir un « rameau d’olivier » à la Russie.
Bien sûr, la grande question qui demeure c’est : est-ce que le Kremlin veut vraiment le dialogue ? Il y a quelques jours, ses déclarations offraient une petite lueur d’espoir, mais on assiste à un renforcement militaire continu avec de grave incidents dans le Donbass, y compris aujourd’hui… nous ne pouvons pas éternellement offrir un rameau d’olivier alors que la Russie effectue des tests de missiles et continue d’amasser des troupes
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Et outre-Atlantique, le président Biden doit réunir son conseil national de sécurité en fin de journée ce dimanche.
Violations incessantes du cessez-le-feu
Le niveau d’activité militaire n’a jamais été aussi élevé depuis plusieurs années, rapporte ce dimanche matin Stéphane Siohan notre envoyé spécial à Severodonetsk, dans la région de Lougansk, non loin de la ligne de front. Et ce constat est confirmé par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l’OSCE, qui a enregistré rien que pour la journée d’hier près de 2 000 violations du cessez-le-feu, c’est deux fois plus que pour la journée de vendredi, et de mémoire de correspondant, on n’a pas vu dans le Donbass de tels bombardements depuis 2017. La zone la plus touchée se trouve dans la partie nord-ouest de la région de Lougansk, à environ 20 kilomètres au sud-est de la ville de Severodonetsk précisément, contrôlée par les forces de Kiev.
L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe est régulièrement citée dans les articles couvrant le conflit. Elle exerce une mission de contrôle depuis le début du conflit en 2014 (annexion de la Crimée par la Russie en mars 2014 et tensions dans la partie orientale de l’Ukraine) puis de veiller à l’application des accords de Minsk de 2015. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a rendu hommage samedi 19 février au travail de l’OSCE, dont les observateurs jouent un « rôle clé » pour vérifier ce qui se passe sur le terrain dans un contexte de manipulation de l’information pour justifier une escalade militaire selon les Occidentaux, comme les vidéos antidatées des leaders séparatistes ou les accusations de génocide sur la population d’Ukraine orientale. « L’Union européenne s’inquiète au plus haut point que des événements mis en scène puissent servir de prétexte à une possible escalade militaire », a déclaré Josep Borrell dans un communiqué.
Notre correspondant en Ukraine a pu se rendre samedi dans la petite ville de Schastya, une bourgade qui a connu des combats féroces en 2014 et 2015. Cela faisait cinq ans que la ville n’avait pas connu de bombardements, et au moment où il s’y trouvait, les forces séparatistes pro-russes ont tiré des obus de 152 mm sur les positions ukrainiennes proches de la ville, raconte-t-il. De manière générale, c’est toute la ligne de front qui s’enflamme. La nuit dernière, des échanges d’artillerie nourris ont résonné jusqu’au coeur de Donetsk, la capitale séparatiste, et dans le Donbass, on craint forcément un emballement dans les heures ou jours à venir.
Lassitude des habitants
Quant à l’état d’esprit des habitants qu’il a rencontré, notre envoyé spécial à Severodonetsk – qui couvre la guerre du Donbass depuis ses débuts en 2014 – a pu observer un mélange d’inquiétude réelle, une forme d’apathie, mais également une extrême résilience de la part des habitants de la région.
Les Ukrainiens de l’est sont aux prises avec cette guerre depuis désormais huit ans, les bombardement ne sont pas quelque chose de nouveau pour eux. Son impression est que pendant que le cardiomètre de l’Europe s’emballe, les locaux font preuve d’une grande placidité. Pas d’affolement, les commerces sont ouverts, les cafés à Severodonetsk font le plein le samedi soir, mais quand on prend le temps de discuter avec eux, tous les habitants le disent : ils éprouvent une lassitude abyssale et se demandent quand ils vont enfin pouvoir vivre en paix. Et aux dernières nouvelles, ce n’est pas pour demain.
Deux soldats tués, un ministre échappe à des tirs d’obus
Signe de la recrudescence des violences, des obus de mortier ont explosé près du ministre ukrainien de l’Intérieur, Denys Monastyrsky, pendant son déplacement sur la ligne de front samedi. L’incident n’a pas fait de blessés et le ministre, portant un gilet pare-balle et un casque a estimé plus tard que c’était l’armée ukrainienne, et pas lui personnellement, qui était visé. Le ministre tenait à démontrer à des journalistes le niveau de préparation de l’armée ukrainienne en leur faisant visiter les tranchées.
L’armée ukrainienne a par ailleurs fait état de deux soldats tués et quatre autres blessés dans les bombardements samedi, pire bilan quotidien depuis des mois. L’un d’eux, Anton Sydorov, un capitaine de 35 ans, père de trois enfants, a été tué dans la matinée par un éclat de missile d’artillerie près de la Novolouganské. « La situation est encore pire qu’hier […] Ça tire à l’aide d’armes interdites, des obus de calibre de 152 mm sont tombés près de la ville », confie un soldat ukrainien de 26 ans posté près de cette localité. Cette ville, à seulement trois kilomètres des positions séparatistes, est une de ces zones grises située en plein No man’s land.
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