Gilets jaunes: le procureur de Paris demande de maintenir la garde à vue sans motif

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FRANCE

Le procureur de la République de Paris Rémy Heitz vient de justifier par écrit une mesure d’exception demandée à ses magistrats: le maintien en garde à vue des manifestants contre lesquels aucune charge n’a pu être retenue, a révélé Mediapart.

Rémy Heitz, procureur de la République de Paris, a justifié avoir transmis une «fiche pratique» aux magistrats du parquet pour maintenir en garde à vue les manifestants ayant bénéficié d’un classement sans suite, annonce Mediapart se référant à un courrier de M.Heitz au Syndicat des avocats de France que le média a consulté.

«Les levées des gardes à vue doivent être privilégiées le samedi soir ou le dimanche matin afin d’éviter que les intéressés grossissent à nouveau les rangs des fauteurs de troubles», a-t-il écrit dans une note intitulée «Note permanence gilets jaunes», dont la teneur a été révélée par Le Canard enchaîné, fin janvier.

Mediapart qualifie cette recommandation d’«ubuesque et parfaitement illégale».

Dans la lettre au syndicat, le procureur s’appuie sur l’article 62-2 du code de procédure pénale qui précise qu’une garde à vue doit permettre de «garantir la mise en œuvre des mesures pour faire cesser un crime ou un délit» et juge que «l’orientation générale de maintenir ces personnes en garde à vue tant que ces rassemblements (groupements) ne sont pas terminés apparaît de nature à garantir la cessation d’un délit et s’inscrit donc dans la lettre du texte».

«Le maintien en garde à vue de ces personnes est ainsi encadré juridiquement», écrit-il, en dépit du fait que la procédure soit close par un classement sans suite, faute d’éléments.

Les avocats du syndicat ont dénoncé des détentions arbitraires. «C’est une atteinte très grave à une liberté fondamentale. Le procureur de Paris assume la détention arbitraire, alors qu’il est censé être le garant du bon déroulement de la garde à vue. Il incite à une pratique illégale, alors qu’il doit faire le contraire», a commenté Laurence Roques, présidente du Syndicat.

Selon la présidente du SAF, les manifestants victimes de cette méthode, ouvertement revendiquée par le procureur, sont fondés à déposer plainte. Dans sa réponse, le procureur a toutefois tenu à préciser que sa «Note permanence gilets jaunes» n’était pas «une note d’instruction», mais «une fiche pratique destinée à rappeler les orientations générales à tenir, sous réserve de l’appréciation de chaque magistrat d’astreinte».Ces révélations interviennent sur fond d’adoption de la loi anticasseurs par le Sénat. Le Sénat a examiné et adopté mardi ce projet de loi contesté par plusieurs groupes parlementaires notamment pour la possibilité donnée de fouiller des sacs et véhicules dans les manifestations, le pouvoir donné au préfet de prononcer des interdictions de manifester et la création d’un délit de dissimulation du visage.

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