Confinement : les cités difficiles n’ont pas craqué

Un mois après le début du confinement, les renseignements constatent que les quartiers sensibles restent calmes, malgré un relâchement et quelques tensions ces derniers jours.

Pendant ce premier mois de confinement, les services de renseignement notent que les incidents ont été « limités ». LP/D.L.
leparisien.fr

Le 11 avril 2020

C’était une vraie crainte au sommet de l’Etat : le confinement allait-il être bravé dans les quartiers sensibles et entraîner des violences urbaines? Après un mois, les services de renseignements dressent un bilan plutôt positif du premier mois de confinement, dont le prolongement, annoncé par l’Elysée mercredi, sera précisé par Emmanuel Macron lundi soir. « La situation dans les quartiers sensibles reste globalement calme », et les incidents « limités », précisent les renseignements territoriaux dans des notes que nous avons pu consulter.

« C’est un mystère pour certains observateurs, admet un haut fonctionnaire en poste dans le 93. Dans le département le plus peuplé de France, où plus d’un tiers de la population a moins de 25 ans et où l’on a parfois l’esprit contestataire, certains s’attendaient à ce que le confinement soit moins respecté, ce n’est pas le cas. En Seine-Saint-Denis, les lignes de métro et de bus sont fréquentées, mais par des gens se rendant sur leur lieu de travail : agents d’entretien, aides-soignantes, agents d’exploitation, vigiles… »

Depuis quelques jours, selon les renseignements, le respect du confinement semble toutefois s’éroder et « une tendance au relâchement est parfois observée » dans certains quartiers. « Depuis l’évocation d’un déconfinement, ils pensent que la majeure partie de la crise est derrière eux », notent les renseignements, qui citent le quartier Drouot à Mulhouse (Haut-Rhin), où, depuis quelques jours, « les habitants invoquent des prétextes variés afin de se déplacer ».

« Afin de contourner les mesures de confinement, certains utilisent plusieurs attestations dérogatoires, avec des motifs différents, leur permettant de multiplier les sorties tout au long de la journée. Ce contournement serait facilité par l’emploi d’attestations numériques », écrivent les renseignements à propos de « l’état d’esprit de la population. »

« La seule présence des policiers suffit à mettre fin à ces rassemblements improvisés »

Les conditions de vie difficiles des habitants des quartiers de reconquête républicaine (QRR) – « quand on vit à cinq ou six dans un logement de 30 m2 les journées sont longues », admet un haut fonctionnaire du 93 – entraînent ainsi, depuis quelques jours, « des regroupements de jeunes, favorisés par une météo clémente et une lassitude de l’isolement ».

Des matchs de foot ou des concerts sauvages ont par exemple été constatés dans des quartiers de Grigny (Essonne), Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) ou Amiens (Somme). Des rassemblements ont aussi été observés à Rennes (Ille-et-Vilaine) ou encore à Brest (Finistère). « Dans la majorité des cas, la seule présence des policiers suffit à mettre fin à ces rassemblements improvisés », notent les renseignements.

Malgré un contexte globalement apaisé, les renseignements déplorent toutefois des rassemblements « parfois liés à des activités d’économie souterraine » et constatent que « la présence policière, notamment dans certaines cités sensibles, suscite localement des tensions. »

Un jeune verbalisé 12 fois en Côte-d’Or

C’est notamment le cas à proximité des habituels « points de deal ». « Les irréductibles, ceux qui font chier à longueur d’année, continuent à faire chier », résume un policier en poste dans un quartier sensible d’Ile-de-France.

« Une partie de la population juvénile, souvent liée à l’économie souterraine, continue de défier l’autorité », expliquent de manière plus policée les renseignements, prenant l’exemple d’un jeune de Chenôve (Côte-d’Or) verbalisé depuis le 17 mars à… 12 reprises.

Un département fait toutefois exception à ce bilan plutôt positif : les Yvelines, où la situation « reste tendue » après « des incidents sérieux relevés ces derniers jours à Chanteloup-les-Vignes, Mantes-la-Jolie et Sartrouville ». Toutefois, loin de crier à un embrasement, les renseignements rappellent que ces secteurs sont « traditionnellement très impactés par les violences urbaines ». Confinement ou non.

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