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Reportage
Rave party à Redon : «Les flics ont le seum* parce qu’ils n’ont pas réussi à nous empêcher de faire la fête»
*Avoir le seum signifie « avoir la haine, être dégoûté, avoir la rage, avec un sentiment de frustration ».
Après des heurts dans la nuit de vendredi à samedi, qui ont fait plusieurs blessés, les teuffers ont réussi à installer leur fête dans les environs de cette commune tranquille d’Ille-et-Vilaine. Et des jeunes ont afflué en masse pendant la journée, tentant de couper à travers les champs et le cordon de sécurité.
par Marine Dumeurger
«A l’intérieur, c’était la guerre»
A un des barrages, Maxime, originaire du Loir-et-Cher, bouteille de bière à la main, essaye de négocier un passage auprès des gendarmes pour récupérer son «camtard». Il tente : «Je dois rentrer chez moi, je bosse lundi». Le petit groupe, la vingtaine en moyenne, tourne depuis 7 h 30 du matin dans le quartier. Il a passé la nuit sur place. «A l’intérieur, c’était la guerre, les lacrymos, les grenades. On a dû sortir prendre l’air mais là, on voudrait retourner pour nos affaires. Beaucoup de gens ont tout laissé là-bas, leurs voitures, leurs sound-system».
Finalement l’un d’entre eux est autorisé à s’y rendre. «Vous êtes sympas vous les bleus. Vos collègues, là-bas, vraiment moins». A quelques mètres de là, en direction du site, nouveau barrage, celui des CRS cette fois-ci. Les jeunes s’amassent mais il n’y a plus de possibilités de discuter. Parmi le groupe, un livreur attend, boite de pizza en main. Impossible pour lui de franchir le cordon pour honorer la commande qui refroidit.
Alors devant le blocage, tous les moyens sont bons pour rejoindre la zone et faire la fête. Suivre le canal, couper par les champs, traverser la voie ferrée, ou même tenter de franchir la rivière de l’Oust à la nage. Atteindre la rave prend des allures de mission commando. Croisée au beau milieu d’un champ marécageux, sous une pluie lourde et grasse, Barbara s’apprête à passer la voie ferrée seule après avoir franchi des fourrés de ronces. «Au point où j’en suis, rien ne m’arrête, j’ai traversé le canal, les marais».
Un peu plus loin, un buisson bouge, sans doute des teufeurs. Ou des gendarmes. Au bord de la départementale, un groupe de six jeunes cherche aussi à s’y rendre, sans connaître l’endroit exact. Ils viennent d’arriver, «prévenus par des potes». Repérés par un camion de CRS, ils attendent, postés dans les buissons. «Les flics ont le seum parce qu’ils n’ont pas réussi à nous empêcher de faire la fête, lâche un d’entre eux. Mais nous, on n’en peut plus. Ça fait plus d’un an qu’on est confinés. On va craquer». Peu à peu, le petit groupe grossit, rejoint au compte-gouttes par de nouveaux candidats à la traversée.
A vélo électrique, Emilie, elle, arpente les rues. Elle aimerait aussi retourner dans la teuf après y avoir passé la nuit mais n’y parvient pas, malgré son deux-roues qui laisse à penser qu’elle est du coin. «Je me fais toujours stopper à un moment». La quarantaine, cette ancienne du milieu défend la fête libre. «L’Ouest de la France, c’est la capitale de la teuf. Près de Redon, il y a eu des supers technivals par le passé.» Et toujours de la répression. Mais pas de cette ampleur. «Là, c’est vraiment plus l’ambiance […] Quand je suis arrivée cette nuit, j’ai pris des gaz à gogo, j’ai dû quitter les lieux». Sur son téléphone, elle reçoit des messages de copains, de Brest, de Saint-Nazaire, qui sont en chemin «par solidarité».
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