VENDANGES SURPRISES : LES SOULÈVEMENTS DE LA TERRE S’INVITENT CHEZ BERNARD ARNAULT

🍇 VENDANGES SURPRISES : LES SOULÈVEMENTS DE LA TERRE S’INVITENT CHEZ BERNARD ARNAULT 🍷
Nous relayons ici une vidéo d’action des soulèvements de la terre et de la Confédération Paysanne ainsi qu’un texte explicatif qui décrit cette journée d’action.
« Ce dimanche 28 août, 300 personnes ont investi dans le Var une parcelle de vignes du chateau d’Esclans accaparée par le groupe LVMH dirigé par le milliardaire Bernard Arnault.
Deux convois différents se sont rejoints au pied des rangs en chantant « Ô Bernard Arnault, espèce de blaireau, on vient vendanger chez toi ! » sur l’air d’avertissement frondeur du mouvement des gilets jaunes ou encore « Bernard si tu savais, ton pinard ce qu’on en fait. Du jus! Du jus! Aucune hésitation! On boit, on boit, à la révolution ! ».
Après une distribution de 200 sécateurs, nous sommes passés directement des déclarations d’intentions à l’action et avons entrepris de vendanger sans plus attendre les profits des spéculateurs ! Les gendarmes qui avaient suivi le cortège en nous spécifiant en vain l’interdiction de pénétrer sur des terrains privés ainsi que les agents de sécurité « pacific » (sic) de LVMH se sont tenus en retrait.
Suite à la vendange rapide d’1,5 tonne de raisins, nous avons déambulé parmi les vignes puis sur la départementale jusqu’à la future cave de LVMH, encore en chantier. Nous y avons alors déployé des pressoirs et foulé le raisins pour en faire plus de 1000 litres de jus redistribué aux participant.es et en soutien à la ZAP de Pertuis, expulsée mais encore en mouvement pour empêcher la bétonisation de dizaines d’hectares de terres maraîchères. Ce raisin était initialement destiné par Bernard Arnault à la production de la cuvée Whispering Angels.
C’est sur ce domaine que le milliardaire revendique fièrement de produire le rosé le plus cher du monde. Nous avons ainsi repris notre part des anges et une petite revanche de classe qui en appelle d’autres.
Cette action était la seconde – en quelques mois- des Soulèvements de la Terre et de la Confédération paysanne sur des vignobles livrés à la spéculation. La première – dans le Jura en mars – avait réuni des centaines de personnes pour reprendre et nettoyer une vigne qu’un obscur fond d’investissement laissait mourir.
Le vignoble du Var est lui aussi la proie d’investisseurs qui font flamber le prix du foncier et placent l’avenir du territoire sous la mainmise de grands groupes. Cette nouvelle reprise de terres visait donc à s’en prendre en action à l’accaparement des terres agricoles et la financiarisation qui en découle.
Nous invitons à décliner et multiplier à l’envie partout dans le pays ces initiatives de récoltes des fruits de l’accaparement et de ponction directe dans le porte-monnaie des bénéficiaires de jet-privés et de golfs arrosés cet été.
Cette action inaugurale de la saison 4 des soulèvements de la terre, venue clôturer 2 jours d’assemblées, sera bientôt suivie d’une mobilisation nationale pour stopper le nouveau chantier de méga-bassine qui menace chaque jour de démarrer à Saint-soline dans les Deux-Sèvres malgré un été de sécheresse sans précédent. Guettez les réseaux sociaux des Soulèvements de la Terre, un rendez-vous pour se rejoindre en masse sur le terrain devrait tomber des les jours qui viennent !
La terre aux paysan.nes et celles et ceux qui en prennent soin ! Accapareurs et spéculateurs, hors de nos vignes et de nos vies ! »
CND vous encourage à aller les soutenir :

Interview

«Vendange militante» chez LVMH: «L’accaparement des terres conduit à une spéculation foncière importante»

Porte-parole de la Confédération paysanne du Var, Sylvain Apostolo explique les raisons de la manifestation qui s’est déroulée ce dimanche dans le domaine varois de Château d’Esclans, qui appartient au milliardaire Bernard Arnault.

par Samuel Ravier-Regnat

publié le 28 août 2022 à 17h40

A l’appel de la Confédération paysanne et de l’organisation de désobéissance civile les Soulèvements de la Terre, ils ont vendangé une parcelle du domaine du milliardaire, déjà critiqué ces dernières semaines pour l’usage intempestif et violent de son jet privé, puis ont pressé le raisin devant une cave en construction appartenant à ce dernier. «Un symbole fort», pour Sylvain Apostolo, porte-parole de la Confédération paysanne du Var, qui explique à Libération ses motivations.

Nous voulons dénoncer l’accaparement de terres qui s’opère par le biais du rachat de parts sociales d’entreprises qui possèdent ou exploitent des terres agricoles. Cette pratique de plus en plus courante permet aux grands groupes financiers de passer sous les radars des dispositifs de régulation actuellement en vigueur, qui ont été pensés par rapport au marché foncier classique et ne sont pas adaptés aux nouvelles stratégies des investisseurs.

C’est-à-dire ?

Les Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), par exemple, ne sont autorisées à intervenir que si un acheteur acquiert 100% des parts d’une société, ce qui n’est généralement pas le cas. C’est un problème de taille : en 2019, les rachats de parts sociales ont compté pour 6,5% des transactions liées au foncier, mais cela représentait 58,2% des surfaces acquises. La majorité des terres passent donc de main en main en dehors de tout contrôle. Nous avons ciblé le groupe LVMH car il s’agit d’un symbole fort. Bernard Arnault a mis la main sur le Château d’Esclans en achetant 55% des parts de la société et ses stratégies d’acquisition de terres sont très agressives.

Quelles sont les conséquences de l’accaparement des terres ?

Bernard Arnault est en train de se constituer un véritable monopole. Sa propriété comprend environ 140 hectares de vignoble, plus un millier d’hectares qu’il s’octroie en achetant le vin des viticulteurs locaux. L’accaparement des terres conduit à une spéculation foncière importante. Aujourd’hui, les prix sont tellement élevés que ça bloque toute nouvelle installation, notamment pour les jeunes. Il y a un pourtant un véritable enjeu de renouvellement des générations, car près d’un agriculteur sur deux partira à la retraite dans les dix prochaines années. Il faut donc une volonté politique d’installation qui passe par une régulation plus forte. Autre conséquence négative : plus les surfaces agricoles sont vastes, plus les emplois perdus sont nombreux. L’accaparement des terres pose enfin un problème environnemental. Quand on a des domaines qui s’agrandissent, on assiste à une homogénéisation et une uniformisation de la production. Cela va à l’encontre des objectifs de relocalisation et de diversification de notre agriculture imposés par le réchauffement climatique.

Fin 2021, le Parlement a adopté définitivement la loi dite Sempastous, censée renforcer la régulation de l’accès au foncier agricole. Est-ce un bon pas en avant ?

C’est clairement insuffisant. Ce texte, dont les décrets d’applications n’ont toujours pas été publiés, a été vidé de son contenu. Les moyens alloués à la régulation sont trop limités. Nous demandons une loi foncière à la hauteur des enjeux, qui renforce le pouvoir des Safer et les moyens mis à leur disposition. Il faut que l’inaction des pouvoirs publics vis-à-vis de ceux qui contournent les dispositifs de régulation cesse.

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