La crise bancaire vue pat un conseiller en bourse suisse: Edifiant

L’UBS va chez LIDL et s’offre le Crédit Suisse

Au lendemain de la crise des Subprimes, on aurait pu croire que l’on avait compris. Pendant des années on s’en est voulu (ou pas) d’avoir sauvé des banques qui s’étaient enfermées dans la certitude de faire un maximum de fric avec des produits que personne ne comprenait vraiment. Les gouvernements, les banques centrales et les contribuables avaient été mis à contribution pour sauver ces banques et les bonus de certains banquiers intouchables de l’époque. Ce ne fût pas simple à digérer, à accepter et à trouver ça normal. Mais on pensait que l’on avait compris et que ça ne se reproduirait plus. Sauf que ça s’est reproduit et que ça en devient pathétique.

La première et seule grande banque

Ce lundi 20 mars, il n’y a donc plus qu’une seule grande banque en Suisse. Une méga-banque. La FINMA, notre fabuleux organe de contrôle qui a la vitesse de réaction d’une huître pas fraîche, la BNS – qui est expertes en pertes abyssales en tous genres et le Conseil Fédéral, qui a priori n’a aucune expérience dans le monde merveilleux de la finance, ont donc – tous ensemble – bricolé un truc pour forcer l’UBS a racheter le Crédit Suisse pour un prix qui aurait fait honte à un marchand de tapis dans les souks de Marrakech. Le prix de 3 milliards pour racheter le Crédit Suisse est non-seulement un scandale financier mais ramène encore une fois la question du partage des profits avec les plus nantis au top du système et la mutualisation des pertes quand tout va mal.

Il est vrai que ce matin, au-delà de la structure même du rachat du Crédit Suisse, des montants et des garanties apportées par les autorités – comme l’accès à des lignes de crédit bon marché quasiment sans limite auprès de la BNS – on peut surtout et on DEVRAIT surtout se demander s’il est normal qu’à chaque fois que le système bancaire est en pleine forme, il paie des bonus de malades mentaux à ses dirigeants et ses cadres supérieurs et que ces derniers soient présentés comme les héros de la nation. Alors que quand tout part en vrille, c’est le contribuable, via les autorités qui paie la facture ?

Non, ça n’est pas normal. Mais tout comme on n’a demandé l’avis de personne pour sauver l’UBS en 2008, on ne demande l’avis de personne non plus pour sauver le Crédit Suisse en 2023. Alors oui, le Crédit Suisse faisait partie de la longue liste des 30 banques qui sont « too big to fail » et l’on n’avait pas le DROIT de laisser partir le Crédit Suisse parce que c’était « trop dangereux pour l’économie ». Par contre créer une nouvelle méga-banque encore plus grosse qui devrait inévitablement se foutre dans une merde noire quelconque dans les 10 ans à venir, cela semble brillant et une superbe idée pour l’avenir. On ne va pas commencer à jouer les oiseaux de malheur pour la suite, mais je ne suis pas certain que continuer à faire des banques de plus en plus grosses, soit la solution ultime pour diversifier le risque.

On s’en fout, on a fait plaisir aux Européens et aux Américains

Peu importe ce qui a été fait, ce qui aurait dû être fait et comment les choses vont se passer maintenant. Nous ne sommes personne dans cette histoire et nous ne sommes que des contribuables qui vont mutualiser les pertes comme si ça ne coûtait rien. On ne nous aura rien demandé de toute façon. Mais soyez rassurés, si vous avez besoin d’argent et que vous voulez demander de l’argent à votre nouvelle méga-banque, il est plus que probable que l’on vous regardera avec le même mépris que d’habitude. Une chose est certaine, si l’on observe attentivement le tissu bancaire de ces 15 dernières années – je parle des banques cotées en bourse – on commence à bien comprendre qu’en théorie se sont des institutions privées avec des actionnaires et des stars de la finance à l’intérieur, mais que dès que cela se passe mal, elles deviennent étatiques et les politiques se ruent à leur chevet pour leur sauver les fesses comme si ça ne leur coûtait rien. D’ailleurs ça ne leur coûte rien, puisque c’est nous qui payons à la fin…

Mais que l’on se rassure, la bonne nouvelle de ce matin, c’est que l’ensemble des institutions financières internationales s’estiment « satisfaites » de la vitesse de réaction exceptionnelle des autorités suisses. Tu m’étonnes, comme ça, ça leur évite d’avoir des problèmes à gérer chez eux. On est donc très content d’avoir fait office du bon élève qui a fait le travail sans se poser de question. Il est cependant évident qu’il n’y avait pas d’autre solution dans le cas du Crédit Suisse. Cependant, ce qui est absolument terrifiant, c’est que l’on n’est pas foutu d’anticiper ce genre de chose pour que ça ne se reproduise pas.

La hausse des taux

Lorsque l’on regarde ce qui a réellement mis le Crédit Suisse dans cette situation, c’est la hausse brutales des taux d’intérêts qui a mis en difficulté des banques comme la SVB aux USA, puis qui a déclenché des contagions en cascade. La hausse des taux. Il ne faudra quand même pas me dire que personne ne l’avait vue venir celle-là !!! Alors oui, la banque aux deux voiles avait largement tapé dans le capital confiance après la multitude de casseroles qui avait été annoncée ces dernières années. Mais lorsque l’on pourra lire l’épitaphe du Crédit Suisse qui dira :

« Morte au combat parce que les taux sont montés »

Il y aura quand même de quoi rire. D’ailleurs il vaut mieux en rire, parce que toute cette histoire est pathétique et le pire, ce qui fait le plus peur, c’est qu’il y a bien des risques que cela recommence dans les années à venir. Sauf que le jour où c’est la Méga-UBS qui sera en difficulté, on va la fusionner avec qui ? La Poste ? La Raiffeisen ??? Est-ce que quelqu’un s’est déjà posé la question de savoir ce qui se passerait si les dirigeants de ces méga-banques étaient tenus responsables de leurs actes et si le délit d’incompétence devenait pénal ? Non ? Bizarre, vous ne trouvez pas ?

Greed is good

Ça n’est bien évidemment pas le moment de chercher des solutions, mais disons que si l’on vous donne le droit de prendre des risques de malade et d’encaisser des bonus de folie en cas de réussite et qu’en cas d’échec, on vous donne une tape dans le dos et c’est la BNS qui paie, à votre avis, est-ce que vous allez prendre PLUS ou MOINS de risques ??? La question reste ouverte, mais disons que je crois qu’elle est vite répondue. Alors peut-être que pour la suite, pour les années à venir, nous pourrions peut-être se demander s’il ne faudrait pas changer la loi pour rendre les managers un peu plus responsables de leurs actes. Nous ne sommes pas ici ce matin pour faire le procès du passé du Crédit Suisse, ni pour faire la longue liste de leurs conneries de ces 10 dernières années – mais disons que si le management n’avait pas réfléchi avec leurs comptes en banque personnels, on n’en serait peut-être pas là.

Bref, ce matin il n’y a plus deux grandes banques suisses, mais une très grande banque suisse. Reste à espérer que celle-là ne va pas vaciller tout de suite, parce que sinon ça risque d’être compliqué de faire avaler la pilule au peuple. Quoi que… Oui, parce que lorsque l’on voit la colère des gens qui était la leur lorsque que l’on a sauvé le cul de l’UBS en 2008 et le nombre qui n’ont même pas pris le temps d’aller changer leurs comptes de banque pour exprimer cette colère, on se dit que le courroux provoqué par le sauvetage de ce week-end, ne devrait pas durer bien longtemps.

Ce matin en Asie et ailleurs, on est content

…/…

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