Inondations en Libye : les « medicanes » à l’origine de la catastrophe, comment se forment-elles ?

This grab from a video published on the Facebook account of the Libyan Red Crescent on September 11, 2023, shows cars engulfed in floods in al-Bayda town in eastern Libya. At least 150 people were killed when freak floods hit eastern Libya, officials said on September 11, after storm Daniel swept the Mediterranean, lashing Turkey, Bulgaria and Greece. (Photo by Basma BADRAN / Libyan Red Crescent / AFP) / RESTRICTED TO EDITORIAL USE - MANDATORY CREDIT "AFP PHOTO / HO / LIBYAN RED CRESCENT" - NO MARKETING NO ADVERTISING CAMPAIGNS - DISTRIBUTED AS A SERVICE TO CLIENTS

Les inondations qui ont dévasté la ville de Derna ont fait des milliers de morts et 30 000 personnes ont dû être déplacées. La cause de cette catastrophe ? Le « medicane » Daniel, un rare ouragan méditerranéen.

BASMA BADRAN / AFP
Les inondations qui ont dévasté la ville libyenne de Derna ont fait des milliers de morts et 30 000 personnes ont dû être déplacées.

ENVIRONNEMENT – Au moins 30 000 personnes déplacées et des milliers de morts. C’est le dramatique bilan provisoire dressé par les autorités libyennes ce mercredi 13 septembre, après les inondations dévastatrices survenues dans la ville de Derna, au nord-est du pays. Une catastrophe causée par le « medicane » Daniel, un phénomène météorologique extrême.

Cette tempête s’est formée autour du 4 septembre, semant la mort et la destruction en Bulgarie, en Grèce et en Turquie la semaine dernière, avant de toucher les côtes libyennes. En cours de route, cette dépression s’est transformée en « medicane ». Contraction de l’anglais « Mediterranean » et « hurricane » (ouragan), il désigne donc un « ouragan méditerranéen ».

Ces tempêtes méditerranéennes, qui présentent les caractéristiques des cyclones et ouragans tropicaux, ne se produisent qu’une à trois fois par an. Pour se former, elles ont besoin de flux de chaleur et d’humidité, qui sont « renforcés par les températures chaudes de la surface de la mer », souligne Suzanne Gray, professeure au département de météorologie de l’Université de Reading en Grande-Bretagne.

Or, depuis plusieurs semaines, les eaux de surface de la Méditerranée orientale et de l’Atlantique sont deux à trois degrés plus chaudes que d’habitude. Elles sont donc « susceptibles d’avoir provoqué des précipitations plus intenses », ont déclaré plusieurs scientifiques lors d’une réunion du UK National Climate Impacts.

« Il existe un lien direct entre l’augmentation des précipitations et les inondations. S’ajoutent à cela les conditions météorologiques locales. Pour cet événement particulier, il résulte d’un blocage de hautes pressions persistant qui se dissipe actuellement », expliquent les scientifiques.

L’impact du changement climatique en question

Ils ajoutent que pour le moment il est difficile de dire si ce type d’événement sera ou non plus fréquent à l’avenir. Selon certains modèles, le changement climatique pourrait réduire le nombre de cyclones en Méditerranée mais en augmenter l’intensité. « Ces phénomènes orageux ne seront pas forcément plus nombreux avec le changement climatique mais plus intenses et concerneront des zones qui n’ont pas l’habitude de recevoir autant de précipitations et qui n’auront pas forcément les moyens de s’en remettre », explique de son côté l’agrométéorologue Serge Zaka.

Selon l’observatoire européen Copernicus, la surchauffe des températures de surface des mers, qui absorbent 90 % de la chaleur en excès produite par l’activité humaine depuis l’ère industrielle, entraîne des niveaux de chaleur record à travers le monde et 2023 sera probablement l’année la plus chaude de l’Histoire.

Mais le climat n’explique pas tout. Certains analystes estiment que la scène politique fragmentée en Libye – déchirée par plus d’une décennie de guerre civile à la suite de la chute du dictateur Mouammar Kadhafi, au pouvoir de 1969 à 2011 – a également contribué à cette catastrophe.

Ces conditions politiques « posent des défis pour le développement de stratégies de communication et d’évaluation des risques, pour la coordination des opérations de sauvetage, et aussi, potentiellement, pour la maintenance des infrastructures critiques telles que les barrages », souligne Leslie Mabon, maîtresse de conférences en systèmes environnementaux à l’Open University du Royaume-Uni.

Dans la nuit de dimanche à lundi, les deux barrages de retenue des eaux du Wadi Derna, l’oued qui traverse la ville de Derna, sur la côte est de la Méditerranée, ont lâché. Des torrents puissants ont détruit les ponts et emporté des quartiers entiers avec leurs habitants de part et d’autre de l’oued, avant de se déverser dans la mer.

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