Proche-Orient, Monde, guerre. Notes du 28 octobre 2023. Par VP

aplutsoc

Oct 29

L’offensive de l’armée israélienne sur Gaza est une entreprise d’écrasement qui vise de fait, et ses auteurs le savent très bien et l’assument, la population. Bien que le discours de Netanyahou ne soit visiblement pas le seul dans le cabinet d’union nationale israélien, la pure logique non politique de vengeance dont il se réclame est ce qui détermine cette offensive, et est en contradiction ouverte avec toutes les normes de droit. Les pogroms du Hamas du 7 octobre ne légitiment pas cela, et avaient d’ailleurs pour but de provoquer cela.

Dans cette situation, le système contre-révolutionnaire iranien, qui s’est étendu sur la région pour écraser la révolution syrienne (avec l’aval de Washington et en introduisant la force militaire russe), est placé devant le choix dont il a lui-même créé les conditions : attaquer à son tour et s’engager dans la guerre avec les États-Unis, ou “attendre” que le massacre des Gazaouis se poursuive en misant sur la chute, l’un après l’autre, des dominos géopolitiques contre le supposé “camp occidental” et du côté du soi-disant “sud global”, exploitant donc le massacre de Gaza pour cimenter l’alliance d’une éventuelle guerre mondiale.

Ce basculement est bien engagé de la part d’Erdogan, alors que la Turquie est membre de l’OTAN et hésite, oscille depuis 2015. La “Nakba” du Karabagh-Artsakh a fortement déplu (pas par humanitarisme évidemment) au régime de Téhéran, mais Erdogan aujourd’hui a ouvertement basculé dans un camp qu’il définit comme religieux et antisémite. L’histoire retiendra qu’après que les pogroms du 7 octobre aient émis le message que la Shoah peut se répéter, les panneaux “interdits aux Juifs” ont fait leur apparition à Istambul aujourd’hui.

Moscou exploite également cette situation dans laquelle son rôle obscur initial fait de moins en moins de doutes. L’offensive d’Avdiivka a été lancée au moment même où se produisait la provocation et les pogroms du Hamas. Elle avance peu, elle serait, selon les annonces, crédibles, du ministre ukrainien de la Défense, le tatar Umerov, 5 fois plus meurtrière pour l’armée russe que pour l’armée ukrainienne, MAIS elle achève d’effacer la perception d’une contre-offensive ukrainienne engagée théoriquement depuis le 6 juin dernier, juste après le sabotage du barrage de Nova Kakhovka.

Moscou a officiellement reçu le Hamas après les pogroms du 7 octobre, ce dont le « pote à Poutine » Netanyahou aura à rendre compte un jour. Deux dominos branlent aussi en Europe centrale, à savoir la Hongrie d’Orban et la Slovaquie de Fico, ce mafieux corrompu qui dénonce l’ “Ukraine corrompue” …

Par contre, dans les configurations/reconfigurations diplomatiques s’articulant autour de Gaza et autour de l’Ukraine, Modi et l’Inde se situent dans le “camp anti-Hamas” – ce qui veut dire danger grave pour les musulmans indiens …-, renforçant les espoirs nord-américains d’une Inde ne se rangeant pas dans une triple alliance avec Beijing et Moscou.

Le discours de Biden vendredi dernier a mis sur le même plan Ukraine et Israël d’une part, Hamas, Iran et Russie d’autre part. Zelensky s’est évidemment aligné sur ce discours qui contient la demande au Congrès d’une forte relance de l’aide militaire, alors qu’en fait la ligne diplomatique ukrainienne jusque là n’était pas aussi pro-israélienne qu’on pourrait le croire (elle se fondait sur la demande de dénucléarisation, de la part de l’Ukraine, seule « puissance nucléaire » qui s’est dénucléarisée, en 1994, et sur l’évacuation de la Cisjordanie).

Mais d’autre part, le discours de Biden ne disait volontairement rien de la Chine, et formulait l’idée de ne pas « refaire les mêmes erreurs qu’après le 11 septembre 2001″, ce qui n’est pas rien.

Force est de constater que la ligne de Biden, tout en laissant de fait les Gazaouis pris au piège tout en préconisant de les aider “humanitairement” à se faire massacrer, vise effectivement à contenir l’emballement vers la guerre mondiale.

Toutefois, elle est elle-même juchée sur un équilibre précaire aux États-Unis mêmes, en proie à une crise de régime, une crise constitutionnelle, ouverte par Trump, non résolue et qui s’aggrave actuellement.

Dans cette situation globale, il faut noter que Beijing a émis deux signaux sur la ligne « wait and see » plutôt que sur la ligne « on va peut-être profiter des deux guerres la-bas à l’ouest pour sauter sur Taïwan ». Juste après, d’ailleurs, un bisbille avec la flotte philippine et une collision évitée entre un avion de chasse chinois et un B52 américain au dessus de la mer “de Chine”.

Les deux signaux sont l’annonce d’un sommet prochain Xi Jinping/Joe Biden et l’officialisation de l’éviction du ministre de la Défense Li Shangfu, qu’on ne voyait plus depuis août.

Tel est l’état des lieux ce soir des tendances à la guerre mondiale. Et ce qui devrait nous faire enrager est que ceci soit un commentaire, une analyse, nécessaires mais insuffisants. Le potentiel de survie et de volonté de vivre en paix de l’humanité doit se cristalliser dans un internationalisme actif, pour sauver Gaza, pour la victoire ukrainienne, pour ouvrir d’autres perspectives et, tout de suite, s’occuper sérieusement de la couche atmosphérique et biologique dans laquelle nous vivons, à laquelle l’accumulation du capital, cause finale des pulsions de guerre mondiale, a mis le feu. C’est cela dont il faudrait s’occuper.

VP, le 28-10-2023, soir.

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