À Sciences Po Paris, les étudiants mobilisés contre la guerre à Gaza

À Sciences Po Paris, après une 2e nuit d’occupation, les étudiants mobilisés contre la guerre à Gaza bloquent l’entrée de l’établissement. Images @LucAuffret


Sciences Po Paris : un bâtiment de l’école à nouveau occupé par des étudiants pro-palestiniens

Quelques dizaines d’étudiants mobilisés en faveur des Palestiniens ont décidé d’occuper à nouveau un bâtiment de Sciences Po Paris depuis jeudi soir. La mobilisation se poursuit ce vendredi. Le préfet de police de Paris a demandé l’évacuation du rassemblement suite à des tensions entre militants.

La mobilisation pro-palestinienne se poursuit vendredi à Sciences Po Paris avec l’occupation et le blocage de locaux historiques par des étudiants dont les revendications font écho aux contestations qui agitent certains prestigieux campus américains. Quelques dizaines d’étudiants du comité Palestine de Sciences Po ont occupé dans la nuit de jeudi à vendredi les locaux, rue Saint-Guillaume, au cœur du huppé 7e arrondissement.

Keffiehs sur la tête, drapeaux palestiniens accrochés aux balustrades, slogans fustigeant Israël, plusieurs dizaines d’étudiants bloquaient encore vendredi en début d’après-midi dans et en dehors le bâtiment nouvellement occupé. En période d’examens, certains d’entre eux étaient assis à même le sol devant l’école pour réviser mais, tenaient à être là en soutien de leurs camarades à l’intérieur du bâtiment.

Auparavant des étudiants pro-Gaza avaient commencé à enlever les poubelles qui obstruaient l’entrée du batiment. Mais des militants continuent d’occuper le site et un sit-in avait été organisé dans la foulée sur le pavé.

Des tensions entre militants

La tension est cependant montée d’un cran aux alentours de 16 heures avec l’arrivée d’une cinquantaine de manifestants pro-Israël criant notamment « Libérez Sciences po » ou « Libérez Gaza du Hamas ». Certains étaient masqués et disposaient de casques de moto. Une bousculade entre partisans des deux camps est survenue au milieu des nombreux journalistes présents. Les forces de l’ordre se sont alors positionnées pour séparer sans violence les deux groupes.

Le préfet de police a demandé l’évacuation des manifestants présents sur la voie publique.

De 50 à 70 étudiants sont susceptibles d’être présents dans ce bâtiment, selon des jeunes militants ou sympathisants du comité Palestine Sciences Po joints par l’AFP. Le comité réclame notamment « la condamnation claire des agissements d’Israël par Sciences Po » et « la fin des collaborations » avec toutes « les institutions ou entités » complices « de l’oppression systémique du peuple palestinien« . Il réclame en outre l’arrêt de « la répression des voix pro-palestiniennes sur le campus ».

Cette mobilisation a reçu le soutien de plusieurs figures de LFI dont la militante franco palestinienne Rima Hassan, candidate sur la liste « insoumise » pour les élections européennes.

La direction, qui chiffre à une soixantaine le nombre d’occupants du principal bâtiment, a décidé de fermer plusieurs locaux de son campus parisien. Elle « condamne fermement ces actions étudiantes« . La direction, à qui une partie de la communauté éducative reproche d’avoir laissé les forces de l’ordre intervenir sur le campus, a organisé une rencontre avec des représentants des étudiants vendredi matin.

L’école occupée dès mercredi soir

Mercredi soir, une soixantaine d’étudiants engagés en faveur de la cause palestinienne avaient occupé l’amphithéâtre extérieur d’un campus de l’école dans le 7e arrondissement. « Après échange avec la direction de Sciences Po, la plupart ont accepté de quitter les lieux » dans la nuit, mais « un petit groupe d’étudiants a néanmoins refusé et il a été décidé que les forces de l’ordre procèdent à l’évacuation du site », a indiqué mercredi matin la direction de l’établissement dans un message à l’AFP. Elle « regrette que les nombreuses tentatives de dialogue afin qu’ils quittent les lieux dans le calme n’aient pas permis de trouver une autre issue à cette situation ».

Une dizaine de tentes avaient été installées dans la cour de ce campus mercredi soir, selon des témoignages recueillis par l’AFP. À l’arrivée de la police, « 50 étudiants ont quitté d’eux-mêmes les lieux, 70 ont été évacués dans le calme à partir de 00H20″, selon la préfecture de police, qui ne déplore « aucun incident« .

Un mouvement de mobilisation « dangereux » selon le Crif

Le président du Crif Yonathan Arfi a estimé vendredi « dangereux » le mouvement de mobilisation pro-palestinienne chez les étudiants en France, tout en soulignant qu’il n’y avait « rien de massif » à Sciences-Po Paris. « C’est dangereux car l’université a une fonction symbolique dans nos sociétés. Ce qui se passe dans les universités ne concerne pas que le monde étudiant, mais rayonne sur l’ensemble de notre vie politique et intellectuelle et produit des effets sur une génération », a affirmé sur LCI le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif).

Yonathan Arfi s’exprimait alors que la mobilisation pro-palestinienne se poursuit vendredi matin à Sciences Po Paris, où des étudiants ont passé la nuit dans le bâtiment et entrepris de bloquer sa principale entrée. Cette mobilisation ne concerne que « quelques dizaines d’étudiants », a toutefois rappelé Le président du Crif « frappé » de voir que les images de la mobilisation étudiante « sont moins massives qu’aux États-Unis ». « Il n’y a rien de massif » mais « ça fonctionne, ça prend en otage le campus entier, ça empêche la liberté académique et fait peser un climat de terreur intellectuelle sur une partie des étudiants juifs », a-t-il regretté. Il a assuré que « pour une partie les étudiants juifs, il est devenu difficile dans certains contextes d’aller en cours ».

Selon une étude récente de l’UEJ (Union des étudiants juifs de France) « 30% des étudiants juifs choisissent leur parcours académique en fonction de l’anticipation du climat antisémite qui pourrait peser dans les établissements », a-t-il ajouté.

Le président du Crif a également déploré « quelque chose d’organisé car derrière il y a des organisations étudiantes structurées » qui « ont décidé de mettre le focus sur ce sujet car elles ont compris que c’était rentable médiatiquement ». Selon lui elles « espèrent que cette outrance paiera sur le plan électoral car elles sont soutenues, on le sait, par la France insoumise, et que ça paiera électoralement dans le monde étudiant ». Yonathan Arfi dit sa « confiance dans la capacité de notre pays à juguler le phénomène ». Mais sur le sujet « il faut exprimer une forme de fermeté », a-t-il ajouté.

Une mobilisation dans plusieurs universités américaines

Cette mobilisation a été organisée par le Comité Palestine de Sciences Po. Elle s’est déroulée alors que plusieurs universités américaines sont prises dans la tourmente provoquée par le conflit à Gaza.

Selon le Comité Palestine Sciences Po, ses militants ont été « portés en dehors de l’école par plus d’une cinquantaine de membres des forces de l’ordre » et « une centaine » de policiers les « attendait également dehors ». « Il y a un double diplôme entre Science Po et Columbia (à New York), donc on a des camarades là-bas et les étudiants communiquent entre eux », a expliqué Hicham, membre du Comité Palestine de Sciences Po. « On se place dans la même ligne que ces universités partout dans le monde.« .

Jeudi encore, 150 à 200 étudiants, notamment de l’université Paris 1, ont manifesté place du Panthéon pour protester contre la venue du président Macron pour un discours sur l’Union européenne à la Sorbonne, a constaté l’AFP. « On refuse que Macron vienne tranquillement à la Sorbonne dans un moment où il y a un génocide en Palestine », a indiqué à l’AFP Lorélia Fréjo, de l’organisation étudiante Le Poing Levé Paris 1.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire