Kanaky Non à la recolonisation ! Solidarité avec le peuple Kanak en lutte

15 mai 2024  Par Organisation Communiste Libertaire (OCL)

Sur la situation en Kanaky : un tract du collectif Solidarité Kanaky, une synthèse sur les évènements des 2 derniers jours qui ressemblent à un préalable de guerre civile. Et le communiqué du 15 mai de la CCAT (Cellule de Coordination des Actions de Terrain)

Kanaky/Nouvelle-Calédonie :

NON au dégel du corps électoral ! NON à la recolonisation ! (Texte du collectif solidarité Kanaky

Ce lundi 13 mai, veille du vote à l’assemblée nationale, les manifestations des indépendantistes contre le dégel du corps électorat se sont multipliées ;

  • routes bloquées ou barrages filtrants, grève très suivie au port et aéroport de Nouméa, fermeture de nombreuses administrations, feux allumés à différentes endroits, début de mutinerie dans la prison de Nouméa, heurts entre jeunes kanak et forces de l’ordre dans les quartiers populaires, nombreux blessés et arrestations en masse.

    C’est dans ce contexte insurrectionnel qu’aura lieu le vote à l’assemblée national ce 14 mai portant sur le dégel du corps électoral.

Pour tenter d’arrêter ce processus dangereux pour l’avenir du peuple kanak, les élus du congrès de Nouvelle Calédonie se sont réunis ce lundi 13 mai et sont parvenu à adopter, à la majorité, une résolution demandant le retrait de ce projet de loi sur le corps électoral.

Les élus rappellent à l’État qu’ils sont majoritairement conte ce projet de loi.

30 ans après l’Accord de Nouméa, ainsi que du transfert des compétences et leur rééquilibrage, les inégalités restent très importantes, le non respect de la priorité à l’emploi local : dans beaucoup de secteurs, ce sont les métropolitains récemment arrivés en Nouvelle Calédonie, du fait de conditions attractives (niveau de salaire et indexation, avantages en terme de logement ou de soutien à l’installation), qui occupent des postes au détriment des travailleurs Kanak à compétences égales. Ainsi se perpétue une longue tradition de privilèges offerts aux Français partant travailler en Outre- mer.

Des conditions qui permettent de renforcer la colonie de peuplement qu’a toujours représenté pour l’État français ce territoire du Pacifique. Cela en violation totale du droit international. En effet, la Kanaky/Nouvelle-Calédonie reste un territoire non autonome au regard du droit international, à ce titre inscrit sur la liste des pays à décoloniser selon la résolution 15-14 des Nations Unies.

L’Accord de Nouméa est un accord de décolonisation. Il prévoyait 3 consultations référendaires d’autodétermination. Le deuxième référendum avait montré, en 2020, une poussée des voix indépendantistes : à seulement 9000 voix près, le « Oui » à la pleine souveraineté de la Nouvelle Calédonie était majoritaire. Les conditions du troisième et dernier référendum, fin 2021, sont aujourd’hui toujours contestées par l’ensemble des courants indépendantistes, lesquels avaient demandé suite à l’épidémie du Covid et au confinement qui empêchait toute campagne, le report de la consultation et le respect tant de la promesse d’Edouard Philippe de le tenir en 2022 que de la période de deuil kanak. Ce 3ème référendum n’est pas reconnu par les indépendantistes qui n’ont pas participé au vote. Une plainte est prévue à ce sujet auprès de la Cour Internationale de Justice.

Aujourd’hui, le gouvernement français a décidé de passer en force. Il présente unilatéralement deux projets de lois sur l’avenir institutionnel de la Kanaky/Nouvelle- Calédonie qui mettent en jeu l’avenir du peuple Kanak, et la stabilité du pays. Ils visent une sortie dans des conditions très contestées et non consensuelles de l’Accord de Nouméa, avec pour conséquence une aggravation considérable des clivages.

Le premier projet de loi concernant le report des élections provinciales a été adopté en mars dernier, le second vise à modifier la constitution est central dans l’Accord de Nouméa, aucune modification ne devrait être faite par une décision unilatérale de l’État, sans un accord global entre les forces politiques locales.

Ces projets de lois renouent avec les pratiques éprouvées de mise en minorité du peuple Kanak dans son propre pays, au profit d’une droite locale qui voudrait par une modification des sièges au Congrès de Nouvelle-Calédonie y trouver une majorité en sa faveur.

L’État s’engage dans une modification brutale de toute l’organisation de la vie démocratique de la Nouvelle-Calédonie. C’est une façon de favoriser la recolonisation du territoire et l’invisibilisation du peuple Kanak !

En réponse, en Kanaky/Nouvelle-Calédonie les mobilisations s’amplifient contre ces deux projets de lois. Plus de 80 000 personnes dans la rue le 13 avril dernier sur tout le territoire. Des mobilisations historiques qui sont impulsées par la CCAT (Cellule de Coordination des Actions de Terrain,) qui regroupe l’ensemble des courants indépendantistes. Les objectifs sont clairs : la demande du retrait du projet de loi sur le dégel du corps électoral, la non reconnaissance du 3ème référendum, et la poursuite de la trajectoire de décolonisation.

Ce passage en force de l’État français rappelle de tristes souvenirs et favorise une dynamique de tensions extrêmement dangereuse. La mobilisation du 1er mai a été massive et cette année marquée politiquement par ce contexte politique.

Aujourd’hui la moindre étincelle peut embraser la pays.

La semaine du 4 mai 2024 jusqu’au 13 mai 2024, a été une semaine de mobilisations et d’actions continues de la CCAT. Débutée le 4 mai 2024 – pour l’anniversaire de la mort de Jean- Marie Tjibaou le 4 mai 1989, et l’anniversaire du massacre des 19 de la grotte d’Ouvéa le 5 mai 1988 – jusqu’à la présentation du texte à l’Assemblée Nationale ce 13 mai 2024. Des rassemblements devant toutes les gendarmeries du pays le 5 mai 2024, des marches dans différentes villes tous les jours. De nombreuses mines sont déjà bloquées comme à Houailou, à Thio.

La mobilisation entre dans sa 3ème phase.

Ce 13 mai 2024 les deux fédérations USTKE, T.H.T (Transports aériens et terrestres, Hôtellerie) et Ports & Docks entrent en grève, suivie à 99 %.

Au port, sortie uniquement de marchandises de 1ère nécessité (denrées périssables et médicaments), toutes les sociétés du port ont décidé de fermer à 15H. Ralentissement de l’économie aujourd’hui. La chefferie de Wetr à Lifou a décidé la fermeture de l’aéroport de l’île.

A l’aéroport à Tontouta, les vols des avions ont pris énormément de retard du fait que les salariés ont quitté leurs postes donc perturbant le fonctionnement des services sur l’aéroport.

Les mobilisations de la CCAT sur les accès routiers ont perturbé aussi le Pays.

Le Pays, se mobilise partout, avec des barrages filtrants.

Un début de mutinerie à commencé à la prison du camps Est, trois gardiens ont été pris en otage, intervention du RAID.

Des jeunes ont affronté la police, les gendarmes mobiles, car ceux la même ont tiré aux flash-ball sur les jeunes provocant leur colère.

Le pays vit une tension extrême dans l’attente du vote à l’assemblée nationale.

Par ailleurs, la répression est forte. Plusieurs personnes poursuivies depuis la manifestation du 21 février dernier sont passées en procès le 19 avril au Tribunal de Nouméa, subissant de très lourdes condamnations, deux manifestants sont enfermés au camps Est, cinq autres manifestants sont libres mais avec bracelets électroniques. Depuis, il y a eu de nombreuses arrestations, certaines personnes ont été libérées mais avec des poursuites, d’autres sont en détention provisoire, ou gardés à vue.

Ce sont des prisonniers politiques !

Lundi 13 mai 2024, 18 personnes devaient passer en comparution immédiate le procès a été

reporté, pour certains au simple motif de port du drapeau de Kanaky ! Du jamais vu … !

Le collectif Solidarité Kanaky, créé en 2007, regroupe différentes organisations associatives, syndicales et politiques avec l’objectif d’organiser en France la solidarité avec le peuple Kanak dans sa trajectoire de décolonisation. Aux côtés des différents courants indépendantistes, nous réaffirmons notre solidarité aux luttes syndicales et politiques des indépendantistes Kanak indépendantistes et non kanak, contre la situation coloniale, raciste, capitaliste et répressive de l’État français en Kanaky.

Nous en appelons aux parlementaires qui à l’Assemblée nationale vont avoir la responsabilité de se prononcer sur la loi portant dégel du corps électoral de Nouvelle-Calédonie.

La Kanaky/Nouvelle Calédonie n’est pas un territoire français, mais au regard du droit international un « territoire non autonome ». Le projet de loi constitutionnelle proposé unilatéralement en vue du dégel du corps électoral , en violation du droit international, conduit les parlementaires à assumer la responsabilité de décider, à plus de 22000 kms de lui, de l’avenir de tout un peuple. Voire d’un possible embrasement en Kanaky/Nouvelle-Calédonie.

Ce projet de loi doit être retiré.

Exigeons la libération et l’abandon des poursuites pour les inculpés des mobilisations en cours.

Engageons des actions de solidarité ici en France contre les deux projets de loi et en solidarité au mouvement actuel en Kanaky.

Solidarité avec la CCAT et le peuple Kanak mobilisé !

Nous appelons à la participation AU RASSEMBLEMENT CE MARDI 14 MAI 2024 de 14H à 18H Place Salvador Allende (plus proche autorisé de l’Assemblée Nationale) CONTRE LE VOTE SUR LE DEGEL DU CORPS ELECTORAL ET POUR LE RETRAIT IMMEDIAT DU PROJET DE LOI.

Le Collectif Solidarité Kanaky :

MJKF (Mouvement des Jeunes Kanak en France), USTKE (Union Syndicale des Travailleurs Kanak et des Exploités (en France), Union syndicale Solidaires, CNT (Confédération Nationale du Travail), STC (Sindicatu di i Travagliadori Corsi), Association Survie, FASTI (Fédération des Associations de Solidarité avec Tou-te-s les Immigré-e-s), FUIQP (Front Uni des Immigrations et des Quartiers populaires), Ni guerre ni État de Guerre, UP (Union Pacifiste), Ensemble !, NPA (Nouveau Parti Anticapitialiste), PCOF (Parti Communiste des Ouvriers de France), PEPS (Pour une Ecologie Populaire et Sociale), PIR (Parti des Indigènes de la République), UCL (Union Communiste Libertaire).

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Caricature ?

Mardi 14 mai

Le haut-commissaire, représentant de l’État français nommé par le gouvernement, Louis Le Franc, organise une conférence de presse au lendemain de la première nuit de « violences ».

A ses côtés, le général commandant de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie et pas moins de 3 représentantes de la droite caldoche locale : la maire de Nouméa (macroniste), la maire LR de Païa (banlieue nord de Nouméa où est situé l’aéroport international de la Tontouta) et la présidente de la province Sud, Sonia Backès (macroniste, ex-UMP), passée par le gouvernement d’E. Borne en 2022-23.

Ces trois caldoches, ainsi que toute la droite locale (des macronistes au RN), ont appelé à plus de répression, à l’instauration de l’état d’urgence et au déploiement de l’armée dans l’archipel.

Le haut-commissaire a dit que ce n’est « pas une bonne idée ». Le couvre-feu (de 18h à 6h) ne sert pas à grand-chose mais les renforts de police et gendarmerie arrivés de Polynésie puis de métropole devraient suffire (GM et CRS avec le RAID, le GIGN, etc)… ainsi que le triplement des effectifs de la magistrature locale afin d’accélérer les procès en comparution immédiate.

Et puis, politiquement, la loi est passée… il n’y a plus qu’à convoquer le Congrès pour changer la Constitution. Le processus de décolonisation, entamé par les accords de Matignon de 1988, vient d’être mis à l’arrêt, détruit, pulvérisé, répondant ainsi aux intérêts politiciens de la droite locale qui coïncident avec ceux, plus stratégiques, de l’État français dans la zone Asie-Pacifique.

En deux jours, il y a eu plus de 200 arrestations et GAV… chiffre qui va augmenter dans les prochains jours, car, même si la situation se « calme » (à voir et comment, avec quels moyens ?), les autorités ont annoncé qu’il y aura des poursuites et des arrestations pour les violences, les saccages, les incendies (on parle quand même d’une centaine de commerces et d’entreprises brûlés) et les pillages. Des raids sont donc à prévoir dans les semaines à venir dans les quartiers où se concentrent les jeunes kanaks de la zone du Grand Nouméa, bien plus nombreux dans cette partie urbaine de l’archipel que dans les années 1984-88.

Quant à l’État français, avec un Macron qui casse des accords et des consensus, qui choisit clairement de relancer une logique de polarisation et d’affrontement, et d’inscrire cela dans la loi constitutionnelle, il peut toujours déclarer qu’il est en faveur de solutions négociées… qui peut encore le croire ?

Mercredi 15 mai au soir la nouvelle est tombée : l’état d’urgence va être décrété à la demande de Macron.

L’État a donc décider d’avoir la main encore plus lourde… et les coudées franches sur place, tout en donnant raison aux anti-indépendantistes.

Mais c’est vrai qu’entre hier et aujourd’hui, les données ont changé : on compte 3 morts (3 jeunes Kanaks), un flic en situation critique avec une balle dans la tête, « autour de 300 blessés » dont parait-il une centaine de policiers, que la situation est devenue plus incontrôlable (avec même une mutinerie et tentative d’évasion de détenus de la prison de Nouméa), que pas mal de caldoches et de métros se sont auto-enfermés et barricadés dans leurs quartiers, que tout est à l’arrêt (aéroport et écoles fermés, économie paralysée….), que beaucoup de gens sont armés dans ce territoire, un peu à l’américaine… Il y selon les estimations autour de 130 000 armes à feu dans l’archipel (dont 64 000 déclarées), pour une population estimée de 270 000 habitants.

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