CONTRE LA GUERRE, LA REVOLUTION

A l’heure où la guerre économique entre les USA et la Chine prend le tour d’une menace militaire autour de Taïwan, que les tensions grandissent entre la Serbie et le Kosovo et que la guerre de l’impérialisme russe en Ukraine s’est enfoncée dans son sixième mois, il devient clair que la guerre est entrée dans l’agenda actuel du capitalisme et de ses nationalismes.
La révolution doit entrer dans le nôtre avec l’internationalisme si nous voulons échapper au désastre.
Ce n’est pas qu’une figure de l’esprit. La révolution est déjà une réalité sur différents points du globe. Et plutôt que de commenter les actes des va t’en guerre impérialistes, c’est cette réalité là, que nous devons éclairer de toutes nos forces et en mesurer les progrès comme les difficultés. Contre la propagande bourgeoise qui pousse les peuples à choisir un camp impérialiste contre un autre, la propagande pacifiste horrifiée ne suffit plus, il faut renverser le capitalisme.
Notre camp est la révolution.
Pour cela, le centre de nos préoccupations doit d’être d’en montrer la réalité et sa progression.
La révolution et déjà une réalité au Soudan et au Sri Lanka. Ce sont de petits pays et lointains mais derrière eux, c’est une partie de l’Afrique qui se mobilise comme d’ailleurs de l’Amérique Latine, mais c’est surtout toute l’Asie du sud, deux milliards d’habitants, qui est entrée en ébullition.
L’épicentre mondial des luttes populaires actuelles a pris un tour révolutionnaire en Asie du sud avec les insurrections au Sri Lanka, mais aussi les soulèvements populaires en Inde, au Pakistan, au Bangladesh ou au Nepal et la résistance au coup d’Etat militaire en Birmanie.
Ce vaste mouvement où les luttes dans chaque pays encouragent et instruisent celles dans les pays voisins, a lui-même un épicentre, c’est le soulèvement paysan en Inde en 2020-2021, pays de 1,4 milliards d’habitants, un instant suspendu mais qui repart aujourd’hui.
Ce soulèvement de 500 millions de tous petits paysans et ouvriers agricoles est profondément prolétarien. C’est pour cela qu’il s’est organisé à la base au travers d’un système d’Assemblées Générales décisionnaires et qu’il tendait avec sa coordination nationale à coordonner les multiples luttes en Inde – ouvriers, paysans, femmes, jeunes, étudiants, castes, intouchables, tribus… et à remettre en cause le capitalisme. Il a fait chanceler le pouvoir du parti de droite extrême au gouvernement en Inde le BJP de Modi.
Il s’est arrêté en novembre 2021 au bord de la prise du pouvoir, qu’il avait pourtant déjà dans bien des zones rurales, parce que parti d’un simple mouvement économique paysan, sa direction n’était pas prête à prendre le pouvoir, alors que la logique de la situation et les classes populaires y poussaient.
Ça été la même chose au Sri Lanka en juillet 2022. Les classes populaires ont dégagé le pouvoir, mais leur direction, à ce moment une coordination étudiante, n’a pas osé le prendre. Et c’est la même tendance, à un degré moindre, au Pakistan ou au Banglasdesh où les luttes populaires sont massives et ont un caractère insurrectionnel mais où, le prolétariat butant sur son manque d’indépendance politique, ce sont encore les dirigeants bourgeois qui arrivent à en garder la tête..Mais ce n’est que partie remise, tout cela évolue. Une direction prolétarienne et des programmes tendant au socialisme s’ébauchent dans l’expérience de la lutte, aussi bien au Sri Lanka, au Pakistan que surtout en Inde.
La coordination paysanne indienne qui a appelé avec succès au blocage total du pays ce 31 juillet 2022, vient de faire un pas en avant important en s’élargissant et en se fédérant avec des associations d’étudiants, d’anciens militaires contestataires et surtout de jeunes ouvrier précaires dont les révoltes en ce mois de juin 2022 pour l’emploi, ont enflammé le pays en même temps que de nombreux trains, gares et bâtiments du pouvoir.
La nouvelle coordination autour du mouvement paysan appelle à se mobiliser tous ensemble à partir du 7 août et a exigé que tant que les jeunes prolétaires précaires n’auront pas un emploi stable et correct, l’emploi des ministres, des policiers et des juges ne devait pas être garanti non plus. Bref, qu’ils devaient être révocables à tout moment. C’est une déclaration révolutionnaire qui dépasse la seule exigence de la chute du gouvernement, mais qui touche au système et en préfigure un autre bien plus démocratique. Mesurons bien l’événement : il ne s’agit pas d’une déclaration d’un petit groupe subversif, mais de celle d’un mouvement de masse à l’échelle d’un continent qui aura des répercussions dans toute la région. L’indépendance politique prolétarienne grandit en même temps qu’elle ose affirmer son propre programme. La taupe révolutionnaire creuse.
En même temps, la résistance du peuple Birman au coup d’Etat des militaire de février 2021 vient de prendre une nouvelle dimension avec la grève générale depuis 6 jours au Manipur, Etat indien frontalier de la Birmanie, composé des mêmes peuples qu’en Birmanie, qui se battent contre les frontières qui divisent les communautés qui les composent et vivent de part et d’autre des frontières tracées au crayon par les colonialistes britanniques. Une situation qui pourrait s’étendre aux 45 millions d’habitant des autres Etats indiens frontaliers de la Birmanie, mais aussi du Bangladesh. L’idée d’une fédération des Etats d’Asie du sud n’est pas encore là, mais on voit comment cette idée pourrait progresser, contre les exploiteurs et contre la guerre, dans la solidarité des peuples de la région entre eux plutôt qu’à quémander l’aide du FMI comme le font les États sri lankais et pakistanais..
Et cela d’autant que les mobilisations s’étendent à l’Asie du sud-est, en Malaisie ou aux Philippines ces dernières semaines, ce qui est rare, mais surtout en Indonésie où une marche nationale des ouvriers a commencé ce 6 août pour aboutir le 10 août devant le parlement à Jakarta, la capitale, où les organisateurs qui ont baptisé leur mouvement « l’alliance de un million de travailleurs » attendent un million de participants pour faire tomber des lois anti-ouvrières… et pourquoi pas, le gouvernement..
Ca parait lointain ?
Pas tant que ça. Ce sont les mêmes courant fondamentaux qui irriguent partout les mouvements sociaux en Afrique ou en Amérique du sud et même en Europe et c’est cette dynamique qu’il faut exposer au grand jour.
La formidable résistance du peuple ukrainien les armes à la main s’inscrit dans cette vague où il faut aussi inscrire les chutes des populistes nationalistes Trump, Johnson et demain Bolsonaro ou encore l’affaiblissement de Macron.
Et plus que cela encore, la chute de Johnson, c’est aussi la défaite de sa politique nationaliste du Brexit qui a conduit à un effondrement en Grande Bretagne plus important qu’ailleurs. Or, de l’échec au fond de cette guerre politique et économique contre les travailleurs britanniques, il en sort une vague de grèves inédite comme n’en a jamais vu le pays depuis 1926 et qui pourrait bien se transformer en grève générale, ou qui, en tous cas en offre l’opportunité et en pose la possibilité.à l’horizon de tous les pays d’Europe, eux-mêmes en proie à des mouvements sociaux provoqués par une inflation galopante et demain peut-être des pénuries importantes.
La guerre à l’agenda des capitalistes, c’est aussi pour détourner dans des impasses nationalistes et guerrières les révoltes populaires qu’ils voient monter un peu partout, et au bout du compte, la mise de la révolution et de l’internationalisme à l’agenda des peuples.
Alors n’hésitons pas, préparons la révolution qui vient et commençons par la documenter là où elle a pris de l’avance.
Jacques Chastaing le 7 août 2022

Jacques Chastaing

Et voilà la suite, parce que ça ne tenait pas en un seul texte
La circulation des capitaux (qu »elle soit nécessaire pour attirer ou exporter) exerce une pression sur les politiques impérialistes, mais elle ne la définit pas à aucun moment particulier ou « en fin de compte ». Oui ça fait mal pour la façon de penser marxiste mais il faut l’admettre Ce qu’Arrigi a déjà fait, puis Harvey, mettant en évidence le « territorial » (t. Eh bien. Logique impérialiste et « logique économique » (circulation du capital, ses pannes et la pression qu’il crée). Ces logiques peuvent converger ou s’effondrer.
Bon bien mais et la Russie ? Un autre effort de réflexion à faire ici. Lénine n’a pas accidentellement qualifié l’impérialisme russe de « économiquement arriéré et bureaucratique militaire ». Ceci fait référence à l’analyse de Trotsky (« Notre révolution ») qui a montré que la trajectoire historique de la Russie était déterminée par une combinaison de conditions locales uniques (faible productivité agricole et faible densité de population) et d’une frontière étroite al compétition qui a conduit à la création d’un État de garnison hypermilitariste. Cette combinaison de conditions locales et d’interaction internationale est aisément la base des analyses modernes du « développement inégal et combiné », et tout a commencé avec la Russie, oui. Conditions spéciales + concurrence internationale -> État spécial -> impérialisme spécial (principalement non économique).
LA MÊME EST vrai pour la Russie moderne. La Russie a hérité de l’Union soviétique de la deuxième armée mondiale et du VK, une culture stratégique du « type non capitaliste » (dans laquelle les intérêts commerciaux ne seront pas toujours et partout au premier plan), mais a aussi acquis sa propre super concentrée capitale qui a commencé l’expansion régionale et internationale au début des années 2000. À un certain stade (dans les années 2000), la politique impérialiste de Poutine coïncide avec les besoins d’accumulation de capital, et ce depuis 2014. ça a cessé de coïncider. Qu’est-ce qui NE FAIT PAS de la Russie un pays non impérialiste ! C’est TOUJOURS de l’impérialisme. Bien que motivé par des motifs non économiques. Parce que 1) comme je l’ai montré, il n’y a fondamentalement pas de relation fonctionnelle absolument stricte entre l’impérialisme et la circulation du capital, 2) l’impérialiste russe dans son ensemble est différent de celui occidental en raison d’un développement inégal et combiné. C’était différent en 1916 et c’est différent maintenant.

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