Déclaration. Contre la répression coloniale, défendons le droit à l’autodétermination de la Kanaky

POUR LE DROIT À L’AUTODÉTERMINATION !

Déclaration. Contre la répression coloniale, défendons le droit à l’autodétermination de la Kanaky

A la suite de la décision du gouvernement Macron-Attal de procéder au « dégel du corps électoral » en Kanaky, les mobilisations se durcissent. Contre la répression coloniale de l’Etat, Révolution Permanente envoie son soutien au peuple kanak.

A bas la répression coloniale de la France en Kanaky !

Contre l’état d’urgence, le déploiement de l’armée et les milices caldoches !

Pour le droit à l’autodétermination !

A la suite de la décision du gouvernement Macron-Attal de procéder au « dégel du corps électoral » en Kanaky, dérogeant aux accords pourtant signés depuis la fin des années 1980 entre Paris et les forces autonomistes et indépendantistes, l’archipel du Pacifique connaît une situation de très forte mobilisation des populations kanak et mélanésiennes. Depuis maintenant quatre jours, la révolte d’une partie de la jeunesse de l’île et la réponse de l’État et des milices caldoches conduit à une situation que certains n’hésitent pas à qualifier de quasi-guerre civile. La faute est du côté du gouvernement français, de ses relais locaux et de la bourgeoisie caldoche qui refusent d’envisager tout réel droit à l’autodétermination pour l’archipel, situé à 17 500 km de Paris et colonie française depuis 1853.

Concession au combat des indépendantistes depuis les années 1970, l’archipel a déjà connu trois référendums sur son avenir depuis 2018. Le dernier a été organisé en pleine crise du Covid par Macron, contre l’avis des forces indépendantistes qui l’ont boycotté, ce qui a débouché sur un taux de participation de 44%. Avec le « dégel du corps électoral », Paris veut garantir le rattachement de l’archipel et le maintien de son statut colonial en élargissant l’électorat à des personnes n’étant même pas nées sur l’archipel. Face à ce coup de force anti-démocratique, les courants indépendantistes politiques et syndicaux kanak ont appelé à une série de mobilisations. A partir du 13 mai, à l’appel, notamment de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), impulsée en novembre dernier par une grande partie des forces politiques indépendantistes du Front de libération national kanak et socialiste (FLNKS), les manifestations et blocages sont montés en intensité à la suite du vote par le Parlement, à Paris, du « dégel ».

Les milliers de jeunes et de travailleurs kanak mobilisés, largement soutenus par la population kanak, se sont heurtés aux forces de police et de gendarmerie stationnées sur place ainsi qu’aux milices de colons caldoches et de métropolitains que les forces de répression laissent agir, quand elles ne les soutiennent pas. Le bilan est lourd pour les Kanak avec au moins trois manifestants tués, des centaines de blessés, près de 200 interpellations et au moins cinq dirigeants du CCAT assignés à résidence. Le 15 mai, en effet, Macron a décrété l’État d’urgence, ce qui permet au gouvernement d’imposer un état d’exception. Paris a ordonné le déploiement de renforts militaires sur les ports, l’aéroport de Nouméa, ainsi que l’intervention de forces spécifiques (CRS 8, GIGN, RAID) envoyées depuis Paris pour réprimer le mouvement.

En France, les principaux médias relaient les « appels au secours » lancés par les forces loyalistes et le commissaire de la République sur place, véritable successeur de l’ancien gouverneur colonial. Les médias font par ailleurs la part belle au discours des colons, présentent leurs milices comme des remparts contre le chaos et stigmatisent, bien entendu, les « émeutiers » kanak mais aussi la CCAT, en phase avec le discours de l’État français. Dans le même temps, des réseaux sociaux comme Tik Tok sont censurés de manière inédite dans l’histoire du pays, pour empêcher la population de diffuser des informations sur la situation. Tout est orchestré pour que la population adhère à la répression, coloniale et raciste, d’une mobilisation qui s’érige, précisément, contre ce même ordre colonial. Les médias français passent en boucle les images des « dégâts » causés par la mobilisation dans les principales zones industrielles et commerciales du Sud, en passant sous silence les énormes disparités de revenu entre Kanak, Caldoches et métropolitains, le taux de chômage qui frappe plus particulièrement les Kanak, l’inégalité dans l’accès à l’éducation, à la formation ou à la santé, l’impact des grands projets miniers sur la vie des communauté, l’incroyable concentration des richesses dans les mains d’une poignée de grandes familles de colons… Autant de signes de la permanence d’un modèle colonial basé, depuis un siècle et demi, sur la spoliation du foncier, la prédation des richesses naturelles, l’oppression et le racisme.

Depuis la France, les organisations du mouvement ouvrier et de la jeunesse se doivent d’être solidaires des mobilisations kanak, sur place, de dénoncer la politique coloniale de Paris, l’état d’exception mis en place par Macron, la répression de la mobilisation et son cortège d’assassinats, de blessés et d’interpellés, demander le retrait de la loi sur le « dégel du corps électoral » et défendre le droit à l’autodétermination en Kanaky.

L’impérialisme français a subi ces dernières années un certain nombre de revers dans son pré-carré françafricain. Dans l’Hexagone, le mouvement ouvrier s’est massivement opposé aux politiques pro-patronales des gouvernements successifs mais sans réussir à le faire reculer. Cet été encore, après le grand mouvement des retraites, la jeunesse des quartiers populaires s’est soulevée contre les violences policières et racistes dont elle est victime. La bourgeoisie française, qui défend dans le Pacifique ses positions face à ses partenaires ou concurrents, en plus d’importantes richesses naturelles, ne saurait admettre une modification substantielle de l’ordre colonial en Kanaky [1]. C’est ce qui explique la réforme du corps électoral voulue par Macron et la violence de la répression actuelle.

Bien entendu, la droite et l’extrême droite françaises soutiennent le gouvernement, voire lui demandent d’intensifier la répression. A « gauche », Glucksmann appelle au « rétablissement de l’ordre républicain ». D’autres, un peu moins réactionnaires, se contentent d’appels creux au calme et à la paix, en oubliant complètement qu’un retour au statu quo en Kanaky reviendrait à imposer une paix injuste en faveur de Paris et de ses relais locaux, contre les intérêts du peuple kanak, des classes populaires et de la jeunesse de l’archipel.

Face à la répression de la mobilisation et à la criminalisation des courants politiques indépendantistes radicaux, Révolution Permanente envoie tout son soutien au peuple kanak, aux réprimés et aux manifestants dont le droit à l’autodéfense et à la résistance face à un ordre colonial et aux milices caldoches est indiscutable. Révolution Permanente se tient, en France, à disposition de l’ensemble des initiatives de solidarité active avec la lutte en cours en Kanaky. Nous sommes persuadés que la lutte contre le colonialisme en Kanaky est indissociable du combat révolutionnaire que nous menons contre le capital et son gouvernement, en France.

Toute victoire du gouvernement contre les Kanak impliquerait une victoire de la macronie contre le monde du travail et la jeunesse, en France. A l’inverse, si en Kanaky la mobilisation réussissait à faire reculer Macron et la bourgeoisie caldoche, ce serait autant de gagner, ici, pour nos prochains affrontements contre ce gouvernement et le patronat. Il s’agirait aussi d’une victoire de l’ensemble des peuples actuellement colonisés à travers le monde.

C’est en ce sens que les organisations du mouvement ouvrier et de la jeunesse, les organisations de la gauche politique et syndicale, la jeunesse mobilisée contre le génocide actuel en Palestine ne peuvent tolérer une nouvelle opération coloniale menée directement, cette fois-ci, par l’impérialisme français. Toutes et tous ensemble, nous nous devons d’appeler à l’arrêt immédiat de la répression coloniale, policière et militaire, de la criminalisation du mouvement kanak, et exiger la levée de l’état d’urgence et le respect du droit élémentaire à l’autodétermination de la Kanaky, ce qui passe par le retrait de toute réforme du corps électoral.

[1Le rôle renouvelé de l’Indo Pacifique fait de la Kanaky un territoire stratégique clé pour la France, dont 1,4 million de kilomètres carrés de Zone Économique Exclusive sont concentrés dans le territoire maritime de la Kanaky, la plus grande frontière maritime de la France au monde avec l’Australie. La France dispose aussi de troupes militaires permanentes (1450 militaires au sein de la FANC) et de nombreux accords de défense dans la région. La prétendue « autonomie stratégique » défendue par Emmanuel Macron a pour conséquence concrète l’accroissement de l’oppression du peuple kanak, sans laquelle la France ne pourrait pas défendre ses intérêts internationaux et revendiquer un rôle clé dans la confrontation avec la Chine.

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